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Idées

Extension du domaine de la précarité

Idées | Livres | publié le : 29.12.2014 | J. M.

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Extension du domaine de la précarité

Crédit photo J. M.

L’extension massive du précariat, phénomène qui frappe le monde du travail dans les sociétés industrialisées depuis les années 1970, est-elle irrésistible ? C’est en tout cas ce que pense l’auteur de cet ouvrage, Patrick Cingolani. Il ne s’agit pas seulement, selon lui, d’une évolution liée aux mutations de l’économie, mais également du résultat d’une aspiration à une autre façon de travailler. « D’ores et déjà en Europe ou aux États-Unis se dessinent les premières modalités d’action des travailleurs autonomes et précaires, observe-t-il : mutualisation des lieux de travail, solidarités et réseaux professionnels. »

Le livre débute donc par une mise au jour de l’ambivalence du concept de précarité. Pour le sociologue, le mot a toujours eu deux acceptions, « l’une associée à la stratégie d’assujettissement et d’exploitation du travailleur », la plus commune ; « l’autre associée à des pratiques et des tactiques de contournement des modes d’assujettissement et d’exploitation du travailleur ». C’est bien sûr ce second sens qui intéresse Patrick Cingolani, qui y voit le moyen de pratiquer une certaine « hybridation » entre travail et activité, travail et loisir. Et de se construire une identité sociale propre, par expérimentations successives, plus qu’en adoptant celle toute faite que les grands groupes imposent à leurs salariés. Ce qu’on appelle les « industries culturelles », où le précariat est quasiment la règle, lui apparaît un laboratoire des nouvelles figures du travailleur.

Ce spécialiste de la pauvreté et de la précarité appelle à sortir de la seule logique de l’emploi pour traiter le problème. Il estime également que les organisations syndicales doivent tenir compte de la grande hétérogénéité des salariés aux statuts divers qui cohabitent désormais dans le monde du travail. Le chercheur voit dans ces évolutions l’ébauche d’une émancipation, qu’il baptise « les révolutions précaires ». Une pensée difficile, qui pèche par abstraction, mais originale et stimulante.

Trop tard pour la France ? Osons remettre l’État à sa place, Cécile Philippe. Éditions Manitoba/Les Belles Lettres. 158 pages, 19 euros.

Révolutions précaires, Patrick Cingolani. Éditions La Découverte, collection « L’Horizon des possibles ». 148 pages, 13 euros.

Auteur

  • J. M.