L’originalité de ce livre est d’envisager la crise mondiale de 2008 comme l’aboutissement d’un demi-siècle de développement capitaliste. Il fait des années 1970 une époque charnière avec la fin de la reconstruction de l’après-guerre, le commencement du démantèlement du système monétaire international et l’amorce d’une dérégulation. « Ce long revirement vers le néolibéralisme dans les sociétés occidentales riches rencontra une résistance remarquablement faible » note l’auteur, Wolfgang Streeck.

Pour ce sociologue, la crise de 2008 représente le paroxysme d’une triple crise, bancaire, des finances étatiques et de l’économie réelle. Il analyse l’UE comme « une machine à libéraliser » et estime nécessaire un démantèlement de l’union monétaire afin de sortir de la crise de légitimation des politiques d’austérité. Dommage que Streeck s’enferme dans une posture de critique radicale assez confortable, et très à la mode, tout en ne disant pas grand-chose sur cette « économie politique alternative » qu’il appelle de ses vœux. S’il y a beaucoup à retenir de son retour sur les cinquante dernières années, il n’en ressort hélas qu’une exhortation à « gagner du temps », pas très motivante.

Du temps acheté, Wolfgang Streeck. Éditions Gallimard. 400 pages, 29 euros.