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Édito

La CGT en plein dérangement

Édito | publié le : 03.12.2014 | Stéphane Béchaux

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La CGT en plein dérangement

Crédit photo Stéphane Béchaux

On ne saurait dire si la couleur de la moquette nécessitait d’engager des travaux dans l’appartement de Thierry Lepaon. Mais, à l’évidence, le secrétaire général de la CGT aurait mieux fait de renoncer au parquet flottant. Et d’opter pour une bonne vieille dalle de béton armé. Car aujourd’hui, tout flotte à la CGT ! La centrale n’a plus rien du brise-glace. C’est un vieux paquebot qui tangue, dérive, louvoie. Sans cap ni pilote. Terriblement secouée par les révélations sur le logement de son leader, la centrale se pose en victime. « Visiblement, elle dérange dans le paysage en portant haut et fort que d’autres solutions sont possibles », assure son bureau confédéral. « Cela démontre que la CGT gêne et que tous les prétextes sont bons pour essayer de l’affaiblir », écrit encore l’instance. Si seulement ! La réalité est, hélas, plus cruelle. Non, la CGT ne dérange ni ne gêne personne. En tout cas pas le Medef, plus virulent que jamais. Non, elle ne démontre en rien que d’autres solutions sont possibles…

Les partisans de la démocratie sociale guettent depuis des années les moindres signes d’évolution de la CGT sur le plan interprofessionnel. À raison d’une petite signature par-ci, d’un petit paraphe par-là, ils veulent croire, encore, que le paquebot infléchit sa route, à son rythme. On peut pourtant sérieusement en douter. Car la centrale se montre incapable de renouveler en profondeur son corpus idéologique. De repenser son modèle de société en tenant compte du monde tel qu’il est. Et non tel qu’elle rêve qu’il soit. En période de croissance, même molle, la défense des « acquis sociaux » pouvait, à la rigueur, tenir lieu de boussole. Mais à l’heure où la France s’embourbe dans une crise économique et sociale durable, une telle stratégie est sans issue. Les salariés l’ont d’ailleurs bien compris, eux qui boudent de plus en plus ouvertement ses appels à la mobilisation.

La dernière négociation Unedic est symptomatique de l’impasse dans laquelle la CGT s’est enfoncée. La confédération ne peut à la fois afficher, quasiment en préambule, son refus de toute signature et s’offusquer de voir les autres organisations s’entendre dans son dos. En la matière, saisir le juge pour contester la loyauté de la négociation ne peut lui être d’aucun secours. Quand bien même les tribunaux lui donneraient raison – le TGI de Paris vient, au contraire, de la débouter  –, la confédération n’y gagnerait rien. À elle de convaincre ses partenaires, patronaux et syndicaux, que ses revendications méritent d’être écoutées. Et entendues. À vouloir rester sur le bord du chemin, la CGT prend un double risque. Celui d’être dépassée par son ennemi intime, la CFDT, comme premier syndicat. Talonnée dans le privé, elle n’a d’autre choix que de creuser l’écart chez les fonctionnaires, appelés aux urnes ce 4 décembre. Second risque, celui de perdre son statut d’organisation refuge pour les protestataires. Une place que lui dispute le Front national.

Auteur

  • Stéphane Béchaux