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Mississippi : Nissan dit non aux syndicats

Actu | Ailleurs | publié le : 03.12.2015 | C.A.

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Mississippi : Nissan dit non aux syndicats

Crédit photo C.A.

Implanté à Canton depuis 2003, le constructeur nippon repousse toute velléité syndicale.

Aux grands maux les grands remèdes. Dans l’incapacité, depuis 2003, de syndicaliser l’usine Nissan de Canton, une petite ville située au centre du Mississippi, le syndicat américain United Auto Workers (UAW) a traversé l’Atlantique début novembre. Objectif : alerter les médias français sur les entraves à la liberté de se syndiquer chez le constructeur japonais. Et ainsi conduire l’État français, actionnaire de Renault et de Nissan, à réagir.

Le problème ? L’exercice, par le management de Nissan aux États-Unis, d’une politique antisyndicale assumée dans l’usine de Canton. Sur ce site qui n’arrête pas de grandir depuis son ouverture voilà douze ans sont fabriqués neuf modèles de véhicules. Or ses 6 000 salariés n’ont jamais eu l’occasion de se prononcer sur la tenue d’élections professionnelles.

Intimidations

Selon la loi américaine, il faut l’accord d’au moins 35 % des travailleurs pour organiser un vote. Mais pour l’instant, UAW a refusé de lancer la consultation dans ce sens, car le climat n’est guère propice. Dans les manuels destinés aux employés, la signature d’une « carte d’autorisation » – permettant à chacun de donner son accord sur la tenue d’élections – est déconseillée noir sur blanc par la direction de Nissan.

« Nous sommes forcés de nous rendre à des réunions antisyndicales. Ils menacent de délocaliser si les organisations s’implantent, témoigne Linda, technicienne sur une ligne de montage, venue spécialement à Paris avec UAW. Les managers épient les salariés, craignent qu’ils n’entrent en contact avec des collègues en faveur de la tenue d’élections. »

Organiser les salariés représente un véritable défi dans cet État du Sud, le plus pauvre du pays. Avec Toyota, Nissan y fait figure de gros employeur. Les travailleurs eux-mêmes se montrent méfiants. Même chez Volkswagen, implanté dans le Tennessee voisin, les troupes ont rejeté UAW en 2014. « Pour nous lancer dans une élection, nous cherchons toujours à dépasser les 35 % de soutien nécessaires, explique Richard Bensinger, de l’UAW. Car nous savons qu’au moment du scrutin, certains changent d’avis.

C’est ce qui s’est passé à Smyrna, dans l’usine Nissan du Tennessee, en 2001. Deux jours avant le vote, nous avions plus de 60 % de personnes favorables. Mais nous avons perdu l’élection après la diffusion sur les écrans de l’usine de vidéos où Carlos Ghosn expliquait que la présence de syndicats rendrait l’usine peu compétitive », raconte cet ancien directeur de l’AFL-CIO, la confédération syndicale américaine.

Depuis des années, UAW souhaite que Nissan s’engage à ne pas interférer dans la tenue d’élections. Malgré des délégations d’UAW envoyées à l’étranger, une plainte déposée auprès de l’OCDE, des courriers de la confédération mondiale IndustriAll à Carlos Ghosn, rien n’a changé.

Lois antisyndicales

En 2012, les syndicats CFDT, CFE-CGC, CGT et FO de Renault ont également réagi en envoyant une lettre demandant des comptes au P-DG du groupe Renault-Nissan. Mais c’est la direction nord-américaine qui leur a répondu, se targuant d’une communication « ouverte » avec ses salariés et de « rémunérations attractives ». UAW n’est pas près non plus d’obtenir le soutien des autorités politiques du Mississippi. En 2014, pas moins de trois lois bridant l’action syndicale y ont été promulguées. L’une d’entre elles prohibe toute forme d’« intimidation » qui consisterait à menacer l’employeur en portant atteinte à son business ou à influencer ses employés.

Auteur

  • C.A.