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Idées

Les infortunes de notre modèle social

Idées | Livres | publié le : 07.03.2015 | Jean Mercier

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Les infortunes de notre modèle social

Crédit photo Jean Mercier

L’auteur fait un diagnostic rigoureux des « non-réformes » françaises et de leurs dégâts. Sans concession.

Professeur d’économie à la Sorbonne, Jean-Olivier Hairault porte un regard sévère sur les choix de politique sociale des gouvernements français depuis une vingtaine d’années. Pour la plupart, ceux-là ont été dictés par la volonté de préserver un « modèle social » que l’on a longtemps présenté aux Français comme étant « le meilleur du monde ». Le problème, c’est que ce modèle correspondait à un âge du développement économique qui est en train de s’effacer sous le double impact de la mondialisation et du numérique. « Pour la première fois, une révolution technologique se produit dans un environnement économique et social dominé par l’État providence, le Welfare State », souligne le professeur Hairault. Les évolutions économiques nous ont plongés pour de longues années dans un monde polarisé où la croissance prend deux chemins radicalement différents : « une nouvelle économie utilisatrice de très hautes qualifications et des services demandant au contraire peu de travail qualifié ».

Dans beaucoup de pays européens, les tentatives de maintenir tel quel le filet de protection de l’État providence ont eu pour effet de laisser filer le chômage. Petit à petit, dans la foulée de la social-démocratie scandinave, des gouvernements de gauche ont emprunté le chemin d’un nouvel arbitrage entre protection et emploi : Tony Blair au Royaume-Uni puis Gerhard Schröder en Allemagne. En refusant de mettre ses pas dans ceux de ces dirigeants sociaux-démocrates, Lionel Jospin a fait un choix historique, estime Jean-Olivier Hairault, dont on paie encore aujourd’hui les conséquences. Il reprend une par une les « non-réformes » sociales françaises pour montrer les dégâts qu’elles ont produits et continuent de produire… La réduction de la durée du travail, destructrice pour l’emploi des seniors et facteur de décroissance ; le refus des « petits boulots » avec un Smic qui écarte une large partie de la population des emplois sans contribuer à la réduction de la pauvreté ; la surprotection des salariés en place qui a pour contrepartie la précarité de tous les autres.

L’auteur appelle à un changement du paradigme social, constatant qu’ » il ne sert à rien de retenir les personnes de tomber lorsque les fondations de l’immeuble s’effondrent ». Sinon, avertit-il, nous risquons de rater le coche de l’économie de l’information et de la connaissance en train de naître à grande vitesse. Il demande – mais est-ce réaliste ? – un « big bang politique et social ». Le diagnostic n’est pas nouveau, mais il est établi avec rigueur et un minimum de polémique.

Ce modèle social que le monde ne nous envie plus, Jean-Olivier Hairault. Éditions Albin Michel. 168 pages, 16 euros.

Auteur

  • Jean Mercier