Plus de 1,5 million d’emplois seront détruits par la révolution digitale d’ici à 2020, selon le cabinet Roland Berger (voir graphique). L’étude « Les classes moyennes face à la transformation digitale » (publiée le 27 octobre) transpose à la France celle de l’université britannique d’Oxford, The Future of Employment, qui a calculé la part des emplois « potentiellement automatisables » aux États-Unis. Même des secteurs considérés comme des viviers d’emplois, tel celui des aides-soignants, sont menacés : le robot TUG d’Aethon, qui sait se déplacer dans un « environnement non prévisible », est capable de distribuer des médicaments ou des repas dans un hôpital. Aux États-Unis, 140 structures en sont déjà équipées.

La vieille frontière qui séparait les métiers manuels des métiers intellectuels s’effondre. Les » cols blancs » ne sont plus épargnés, le critère d’automatisation qui prévaut désormais est celui du caractère répétitif de la tâche. Une bascule s’est opérée entre les secteurs se condaire et tertiaire en matière de gains de productivité. Entre 1990 et 2000, ceux-ci étaient deux fois plus importants dans l’industrie (4,1 % contre 1,9 %), mais « entre 2010 et 2012, le ratio tombe à 0,6 % pour l’industrie, tandis qu’il se maintient – malgré la crise – à 1,2 % pour les services ».

L’étude réactualise la grande question de la relation entre progrès technique et chômage, décrite par le célèbre économiste Joseph Schumpeter comme un mouvement continu de destruction et de création. Auparavant, les emplois supprimés dans l’industrie étaient compensés, peu ou prou, par ceux créés dans le tertiaire (voir la théorie du déversement, en Repère). La robotisation du tertiaire, elle, ne déboucherait pas sur de nouveaux emplois. Sauf, conclut l’étude Roland Berger, si une stratégie volontariste était engagée pour permettre une transformation rapide de l’appareil productif français. Laquelle implique notamment soutien à la R & D, renforcement de la construction européenne et développement de la formation initiale.