logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Décodages

Les salariés plébiscitent les dispositifs d’alerte

Décodages | publié le : 02.02.2015 | Stéphane Béchaux

Image

Les salariés plébiscitent les dispositifs d’alerte

Crédit photo Stéphane Béchaux

On pensait les Français rétifs à tout système permettant de dénoncer les comportements délictueux au travail. Faux, d’après les résultats du Baromètre du climat éthique.Retrouvez l’intégralité de l’étude sur www.wk-rh.fr

Importé des États-Unis dans la foulée du scandale Enron, le whistleblowing a fait couler beaucoup d’encre dans l’Hexagone depuis dix ans. Pris en 2002, le Sarbanes-Oxley Act impose aux entreprises cotées en Bourse à New York de mettre en place un dispositif de lancement d’alerte en cas de fraude. Une obligation étendue à toutes les filiales, même étrangères. Conséquence, un certain nombre de sociétés françaises ont dû suivre le mouvement, de Mc Donald’s à Kodak, de Lennox à Castorama. « Les salariés invités à cafter au nom de l’éthique », titrait alors Liaisons sociales magazine dans un article paru en mai 2005. Un sujet sensible, dont s’est mêlée la Commission nationale de l’informatique et des libertés à deux reprises. Et les tribunaux, Cour de cassation incluse.

Une décennie plus tard, le contexte a bien changé. Beaucoup de grandes entreprises se sont dotées de tels dispositifs. Et les multiples affaires pécuniaires qui touchent indifféremment entreprises, classe politique et partenaires sociaux ont achevé de convaincre les Français des vertus de la transparence. C’est en tout cas ce qui ressort clairement du Baromètre 2014 du climat éthique dont nous révélons en exclusivité les résultats. Réalisé par BVA pour le compte du Cercle d’éthique des affaires et du Groupe La Poste, le sondage montre d’abord la préoccupation des salariés français des entreprises privées ou publiques de plus de 500 personnes. Ils sont ainsi 65 % à considérer la crise économique comme un frein au développement de l’éthique et de la déontologie. Et 65 %, aussi, à se dire « au courant » des actions menées par leur employeur en la matière.

Les personnes interrogées se montrent bienveillantes à l’égard de leur entreprise. Elles sont ainsi 80 % à « apprécier » les actions mises en place en interne pour promouvoir les comportements éthiques et 88 % à leur faire confiance pour régler d’éventuels problèmes. Des pratiques qu’elles estiment d’ailleurs parfaitement intéressées. Parmi les préoccupations de leur employeur, elles citent en premier le respect des règles, des clients et des valeurs de l’entreprise. Et en dernier l’intégrité du management, la prévention des conflits d’intérêts et le respect des salariés. Une lucidité qui réjouit Patrick Widloecher, déontologue du Groupe La Poste et initiateur du baromètre. « L’éthique ne relève pas d’abord d’une problématique de droit mais de performance. En améliorant le climat éthique de votre entreprise, vous augmentez la confiance de vos clients. Ce qui a une incidence positive sur vos résultats économiques et financiers », plaide-t-il.

Outil d’expression

Mais au fait, à qui les salariés feraient-ils appel pour discuter d’une question éthique ? À leurs collègues, d’abord, puis à leur supérieur hiérarchique. Viennent ensuite le déontologue, leur responsable RH et… les syndicats. « La confiance se joue d’abord dans la sphère de proximité, c’est assez normal », observe Olivier Pauget, responsable de l’enquête chez BVA. Un résultat qui satisfait Patrick Widloecher. « Notre objectif, c’est que les salariés sollicitent en priorité leur manager direct. Pas le déontologue, qui ne doit intervenir qu’en dernier recours. » Le sondage ne précise pas sur quoi les interrogations des collaborateurs pourraient porter. Mais celles relatives aux cadeaux envoyés par les fournisseurs devraient figurer en bonne place dans les discussions. Une pratique très répandue qui fait débat. Ainsi, un quart des personnes interrogées considère que le fait d’accepter un cadeau pose problème, quelle que soit sa valeur. Et seul un tiers ne s’en formalise aucunement. Concrètement, 44 % des salariés disent avoir déjà été témoins de problèmes éthiques. Portant le plus souvent sur le non-respect des personnes (31 %) ou des règles (27 %), nettement moins relatifs à de la corruption ou de la fraude (17 %).

Que les employés et managers harceleurs ou indélicats ne comptent pas trop sur la mansuétude ou la complicité passive de leurs collègues en cas de comportements inappropriés ! Il ressort du baromètre que 54 % des entreprises disposent aujourd’hui d’un système d’alerte. Et que les salariés n’hésiteraient pas à y recourir. Ils sont ainsi… 90 % à se dire « prêts » à jouer les whistleblowers si besoin ! « Beaucoup pensaient que ces pratiques ne correspondaient pas à la culture française. Ils ont tort. Les dispositifs d’alerte sont à la fois un outil de management du risque et d’expression des salariés. Ceux qui souffrent de ce qu’ils voient ou subissent sont prêts à s’en servir », observe Yves Medina, président du Cercle éthique des affaires. Cet organisme, qui fait notamment office d’association professionnelle pour les responsables hexagonaux de l’éthique et de la conformité, s’apprête à lancer une enquête internationale, conjointement avec ses homologues anglais et espagnols, portant sur le whistleblowing dans les grands groupes industriels. Reste aux hommes de l’art, pour que les dispositifs d’alerte soient encore plus sollicités dans leur entreprise, à travailler sur leurs procédures et la communication. D’après le baromètre, seuls 26 % des salariés affirment ainsi faire « tout à fait confiance » à leur entreprise pour assurer leur anonymat et leur protection en cas d’alerte. Pas fameux…

90 % des salariés se disent prêts à lancer une alerte s’ils sont témoins d’un problème éthique. Parmi eux,

47 % le feraient « certainement » et

43 % « probablement ».

Source : Baromètre 2014 du climat éthique auprès des salariés de grandes entreprises.

Auteur

  • Stéphane Béchaux