La Poste, 251 000 salariés, traverse une mauvaise passe. En raison de la dématérialisation des échanges, le volume du courrier chute d’environ 6 % chaque année et fait perdre 500 millions de recettes par an. Conséquence : le groupe doit se renouveler, et vite, notamment en diversifiant ses activités. Le défi est de taille. Car on ne transforme pas un mastodonte public comme une start-up. Heureusement, de braves petits soldats sont là pour relever le gant : les managers, véritable « cheville ouvrière » du changement. Comment s’y prennent-ils pour motiver leurs équipes ? Quelles sont les difficultés mais aussi les petites victoires qu’ils rencontrent au quotidien ? Voilà ce que propose de montrer la journaliste Dominique-Anne Michel dans son nouveau livre. Ce dernier s’appuie sur le témoignage de vingt-huit managers aux profils et aux âges variés, œuvrant à différents niveaux de responsabilité et dans diverses branches. Avec adresse, Dominique-Anne Michel dessine les contours de la nouvelle Poste, celle qui prend forme depuis quelques années et se veut plus participative, plus à l’écoute de ses salariés et désormais résolument tournée vers le client. Son texte est précis, documenté et extrêmement bien écrit. Il donne un éclairage intéressant sur les changements organisationnels à l’œuvre au sein du groupe et sur la nouvelle culture d’entreprise que les managers essaient, tant bien que mal, de promouvoir.

C’est d’ailleurs un bel hommage que l’auteur rend à ces hommes et femmes qui tentent, chacun à leur niveau, de faire évoluer leur entreprise. Seulement voilà, l’ouvrage pèche justement par manque de recul. À en croire Dominique-Anne Michel, La Poste serait le lieu de tous les possibles, où il ferait bon chaque jour venir travailler. Les difficultés décrites par les managers ne semblent ainsi jamais insurmontables. Sont d’ailleurs assez peu mentionnées les pressions pour faire du chiffre ou encore les conséquences en termes de charge de travail de la réduction drastique du nombre de salariés (ils étaient encore 304 000 en 2004). La vague de suicides de ces dernières années ou encore les accusations de harcèlement moral portées contre la direction, ne sont pas évoquées. Quant aux managers interrogés, ils semblent sortis d’une carte postale : à la fois bienveillants mais fermes avec leurs équipes, respectueux de leur propre hiérarchie tout en étant créatifs et surtout porteurs d’un enthousiasme à toute épreuve. Bref, des salariés modèles, dont on a peine à croire qu’ils existent vraiment. Sans parler de ces portraits un brin trop élogieux, la journaliste se permet, par moments, des généralités a priori invérifiables, qui transforment son texte en élégie. Comme celle-ci : « Sur quoi vous engagez-vous aujourd’hui ? Telle est la question exigeante qui va permettre de réussir la journée et qu’on entend poser chaque matin à tous les étages de la grande maison ». C’est dommage, un peu plus d’impartialité n’aurait pas fait de mal.

Dominique-Anne Michel, les Éditions de l’Atelier, 144 pages, 15 euros.