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Santé, prévoyance : la flexisécurité en marche

Dossier | publié le : 05.12.2017 |

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Santé, prévoyance : la flexisécurité en marche

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L’accord national interprofessionnel de 2013 sur la compétitivité et la sécurisation de l’emploi a été à l’origine de profondes modifications sur le marché du travail. Les ordonnances Macron, qui visent également à favoriser la flexisécurité, ne semblent pas remettre en cause ce qui a été bâti : généralisation de la complémentaire santé, doublée de la réforme des contrats responsables, amélioration de l’effectivité de la portabilité en santé et prévoyance. Tour d’horizon.

Selon la réforme du Code du travail, le cadre juridique général est fixé : les garanties collectives de protection sociale complémentaire font partie du bloc thématique, laissant la primauté impérative de l’accord de branche sur l’accord d’entreprise, sauf garanties au moins équivalentes apportées par ce dernier. A cet égard, la continuité est assurée. Pour l’heure, l’attention se porte sur la fin de la période de mise en conformité des contrats responsables au 31 décembre 2017, sur les effets de l’encadrement, ainsi que sur la portabilité des droits et plus généralement sur la question des « sortants ».

Un encadrement aux effets pénalisants

La mise en œuvre de la généralisation de la complémentaire s’est accompagnée d’une modification du cahier des charges des contrats responsables. Les entreprises ont jusqu’au 31 décembre 2017 pour se mettre en conformité. La pédagogie a été le maître mot pour s’y retrouver dans ce mille-feuille juridique que constitue le cadre juridique des contrats collectifs et aussi pour expliquer les effets qui ne sont pas toujours ceux attendus.

« Avec la généralisation et l’ouverture du marché, la règle a été la mise en place de contrats standards. Cela se traduit pour les salariés déjà couverts auparavant par des niveaux de prestation potentiellement moins haut de gamme dans l’optique ou le dentaire », explique Thomas Perrin, directeur général adjoint, métier santé/prévoyance chez Apicil. Un point de vue largement partagé. « La mise en conformité est déjà réalisée à 95-97 %, chez Harmonie Mutuelle. Nous avons dû faire preuve de pédagogie car les contrats comprennent une couverture moins importante que la précédente, pour les salariés qui bénéficiaient déjà d’une protection. Certaines grandes entreprises ont voulu profiter de la période transitoire », indique Jean-Louis Mercier, directeur développement Groupe du groupe de protection sociale mutualiste VYV (10 millions de personnes protégées). « Les plafonds de garantie et la volonté d’encadrement ont constitué un carcan dont il est difficile de sortir », estime Jean-Philippe Martinez, responsable des relations extérieures et communication d’Uniprévoyance. « Les pouvoirs publics ont fait jouer aux assureurs un rôle de régulateur des tarifs médicaux qui n’est pas le leur. » De plus, selon lui, « la limitation des remboursements n’a pas conduit à une limitation des dépassements. Le coût des prothèses n’a pas diminué. Les assurés voient leur reste à charge augmenter, sauf s’il existe un socle obligatoire auquel s’ajoutent des options. Ces garanties optionnelles sont supportées par le salarié ».

Au cours des dernières années, l’émergence des assurances surcomplémentaires est significative. La position d’Apicil a été de faciliter cette mise en place. Résultat : « plus de 40 % de nos assurés sont couverts en surcomplémentaire, précise Thomas Perrin. L’apparition de ce nouveau type de couverture est aussi un élément de réponse à la problématique du restant à charge ». Mais il souligne que, dans les petites entreprises, le niveau de couverture est parfois bas pour des questions de financement. « Le levier protection sociale n’est pas toujours un levier managérial. » Pour Uniprévoyance, « la solution pour limiter les restes à charge se porte vers les réseaux de soins » tels Itelis, indique Jean-Philippe Martinez.

Force est de constater que beaucoup de questions ne sont pas réglées. Il en va ainsi de la question de l’organisation du système de soins français et de la désertification médicale constatée ou de celle concernant le renoncement aux soins en lien avec l’accès à l’information. Des sujets qui dépassent largement le cadre de l’entreprise et sur lesquels la nouvelle ministre des Solidarités et de la Santé a promis de se pencher. Le débat devrait donc porter sur les réseaux de soins pour remédier à la désertification médicale avec des délais d’attente de 48 à 61 jours pour certaines spécialités médicales. « En cinq ans, le délai s’est allongé de 13 jours », souligne Jean-Louis Mercier.

Pour ce qui est de la complémentaire santé, en dehors des derniers remous de la mise en conformité, le chantier semble achevé avec la généralisation sur les rails depuis 2016. « La priorité a été donnée à la complémentaire santé, rappelle Jean-Philippe Martinez. On aurait pu imaginer que la priorité soit donnée à la prévoyance. Pour la complémentaire santé, 95 % des salariés étaient déjà couverts. » Mais il reste encore du chemin à parcourir avec les fonctionnaires.

Une uniformisation des offres

Pour Jean-Louis Mercier, « on a assisté dans l’ensemble à une uniformisation des offres et au final, la différenciation se fait sur la lisibilité, la transparence, l’immédiateté. Le digital est un atout fort. Il est important de définir à quel moment les salariés ont besoin d’information et surtout qu’ils puissent la trouver quand ils en ont besoin. Nous avons mis l’accent sur le contact dématérialisé de bon niveau et le contact individualisé ». Ce besoin d’information demande un réel effort, tant de la part des assureurs que des entreprises. Celles-ci doivent veiller aussi à respecter leurs obligations en matière d’information, notamment sur les garanties des droits dans le temps. L’autre sujet porté par l’ANI de 2013 était celui de la portabilité collective. « La portabilité constitue une avancée et ce droit a été simplifié et rendu effectif avec un seul mode de financement mutualisé. Sur le coût, il est difficile de faire des moyennes. La disparité est fonction des turnovers, de l’utilisation des contrats courts et des secteurs professionnels (activités saisonnières). Le contexte rend difficile une évaluation du coût. Hors Île-de-France, la portabilité coûte généralement moins cher, le turnover étant plus important en Île-de-France et la fidélisation plus importante en dehors », précise Jean-Philippe Martinez. « Le droit à la portabilité est globalement exercé par nos clients », confirme Thomas Perrin. La communication se fait par le digital (avec mise à jour et téléchargement des attestations par l’ex-salarié). Le coût de la portabilité a été estimé entre 5 et 9 %, avec une moyenne de 6 % au niveau national. Les secteurs les plus impactés sont la restauration et le commerce »… Où le turnover est très élevé.

Pour Jean-Louis Mercier, « la portabilité est partiellement utilisée ». « Tout dépend des secteurs d’activité. Quand les branches ont communiqué sur le sujet, l’information circule. Mais une population qui pourrait en bénéficier reste mal informée ».

Ce qui signifie que les entreprises doivent remplir leurs propres obligations pour que le salarié soit informé et pour ne pas se voir reprocher le manquement à cette obligation. Des obligations qui portent aussi sur le volet de la loi Evin qui a donné lieu récemment à des évolutions (voir Liaisons sociales magazine n °182, mai 2017). Au final ces évolutions n’impacteraient pas fondamentalement les choix. « Sur les contrats collectifs, nous proposons une option soit pour le dispositif loi Evin soit pour des contrats collectifs sortie de groupe avec solidarité. Un tarif unique s’applique entre retraités et il n’y a pas de tranche d’âge. Très peu de personnes nous demandent des contrats strictement type Loi Evin. Certaines garanties des contrats des actifs ne sont pas nécessairement adaptées aux besoins des retraités d’où l’intérêt des contrats en sortie de groupe », indique J. P. Martinez. Même écho du côté d’Apicil : « Les entreprises ne veulent pas revaloriser le coût des actifs », approuve Thomas Perrin.

Degré élevé de solidarité : un choix très ciblé

Pour pouvoir être éligibles aux recommandations effectuées lors des appels d’offres suite aux négociations de branche, les organismes assureurs doivent proposer des contrats présentant un degré élevé de solidarité (CSS art. L. 912-1, D 912-1, R 912-1). Une part de financement au moins égale à 2 % de la prime doit être consacré à des actions comprenant des prestations à caractère non directement contributif, pouvant notamment prendre la forme d’une prise en charge partielle ou totale de la cotisation pour certains salariés ou anciens salariés, d’une politique de prévention ou de prestations d’action sociale. Dans ce cadre l’effort porte en priorité sur la cotisation du salarié pour le public à faible revenu et/ou l’aide aux salariés en apprentissage.