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Décodages

Des salariés engagés envers et contre tout

Décodages | Implication | publié le : 04.11.2014 | Jean-Paul Coulange

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Crédit photo Jean-Paul Coulange

La crise serait-elle sans effet sur la relation des salariés, même français, au travail ? D’après l’étude internationale de l’Observatoire du travail, elle freinerait la mobilité. Sans entamer leur attachement au métier et à l’entreprise.Retrouvez l’intégralité de l’étude sur www.wk-rh.fr

Halte aux idées reçues ! Contrairement à l’image d’Épinal, les salariés français sont aussi engagés dans leur travail que la plupart de leurs voisins européens, et aussi fiers de leur métier et de leur entreprise. C’est ce qui ressort clairement de la vingt-troisième édition de l’Observatoire du travail réalisée par BVA pour BPI Group avec, désormais, Liaisons sociales magazine comme partenaire.

À partir de cet automne, le mensuel publiera donc, en exclusivité, deux fois par an, les résultats de cet indicateur de l’état d’esprit des salariés, créé par le regretté Bernard Brunhes, qui a longtemps tenu le « Bloc-notes » de ce magazine. Pour cette première, l’institut BVA a interrogé 5 000 salariés dans 12 pays européens et américains, dont 1 000 en France. Les personnes interviewées ont globalement évalué leur niveau d’engagement dans le travail en attribuant une note sur 10. Les moyennes par pays s’échelonnent entre 7,2 et 8,1 si l’on met de côté les atypiques Mexique (9,3) et Roumanie (8,7). Les Britanniques arrivent en queue de peloton, puisque 22 % d’entre eux ont donné une note entre 0 et 5. Avec 7,4, les Français ne décrochent pas, mais se situent au-dessous de la moyenne.

Autre enseignement, le contexte de crise n’influe guère sur l’engagement dans le travail. Au cours de la dernière année, le degré d’engagement affiché par les 5 000 salariés de l’échantillon n’a diminué que pour 13 % d’entre eux. Plus particulièrement aux Pays-Bas (17 %) et au Royaume-Uni (19 %). Nos compatriotes se situent dans la moyenne européenne. Nos voisins latins, eux, se distinguent : la moitié des Transalpins et 43 % des Espagnols se déclarent plus engagés dans leur travail que l’année précédente.

Un attachement réel mais aussi contraint. L’attachement des salariés à leur métier ne se dément pas. Globalement, 85 % des personnes interrogées sont fières d’exercer leur métier, avec une pointe à 95 % chez les Mexicains et un minimum à 70 % chez les Polonais. L’enquête met en revanche en évidence une décorrélation entre engagement au travail et fierté d’exercer son métier. Par exemple, les salariés polonais évaluent leur niveau d’engagement à 8,1 sur 10, mais 30 % ne se déclarent pas fiers de leur métier. Autre manifestation de ce « découplage » chez les salariés américains. Avec une moyenne de 7,9, ils ont le même niveau d’engagement que nombre de leurs homologues européens mais se disent beaucoup plus fiers (59 % de « tout à fait fiers ») qu’eux. Chez ces derniers, la part des « tout à fait fiers » se situe ainsi entre 22 % pour les Polonais et 48 % pour les Belges.

À la question désormais rituelle de la fierté de travailler dans son entreprise, les 5 000 personnes sondées par BVA ont répondu positivement pour 81 % d’entre elles, quand bien même les Polonais et les Russes restent à la traîne avec respectivement 31 % et 30 % de réponses négatives. Un score plutôt flatteur pour l’entreprise. Avec un sérieux bémol : cet attachement est souvent contraint. Si, dans leur ensemble, 74 % des salariés interrogés affirment éprouver un réel sentiment d’appartenance à leur entreprise, 60 % reconnaissent qu’ils n’ont « pas d’autre choix » que d’y rester. Et 60 % ne veulent pas la quitter parce qu’ils auraient « beaucoup à y perdre ». De quoi relativiser !

Changer d’entreprise n’est nulle part une priorité. Les réponses des salariés suisses et espagnols montrent bien à quel point la loyauté à l’égard de l’entreprise peut répondre à des motivations éloignées. Dans les deux pays les travailleurs déclarent un sentiment d’appartenance quasiment équivalent, avec 75 % et 76 % de réponses positives. Sauf que la plus ou moins forte prégnance du chômage – 3 % côté helvète, 24,5 % côté ibérique – oblige à faire le distinguo entre les deux situations. Les trois quarts des salariés interrogés par-delà les Pyrénées soulignent en effet qu’ils n’ont pas d’autre choix que de rester dans leur entreprise, conjoncture oblige. En même temps, 69 % d’entre eux ne trouveraient « pas correct » de la quitter si on leur offrait un poste ailleurs. Du côté suisse, seuls 42 % des salariés se disent bloqués dans leur entreprise. Et une même faible proportion jugerait incorrect de la quitter.

Dernier enseignement de cette enquête internationale, la majorité des 5 000 personnes interrogées par BVA souhaitent rester à leur poste actuel, avec une pointe à 69 % chez les Néerlandais. Changer d’entreprise ? Moins d’un salarié sur sept en fait une priorité. Quant à un changement de poste, il n’est prioritaire que pour 14 % des salariés (et pour 9 % des Néerlandais et des Belges). De même, créer son entreprise n’est une priorité que pour 10 % des salariés. Au-delà de cette apparente frilosité, le niveau d’engagement dans le travail épouse le désir de mobilité, interne ou externe. Voire la soif d’entrepre neuriat. Tant il est vrai qu’un projet de création d’entreprise témoigne d’un engagement fort dans la valeur travail !

74 % des salariés, tous pays confondus, éprouvent un vrai sentiment d’appartenance à leur entreprise.

60 % n’ont pas d’autre choix que de rester dans leur entreprise actuelle.

Enquête réalisée par Internet du 6 au 20 mai 2014 auprès d’un échantillon représentatif de 5 000 salariés de 12 pays.

Auteur

  • Jean-Paul Coulange