logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

À la une

“L’employeur ne peut opposer de restrictions aux libertés d’expression et d’opinion.”

À la une | publié le : 05.06.2017 | Nicolas Lagrange

Image

“L’employeur ne peut opposer de restrictions aux libertés d’expression et d’opinion.”

Crédit photo Nicolas Lagrange

Comment la liberté d’expression des opinions politiques dans l’entreprise est-elle encadrée ?

L’employeur ne peut opposer de restrictions à des libertés individuelles dites fondamentales, et notamment aux libertés d’expression et d’opinion. Seul un comportement du salarié de nature à perturber le fonctionnement de l’entreprise, de porter atteinte à son image et plus généralement de nuire concrètement à ses intérêts compte tenu des fonctions exercées par le salarié, peut justifier une réaction de l’entreprise. Mais il faudra faire la preuve, en cas de contentieux, que les restrictions décidées étaient proportionnées. Pour les postes à responsabilité, c’est sur le terrain de l’obligation de loyauté contractuelle qu’une intervention de l’employeur pourrait aussi être envisagée. Par ailleurs, il est rare que les règlements intérieurs ou les chartes abordent ce sujet de manière précise.

Êtes-vous sollicité sur des dossiers de contentieux ayant trait aux opinions politiques ?

À ma connaissance, ce type de dossier est rare. D’abord parce qu’il y a finalement un faible nombre de salariés exerçant ou revendiquant des mandats politiques exposés. Ensuite, parce que notre culture n’est pas de faire état trop ouvertement de nos opinions politiques au sein de notre environnement de travail. Les litiges les plus visibles concernent généralement des représentants syndicaux, dans le cadre de conflits sociaux. Mais dans ce cas, la protection liée à leur statut et les garanties liées à la liberté d’expression s’opposent généralement à toute éventuelle sanction de propos trop orientés. On pourrait néanmoins s’interroger sur les conséquences de la présence de candidats à la présidentielle à l’intérieur du site de l’entreprise Whirlpool à Amiens, notamment en termes d’image pour l’entreprise. Les circonstances sont très particulières mais, dès lors que ce sont les salariés eux-mêmes qui ont fait entrer les candidats sur le site de production, on peut douter de l’intérêt des dirigeants de l’entreprise à une telle initiative.

Le message anti-FN du P-DG de Paprec à ses salariés ou l’appel pro-Fillon du patron des boulangeries Paul impliquant ses salariés peuvent-ils avoir des incidences juridiques ?

Il n’y a pas en soi de réglementation, ni d’incidences au sens strictement juridique. Ils sont probablement mandataires sociaux, hors champ de la législation du travail. On est ensuite sur le terrain de la liberté d’expression. Seuls les actionnaires pourraient éventuellement estimer que ce comportement est inadapté et contraire à l’intérêt de l’entreprise. On considérera ensuite que ces faits ne sont pas suffisants pour orienter le sens du vote du salarié. A contrario, un salarié qui enverrait une communication publique, au nom de l’entreprise, en vue de soutenir un candidat, encourrait des risques de poursuite par son employeur.

Auteur

  • Nicolas Lagrange