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Idées

Une belle jeunesse sans jeunesse

Idées | Culture | publié le : 03.12.2014 | A. F.

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Une belle jeunesse sans jeunesse

Crédit photo A. F.

Dans son dernier film qui a tout du docu, Jaime Rosales dépeint une jeunesse espagnole « au point mort » et sans espoir.

C’est une promesse résonnant comme une boutade dans un quotidien essoré par la crise. Et une scène placée au début de la Belle Jeunesse, comme s’il fallait l’évacuer au plus vite. « Quand je serai riche, je t’achèterai une maison au bord de l’eau, avec piscine », susurre Carlos à Natalia, qu’il étreint, et qui rit de cette phrase de conte de fées. Incongrue quand on distribue, comme elle, des CV par poignées sans rien décrocher. Ou qu’on refuse, comme lui, de faire le manœuvre pour 10 euros par jour. Lorsqu’on en est réduit, comme eux, pour le fric, à tourner un porno amateur. Ce rêve d’une vie meilleure n’est d’ailleurs évoqué qu’une fois par le réalisateur espagnol, qui pourchasse tout misérabilisme.

Les scènes du quotidien qui s’enquillent (repas, toilette, soirée TV) se chargent de signifier l’absence de perspectives. L’impasse devient totale, quand Natalia tombe enceinte. Mais les amoureux s’adaptent… Et c’est ce pur instinct de survie d’une jeunesse « au point mort » que Jaime Rosales filme en plans serrés, dans le plus pur style documentaire, caméra portée et images granuleuses. Plusieurs fois, il brise son parti pris naturaliste en intercalant un patchwork de SMS, selfies et images de jeux vidéo échangés par le duo. Une façon de suggérer, à côté de ces vies engluées, les progrès d’une industrie numérique, seule source de mobilité et… d’emploi. Le final glaçant enfonce le clou et nous laisse sonnés. Âmes sensibles s’abstenir : la Belle Jeunesse suinte le malaise.

La Belle Jeunesse, film de Jaime Rosales (102 min). Sortie le 10 décembre.

Auteur

  • A. F.