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Édito

Martinez président !

Édito | publié le : 02.06.2015 | Stéphane Béchaux

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Martinez président !

Crédit photo Stéphane Béchaux

Bon, d’accord, ce n’est qu’un intérim. Mais quand même, ils font fort chez Volkswagen. Confier la présidence du conseil de surveillance à un syndicaliste, Berthold Huber, ex-leader d’IG Metall, ça en jette. On devrait s’en inspirer nous aussi. Chez Renault. En confiant les rênes du groupe à MM. Gentil ou Personne – si, si – qui siègent au conseil d’administration au nom des salariés. En fait, non, soyons plus ambitieux. Tant qu’à virer Carlos Ghosn, intronisons… Philippe Martinez. Un ancien de la maison qui, lui aussi, a dirigé une fédération de la métallurgie, celle de la CGT. Adieu salaire exorbitant, golden hello, stock-options, retraite chapeau, parachute doré ! On fera des économies. Ah, non ! Car le patron cégétiste voudra forcément imposer le salaire plancher à 1 700 euros et les 32 heures que sa centrale réclame…

Personne ne sait mesurer ce que pèse, dans la réussite industrielle allemande, la capacité des partenaires sociaux à travailler de concert. Mais quelque chose nous dit que ce dialogue social pragmatique, exigeant, qui cherche à concilier intérêts des salariés et des employeurs, n’est pas pour rien dans l’efficacité du modèle. Non, la négociation collective n’est pas l’ennemie de la compétitivité. À condition que, des deux côtés de la table, syndicalistes et dirigeants s’écoutent et se respectent. Qu’ils laissent au vestiaire leurs idéaux et leurs préjugés pour se frotter à la réalité économique de leur entreprise.

Les réactions que suscite le projet de loi Rebsamen sur le dialogue social montrent le chemin qu’il nous reste à parcourir. Non, la France n’est pas encore mûre pour faire vivre des relations sociales apaisées. En la matière, les débats autour des futures commissions paritaires régionales interprofessionnelles frisent le ridicule. Que les petits patrons jugent inopportune toute présence syndicale dans leurs murs se conçoit. Qu’ils crient à la révolution bolchevique à la simple idée qu’un de leurs employés puisse saisir une instance sans pouvoir ni moyens, beaucoup moins.

Pour sortir le pays de l’ornière, nous n’avons pourtant pas le choix. Il va bien falloir renoncer aux grandes négociations interprofessionnelles si peu productives. À quand remonte le dernier accord national digne de ce nom ? Aucune idée… Pas question pour autant de redonner la main au législateur. C’est au niveau des branches professionnelles et des entreprises que se joue l’avenir du dialogue social. À condition que les premières fusionnent, encore et encore, pour retrouver du sens et de l’allant. Et que les secondes parviennent à discuter des vrais sujets : l’organisation du travail, le développement des compétences, la mobilité, la structure des rémunérations. Et qu’on ne nous parle pas, pour la millième fois, du Code du travail suisse, tellement moins épais que le nôtre. Pour qui veut négocier, le droit français prévoit déjà des dérogations en pagaille. Manque la maturité. Et l’audace.

Auteur

  • Stéphane Béchaux