Grand connaisseur du monde touffu de la protection sociale à la française, François Charpentier s’est lancé dans une tâche titanesque : raconter l’histoire de nos régimes complémentaires de retraite, l’Arrco et l’Agirc. L’un et l’autre remontent à l’après-guerre et ont puissamment contribué à l’amélioration du sort des retraités. Accessoirement, l’Agirc fut à l’origine de l’invention du statut de cadre, la figure de proue dynamique de la société française des " Trente Glorieuses ".

Dans la foulée de la loi généralisant la Sécu, en 1946, se tient la première réunion de la commission nationale chargée de mettre au point le régime complémentaire des cadres. Il sera dessiné en dix-huit mois. D’entrée, il s’appuie sur trois piliers qui vont marquer le paysage : le principe de la répartition, la technique des points de retraite et la gestion paritaire. Le régime des non-cadres, l’Arrco, s’en inspirera mais au terme d’un accouchement beaucoup plus compliqué.

L’ouvrage retrace avec un luxe de précisions l’histoire jusqu’alors totalement méconnue de ces régimes complémentaires, qui constituent pourtant des éléments centraux dans la vie de millions de Français. Au point qu’on en a peut-être oublié qu’eux aussi pouvaient être mortels. Trois réformes sur dix ans ont ainsi paré au plus pressé sans apporter de réponse durable à la perte de substance structurelle du système. La fin du livre n’y va pas par quatre chemins : les caisses sont vides, souligne François Charpentier. Dans l’ignorance de la plupart des intéressés, le statut de cadre, étroitement dépendant de son régime de retraite, vit sans doute ses derniers moments. Du moins sous la forme qui lui a assuré un tel succès durant plus d’un demi-siècle.

Retraites complémentaires.

Histoire et place des régimes Arrco et Agirc dans le système français, François Charpentier. Éditions Economica. 592 pages, 35 euros.