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Les nouvelles recettes du team building

À la une | publié le : 05.12.2016 | Judith Chetrit

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Les nouvelles recettes du team building

Crédit photo Judith Chetrit

Se retrouver ensemble dans un campement ou un atelier de cuisine permet de créer des liens et de développer un sentiment d’appartenance. Mais gare à ne pas transformer ces animations en machine à trier les forts et les faibles !

L’offre pléthorique des entreprises proposant des activités de team building fait penser à celle d’un supermarché : il y en a pour tous les goûts. Depuis une quinzaine d’années, ces moments conviviaux sont devenus un rituel pour souder les équipes dans les entreprises. Récompenser des collaborateurs, instiller une dose de motivation, repérer les leaders… À chaque objectif RH son animation. « Il y a généralement un pic d’activité autour de la rentrée et des vacances de fin d’année, en juin… Ce sont des périodes clés pour ressouder les troupes », explique Jean Devanlay, directeur de Capdel, une agence d’événementiel. Mais attention, que l’on participe à un atelier de cuisine ou à un campement militaire, les nerfs sont parfois mis à rude épreuve. Et le maillon que l’on croyait fort de craquer par peur de l’échec et de se retrouver ostracisé par le reste de l’équipe.

Jeux de role.

Nouvelle coqueluche des DRH : l’escape game. Ce jeu de rôle grandeur nature plonge les salariés en équipes de trois à sept personnes dans une salle sans échappatoire, où le seul moyen de s’enfuir est de résoudre une série d’énigmes à plusieurs grâce à un raisonnement logique, une bonne dose de mémorisation, de communication et un soupçon d’adrénaline. Une occasion d’interroger l’intelligence collective. Plusieurs niveaux de difficulté et environnements sont proposés : une période de l’histoire de France, une île déserte, une maison hantée… Et même une prison !

Développeur et consultant, Mathieu Breton a testé ses nerfs sur un scénario pas banal. « Le patient d’une chambre d’un hôpital psychiatrique avait disparu en laissant des notes pour qu’on l’aide à retrouver la machine qu’il avait créée », se souvient ce jeune homme de 28 ans. Un jeu de rôle pas si innocent. « Peu de choses sont claires au début et il faut que quelqu’un prenne les choses en main. Cela peut révéler des personnalités », estime-t-il.

Et la clé du mystère n’est pas nécessairement au bout du couloir de ces escape games qui pullulent depuis quelques années. Chez John Doe, à Lille (Nord), il y a même deux salles par scénario, pour augmenter le nombre de participants. « On a collaboré avec des cabinets de ressources humaines pour proposer la meilleure formule aux entreprises, indique Benjamin Barbier, le directeur de l’agence. Comme on arrive à distinguer certains profils de joueurs et de salariés, on ambitionne même de s’en servir pour les aider à recruter. Car il y a les leaders et les suiveurs. » Certaines parties étant filmées, un débriefing à la fin permet de revenir sur les points faibles et forts de l’équipe. Histoire « d’en tirer un enseignement positif, même dans l’échec », précise Benjamin Barbier.

Cuisine.

Jenifer, consultante, a encore des photos de l’atelier qu’elle a suivi avec ses collègues : une partie convertie en jurés d’un soir, l’autre en concurrents autour d’une même rangée d’aliments à préparer. « C’était agréable de voir que les gens voulaient concocter des plats élaborés, se souvient-elle. Et même pour cuisiner une tomate, il y a toujours un compromis à obtenir avec les autres. » Après le succès des émissions de télé et des chefs érigés en modèles d’entrepreneurs, la cuisine reste une valeur sûre des activités de team building, pour moins d’une centaine d’euros par participant. « On essaie de les mettre avec des personnes qu’ils n’ont pas l’habitude de côtoyer », indique Mehdi André, directeur de la Maison des chefs, dont la clientèle est formée à 85 % d’entreprises.

Après les recettes, la dégustation. Les apprentis cuisiniers se retrouvent pour déguster le repas élaboré ensemble. Un moment de détente qui crée des souvenirs communs. Le travail en cuisine reste celui d’une équipe où, comme au bureau, les tâches sont divisées. « On s’éloigne certes du travail, mais sous un aspect ludique, on a aussi tendance à reproduire un format d’organisation. Seulement, la hiérarchie classique disparaît et des barrières peuvent tomber », témoigne Renaud Colas, fondateur d’Accortem, une agence de team building qui a travaillé avec Danone, BNP Paribas ou Carglass. Derrière les fourneaux, le N + 1 peut être vite dépassé par le talent culinaire de son subordonné…

Chantiers solidaires.

Faire des salariés des artisans au service d’une cause. C’est ce qu’ont vécu les employés de la société de gestion de fonds privés Amplegest. « On a démarré les chantiers solidaires en 2015 en plus de notre activité philanthropique, expose Marie Saltiel, associée. On voulait des choses très manuelles pour changer de notre côté intellectuel ou abstrait. » Et ils n’ont pas été déçus ! En une journée, une trentaine d’entre eux s’est ainsi retrouvée à nettoyer et repeindre une crèche accueillant des enfants en fin de journée dans le 18e arrondissement de Paris. Chez Deloitte, ce sont plusieurs centaines de nouveaux embauchés qui ont bénévolement retapé une aile de l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul, à Paris, pour accueillir des mal-logés. L’entreprise fournit la main-d’œuvre et finance les frais des travaux. « On est à la jonction de deux objectifs : faire vivre à une équipe des moments qui tranchent avec leur quotidien et susciter une fierté d’appartenance à l’entreprise chez des recrues de plus en plus sensibles à l’ouverture sociale », détaille Églantine de la Brosse, de la Fondation Les Amis de l’Arche, qui accueille des personnes souffrant d’un handicap mental. Des salariés de Renault ou de La Poste ont ainsi passé leur journée à faire du maraîchage bio, du bowling ou de la lecture à voix haute.

Cet esprit solidaire, Wassim Chelfi, de la start-up UpCycly, l’a détourné pour proposer aux entreprises de transformer des palettes usagées de transporteurs en mobilier de bureau pour leurs espaces de travail. Une formule d’aménagement écologique qui a, en un peu plus d’une année, déjà séduit Axa, la SNCF ou Airbnb, avec des animations payées entre 4 000 et 8 000 euros pour une dizaine de personnes. « On réfléchit d’abord ensemble à ce qu’ils veulent faire, puis on les aide à monter nos kits, à donner un coup de peinture ou de vernis, précise le fondateur. À la fin de la journée ou de la semaine, ils ont réalisé ensemble quelque chose de concret. »

Detox de wi-fi.

Dernier venu sur le marché : le digital detox. Une séquence sans wi-fi, sans ordinateur, sans téléphone ! Ces stages ambitionnent de détendre les salariés en les déconnectant de leurs objets quotidiens d’aliénation. Créer du lien grâce à l’environnement naturel. « Nous avons aujourd’hui beaucoup de moyens pour communiquer entre collègues, mais les rapports humains se sont dégradés », observe Julien Hoppenot, fondateur de Connexion Nature. Depuis quatre ans, il propose des stages d’« e-libération » aux entreprises. Portable éteint, les « déconnectés » apprennent à faire du feu, à filtrer l’eau, à reconnaître des plantes comestibles ou à chasser avec une sarbacane. Les défis s’enchaînent et permettent de déterminer qui possède les meilleurs réflexes dans un environnement hostile comme la forêt.

Une autre société, Insolit’Pro, va plus loin. Dans un camp de l’extrême au décor militaire, des salariés doivent apprendre à communiquer ensemble pour envoyer des messages aux secours aériens. « Ce sont souvent des commerciaux ou des consultants qui s’y inscrivent, plutôt portés sur les performances individuelles », précise Emmanuelle Muckensturm, cofondatrice de cette société installée dans le Grand Est. Une sorte de Koh-Lanta pour cadres en treillis où le plus fort vaincra. Pas si collectif.

Auteur

  • Judith Chetrit