C’est un cadre qui le dit, avec ses mots retenus. Face à la caméra ce jour-là, il douche gentiment l’enthousiasme d’un candidat à l’embauche dans l’organisme public qui vit une nouvelle révolution après la fusion ANPE-Unedic : la fin du traitement indifférencié des chômeurs (un rendez-vous mensuel pour chacun quelles que soient ses difficultés) remplacé par une « offre de services flexibles ». « Pôle emploi, lâche-t-il, c’est comme l’océan, un mouvement perpétuel. On n’est jamais tranquille. » Le propos claque comme un doucereux euphémisme, alors que l’on vient de passer une heure avec 40 agents de Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis) au bord de la noyade.

Les images de Pôle emploi, ne quittez pas ! font mal. Le documentaire sans commentaire de Nora Philippe, qui s’inscrit dans la tradition du cinéma direct, montre une équipe dépassée par le flux croissant des chômeurs (4 000 ici) qu’elle est censée gérer, malgré des moyens humains et techniques réduits. Des salariés épuisés parla gestion permanente de l’urgence. Essorés par l’exigence ex trême de reporting. Excédés par les bugs informatiques qui effacent les rendez-vous du jour au lendemain. Comme le dit Nora Philippe : « Le désarroi et la détresse sont là des deux côtés », chez les chômeurs et chez les agents. Pôle emploi n’a pas apprécié, et a refusé que la réalisatrice montre son film aux salariés de Livry-Gargan avant sa première diffusion fin 2013.

Pôle emploi, ne quittez pas ! (78 minutes), documentaire de Nora Philippe.

Sortie le 19 novembre.