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Un rebelle défend l’emploi chez Vélib’

Actu | Eux | publié le : 02.05.2017 | Rozenn Le Saint

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Un rebelle défend l’emploi chez Vélib’

Crédit photo Rozenn Le Saint

À Paris, pour les étrangers, il y a la tour Eiffel et les Vélib’ », rit Mohamed Ahmed Dini, ancien sans-papiers qui a obtenu la nationalité française en 2005, après cinq années de petits boulots. Rien ne le prédestinait à travailler pour l’entreprise de vélo en libre-service si ce n’est son année de naissance à Djibouti, 1964, la même que l’entreprise JCDecaux. Embauché en 2007, dès l’implantation du service dans la capitale, il fait figure de « dinosaure » pour ses collègues. « J’ai sauté sur la première opportunité de contrat à durée indéterminée, cela aurait pu être égoutier, cela aurait été pareil », confie ce grand gaillard. Un emploi pérenne, c’était la chose la plus précieuse à ses yeux. Et ça l’est toujours. Alors quand le géant de l’affichage perd le marché du Vélib’ au profit de Smoove, la PME familiale montpelliéraine, il s’en inquiète immédiatement. D’ailleurs, « une clause de maintien dans l’emploi aurait dû être intégrée dans la procédure d’appel d’offres de la mairie de Paris, comme c’est le cas pour Autolib’ », reproche-t-il. Malgré les grèves perlées et manifestations en mars et avril pour que la clause soit ajoutée, il n’en est rien. Smoove remporte le marché et voit l’avenir de Vélib’ en grand. La PME imagine 30 000 Vélib’ en libre-service, contre 20 000 actuellement. Avec seulement 250 salariés. JCDecaux accuse Smoove de dumping social et a déposé un recours devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris contre la décision d’attribution par la commission d’appel d’offres du marché et « pour la défense des 315 collaborateurs qui participent au succès sans équivalent de Vélib’ depuis dix ans », mentionne le communiqué de presse de la direction. La décision devrait être rendue début mai. Un coup de gueule mal vécu par Mohamed Ahmed Dini. « Jean-François Decaux parasite notre combat. Il n’a pas à se faire passer pour le défenseur de la veuve et de l’orphelin alors qu’il a toujours méprisé ses salariés », s’emporte le représentant Solidaires au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) depuis 2009, syndicat majoritaire chez Vélib’ à l’époque, à présent deuxième derrière la CGT.

À son arrivée dans l’entreprise, il est régulateur : il vide les stations pleines de deux-roues pour les emporter là où les bicyclettes manquent. La direction, qui n’a pas souhaité répondre à nos questions, s’appuie sur son absence d’équivalence avec le permis de conduire français pour le licencier. C’était sans compter sa capacité à se défendre. Il est ainsi devenu la bête noire de JCDecaux et à chaque attaque, il répond par une procédure aux prud’hommes. « Comme il a la tchatche, il incarne la rébellion à lui tout seul », traduit Laurent Degousée, codélégué de Solidaires Sud commerces et services. En guise de punition, Mohamed Ahmed Dini est muté aux ateliers : le terrain de travail idéal pour ce représentant CHSCT, qui obtient une expertise sur les conditions de travail en 2013, parvient à éliminer un solvant cancérigène de la liste des produits utilisés, à alerter sur les outils de travail, les équipements de protection individuelle, la température dans les locaux… Ce qui lui vaut des duels réguliers avec Jean-François Decaux qui minimise les accidents du travail et troubles musculo-squelettiques du personnel. Voir le président du groupe s’afficher aujourd’hui en Robin des bois des salariés le rend d’autant plus amer.

Mohamed Ahmed Dini : Délégué syndical Solidaires et mécanicien Vélib’

1964

Naissance à Djibouti.

2001

Arrivée en France et demande d’asile.

2005

Nationalité française.

2007

Embauche en CDI à Vélib’.

2009

Représentant Solidaires au CHSCT.

Auteur

  • Rozenn Le Saint