Les prévisions récentes indiquent que la croissance du PIB pourrait être de 1 % en 2015 en France après 0,4 % en 2014. Ce léger regain ne devrait toutefois pas suffire à faire baisser le chômage. La dynamique de court terme du chômage traduit deux forces : d’un côté, la population active, qui croît nettement chaque année (+ 130 000 en 2015) ; de l’autre, l’emploi. Comptablement, pour que le chômage baisse, il faut que suffisamment d’emplois soient créés afin d’absorber la hausse de population active. Or, avec 1 % de croissance, l’emploi ne progressera pas en 2015. L’atonie de l’activité depuis 2008 ne doit pas faire oublier qu’un tel rythme de croissance est médiocre. De 1975 à 2007, une croissance inférieure à 1 % n’avait ainsi été observée que trois fois.
Ce rythme de croissance est inférieur à celui de la productivité, c’est-à-dire le surcroît de richesse qu’il est possible de générer chaque année grâce au progrès des technologies ou des compétences, pour un niveau d’emploi donné. De 1997 à 2007, les gains de productivité étaient en moyenne de 1,2 % par an. Quand la croissance du PIB est au-dessous de ce seuil, l’emploi décroît. En outre, de façon plus conjoncturelle, l’emploi s’est plutôt sous-ajusté au choc négatif sur l’activité depuis 2008, contribuant à l’affaissement des marges des entreprises. Il est vraisemblable que cette « rétention » de main-d’œuvre sera en partie corrigée quand l’activité repartira.
Cette lecture « comptable » ne signifie pas que la productivité est l’ennemie de l’emploi. Celle-ci est un facteur d’augmentation de la richesse créée et donc redistribuable. Les politiques macro-économiques doivent ainsi chercher à stimuler à la fois la productivité et la croissance pour que le chômage baisse durablement.
En France, environ 800 000 jeunes arrivent chaque année sur le marché du travail alors que dans le même temps 650 000 seniors partent à la retraite. Il faut donc créer plus de 150 000 emplois pour faire baisser le chômage. Compte tenu de la croissance de la productivité du travail (0,9 % par an), une hausse annuelle de l’activité supérieure à 1,4 % est nécessaire pour y parvenir. Dans ces conditions, faire baisser le chômage avec 1 % de croissance requiert la mise en place de mesures d’accompagnement de la part du gouvernement. Trois pistes sont possibles. La première consiste à ralentir l’augmentation de la population active en retardant l’intégration des jeunes sur le marché du travail ou en en sortant plus précocement les seniors. La deuxième a pour but d’enrichir la croissance en emplois. Cette stratégie de baisse de la productivité du travail peut revêtir différentes formes. L’une d’entre elles réside dans la baisse du coût du travail au niveau du Smic afin de favoriser l’embauche de salariés peu qualifiés ayant une productivité plus faible. L’autre consiste à réduire la durée du travail de façon à augmenter la productivité horaire et à baisser celle par tête. La troisième piste vise à développer des emplois aidés, notamment dans le secteur non marchand.
Comment choisir entre ces options ? Soit on juge que la reprise sera progressive et dépassera 1,4 % dans les années à venir et on retient des solutions de court terme : chômage partiel, baisse de cotisations, traitement social du chômage. Soit on estime que la croissance sera durablement inférieure à 1 % et la baisse du chômage doit passer par une réduction durable du temps de travail. En jouant sur le temps partiel, la baisse de la durée légale sur l’année ou la carrière.
Redresser la croissance potentielle de la France, Notes n° 16 du CAE, septembre 2014
Croissance zone euro: on attache les ceintures, c’est reparti ?, Recherche économique Natixis, février 2015
