logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Idées

Actions de groupe : le long-termisme prévaut

Idées | Juridique | publié le : 03.04.2017 | Yasmine Tarasewicz

Image

Actions de groupe : le long-termisme prévaut

Crédit photo Yasmine Tarasewicz

Face à la persistance de certaines pratiques discriminatoires, la loi du 18 novembre 2016 dite « de modernisation de la justice du XXIe siècle » a étendu le mécanisme de l’action de groupe aux discriminations dans les relations de travail. L’action est réservée aux syndicats représentatifs pour les salariés en poste ainsi qu’à certaines associations pour les candidats à l’emploi et les stagiaires. Les salariés ne peuvent donc pas s’organiser comme ils le souhaitent, à l’inverse de ce qui se passe pour les class actions américaines. Cette règle a pour but d’éviter certaines dérives. Mais certains cas de discrimination (l’égalité salariale hommes/femmes), à l’égard desquels existe hélas un certain consensus culturel, pourraient ne pas être des priorités syndicales.

Autre inconvénient, l’action mettra du temps à aboutir. Le texte prévoit une phase de négociation préalable à l’instance judiciaire. Les titulaires de l’action pourront saisir le TGI six mois après que l’employeur a été mis en demeure de cesser la pratique discriminatoire. Cette négociation préalable doit favoriser la résolution amiable du litige dans un cadre préservant l’anonymat des salariés. En l’absence d’accord, la saisine du tribunal déclenchera l’action judiciaire. Or, dans la majorité des cas, les contentieux de masse ne deviennent définitifs qu’une fois tranchés en appel, voire en cassation. Compte tenu de l’encombrement des juridictions, l’indemnisation sera longue à venir. Enfin, la procédure n’est pas exclusive. Elle n’a pas vocation à se substituer aux actions individuelles des salariés. En effet, le juge civil n’allouera de réparation que pour le préjudice né à compter de la mise en demeure de l’employeur. Le conseil de prud’hommes demeurera compétent pour indemniser le préjudice antérieur. Cette multiplication des voies contentieuses pour obtenir la réparation intégrale du préjudice risque de décourager les plaignants ou, au contraire, d’encombrer davantage les juridictions. De plus, des divergences entre les décisions du juge civil et du juge prud’homal pourront apparaître. Seule la pratique permettra de vérifier si cette nouvelle action est adaptée à notre culture et à notre droit de la discrimination. Vu le peu de succès rencontré par les actions de groupe déjà autorisées en matière de consommation, de santé et d’environnement, le constat ne sera pas opéré avant longtemps.

Auteur

  • Yasmine Tarasewicz