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Le Crédit agricole met ses salariés au vert

Dossier | publié le : 03.10.2015 | E. S.

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Le Crédit agricole met ses salariés au vert

Crédit photo E. S.

La banque rassemble une partie de ses salariés franciliens au sein d’un complexe futuriste, au sud de Paris. L’aménagement des espaces y a été conçu pour mieux travailler ensemble. Visite guidée.

Les poules d’eau côtoient les canards et les poissons. Sur les bancs et les pelouses, les costumes-cravates grignotent un sandwich ou épluchent un épais dossier, au milieu des bambous, des érables et des forsythias. En cette journée ensoleillée, le campus Evergreen du Crédit agricole ressemble à un immense parc plus qu’à une usine de cols blancs. Il ne manque plus que des barques pour donner un air de base nautique à ces huit hectares plantés à quelques tours de roue de la mairie de Montrouge (Hauts-de-Seine). Depuis 2010, la banque française a regroupé, aux portes de la capitale, six entités – dont le siège social – jadis éparpillées dans toute la région parisienne. Soit près de 3 500 personnes réparties sur 170 000 mètres carrés de bureaux.

Il a fallu dix ans pour mûrir le projet. Il s’inscrit dans une logique de rationalisation des lieux de travail, marquée par la constitution de cinq grands pôles immobiliers : Montrouge, donc, ainsi que Saint-Quentin-en-Yvelines, Villejuif-Arcueil, Paris-Montparnasse et Évry. La banque a aussi la volonté d’en faire une vitrine du bureau de demain. Objectif : innover en adaptant les locaux au travail collaboratif et au « mieux-vivre ensemble ».

Résultat, un campus qui prône l’horizontalité et le végétal – il y a quatre hectares de jardin –, l’ouverture et la convivialité. À l’image de puissance que des tours auraient véhiculée, le Crédit agricole a préféré des parallélépipèdes de cinq étages maximum, confortables et chaleureux. Ils ont pour nom Aqua, Lumen, Terra, Ignis… Chaque bâtiment rend hommage à la nature. « L’espace de travail peut être un accélérateur d’efficacité ou, au contraire, de sous-efficacité », observe Agnès Coulombe, directrice de l’immobilier d’exploitation, qui a mis en musique Evergreen.

Cette ancienne DRH a d’abord souhaité observer le travail de chacun et sonder les troupes. Histoire d’éviter les écueils ou de retomber dans les travers du bureau « à la papa ». Des groupes d’expression mêlant tous les âges ont planché sur les aménagements futurs. Près de 450 personnes y ont participé. « On a analysé les différents moments d’une journée, on les a traduits en concepts puis en charte d’aménagements, résume Agnès Coulombe. On a privilégié le sur-mesure à l’intérieur de chaque direction en tenant compte des réalités de chaque métier car nous sommes une banque très décentralisée. »

Bulles de décompression

Principale conclusion, la taille des bureaux varie, tout comme leur mode d’occupation. À Montparnasse, siège historique du groupe, le bureau individuel était la norme. « 90 % des gens travaillaient porte fermée et il fallait badger pour entrer. Les directions étaient réparties sur cinq ou six étages. Du coup, on s’envoyait des e-mails pour se parler », se souvient un cadre. Les équipes sont désormais au même endroit, au sein d’espaces partagés – on ne parle pas d’open space, trop repoussoir. Même les managers ont dû céder leur territoire ! « Ils sont visibles de tous, ce qui est source d’échanges et de communication », plaide Agnès Coulombe. Son service teste actuellement le principe du desk sharing : une grande table sans place attitrée. Le matin, chacun s’installe et se connecte où il veut ou peut. Y compris la chef, qui n’a plus de bureau. Seuls 10 % de salariés ont conservé un « chez eux » au travail, les plus sédentaires, chargés de la comptabilité ou de la saisie de dossiers.

Ce passage au tout-ouvert n’a pas toujours été bien vécu. « On nous a vendu ces espaces collaboratifs comme une nouvelle façon de travailler. Mais en réalité, il y a moins de discussions qu’avant car les gens restent à leur place, entre eux, pointe Éric Albert, délégué syndical central CFDT. En fin de journée, le bourdonnement et le ronronnement permanent sont fatigants. » Pourtant, la direction a fait en sorte de limiter au maximum le bruit, ennemi numéro un du salarié sans cloisons. Les sédentaires sont placés au fond du plateau pour ne pas être gênés par les allées et venues, tandis que les salles de réunion sont situées juste à l’entrée pour restreindre les décibels. Les moquettes, épaisses et colorées, sont ultra isolantes et des alcôves entourent les photocopieuses.

L’équité se lit également à travers le mobilier. Du directeur général adjoint à l’assistante, tout le monde possède le même équipement, chic et design. Les places libérées par l’abandon des bureaux individuels ont été redistribuées au profit du collectif. « Ils ont mis les moyens pour offrir des lieux de vie », juge Élisabeth Pelegrin-Genel, architecte, qui a travaillé sur le campus. C’est en cela qu’Evergreen est précurseur. Offrir des bulles de décompression aux travailleurs nomades pour se ressourcer mais aussi varier les lieux de concentration permet de mieux supporter la promiscuité. Car il ne s’agit pas d’être moins productif !

Véritables mini-appartements, des lounges bordent l’entrée des étages. Imaginés par les directions, on s’y sent presque comme à la maison pour prendre un café, jouer au baby-foot ou au billard, avoir une conversation informelle ou regarder la télévision, lové dans un canapé en cuir… Les services RH ont choisi de décorer leur espace avec des photos d’hommes et de femmes. Ceux des finances, eux, se sont tournés vers le golf. « Les quinze premiers jours, les collaborateurs n’osaient pas y aller ! » se souvient Agnès Coulombe.

Pour pouvoir travailler de n’importe où, tous les salariés ont été équipés d’ordinateur et de téléphone portables. Forcément, le wifi règne en maître. Jouxtant le Business Center, composé de 24 salles de réunions modulables et d’auditoriums, le Forum fonctionne comme une place de village. Point central, la cafétéria et la cantine, rouge et noire. Ici aussi, on peut se plugger en sirotant un coca. « On discute avec des gens qu’on ne connaissait pas, c’est moins codifié », reconnaît une jeune cadre, ravie. Partager des documents avec ses visiteurs. Imprimer à distance… Travail et détente se confondent. Près de 80 000 personnes viennent tous les ans honorer des rendez-vous sur le campus. Autant soigner l’image extérieure. Celle d’une banque plus ancrée dans son temps et qui sait parler aux jeunes générations.

Boutique high-tech

Pour compenser l’éloignement du centre-ville, des services ont vu le jour sur le site. Besoin de fleurs ou de vin pour un dîner, de capsules de café ou de nettoyer une chemise ? La conciergerie s’occupe de tout. Une agence du Crédit agricole Île-de-France gère également les opérations des salariés. Et si certains souhaitent tout de même se rendre en ville, des vélos électriques sont à disposition. L’avenir, c’est aussi des entreprises qui évoluent au sein d’un écosystème. Crédit agricole a ainsi signé des partenariats avec des commerçants de Montrouge. Dès 2016, la dernière partie du jardin actuellement en friche sera ouverte aux habitants.

Le coup de cœur du personnel va à la boutique high-tech. Problème de logiciels, d’ordinateur qui plante… Les trois geeks qui l’animent réparent, dépannent et forment même les plus fâchés avec l’informatique ! « 94 % des collaborateurs la plébiscitent », relève Agnès Coulombe. à Montrouge, les bâtiments continuent de sortir de terre. Toujours dans le même esprit. En 2016, ils seront 9 000 salariés à pouvoir mettre les pieds dans l’herbe…

Auteur

  • E. S.