logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Édito

Un besoin urgent d’Europe sociale

Édito | publié le : 04.06.2014 | Jean-Paul Coulange

Image

Un besoin urgent d’Europe sociale

Crédit photo Jean-Paul Coulange

Près de six électeurs français sur dix ne sont pas allés voter pour désigner leurs représentants au Parlement européen. La faute à une campagne atone de la part des grandes formations politiques, au manque de notoriété de nombre de têtes de liste, à la méconnaissance du rôle des parlementaires siégeant à Strasbourg, à l’illisibilité des institutions européennes et au rejet qu’inspire à nos concitoyens la technocratie bruxelloise, à leur défiance montante vis-à-vis de l’euro… Mais, aussi, à une politique européenne combinant austérité budgétaire et encadrement sévère des dépenses publiques, qui privilégie les intérêts économiques sur les enjeux sociaux.

On le mesure avec le smic. L’instauration d’un salaire minimum dans chacun des États membres serait un puissant facteur de convergence permettant de lutter contre le dumping social. La chancelière Angela Merkel a fini par imposer, au forceps, un salaire minimum outre-Rhin, fixé à 8,50 euros brut l’heure, quand notre bon vieux smic dépasse les 9,50 euros. Mais un grand nombre de pays – le Danemark, la Finlande, la Norvège ou la Suède – n’ont toujours pas de salaire minimum, alors que la France s’en est dotée dès… 1950 et le Royaume-Uni en 1999. Autant dire que la mise en oeuvre d’un smic à l’échelon européen n’est pas pour demain.

Qu’il s’agisse de l’âge de départ à la retraite (67 ans en Allemagne et en Suède contre 62 ans en France), des droits des travailleurs, de l’assurance chômage (six mois d’indemnisation maximum au Royaume-Uni, trente-huit mois aux Pays-Bas), tous les salariés européens ne sont pas logés à la même enseigne. Certes, on imagine mal un statut social unique, à l’échelle de notre continent. Les organisations syndicales ne le revendiquent pas. Mais un effort d’harmonisation s’impose pour que les citoyens adhèrent davantage à l’idéal européen. Sauf à laisser le champ libre aux sirènes populistes qui ont attiré beaucoup trop d’électeurs le 25 mai.

Dans le domaine social, l’Europe piétine. Le dialogue y est quasi inexistant; l’élaboration de normes, beaucoup trop lente; le consensus, laborieux. Après des négociations acharnées, les 28 États membres se sont mis d’accord, en décembre, pour lutter contre les dérives du statut de travailleur détaché. Ils sont actuellement plus de 1,5 million d’Européens à travailler, en principe temporairement, dans un autre pays que le leur, aux conditions (salaire et temps de travail) du pays d’accueil mais avec un niveau de charges sociales qui est celui de leur pays d’origine. Les pays d’Europe centrale, d’où viennent la plupart de ces travailleurs, se sont alliés (excepté la Pologne) au Royaume-Uni pour tenter, sans succès, de faire capoter l’accord poussé par l’Allemagne et la France. Une victoire en demi-teinte, car les transports, l’agroalimentaire et l’agriculture sortent relativement épargnés de la directive adoptée par le Parlement européen mi-avril. Une des leçons de ces élections européennes est que, sur le social, il faut aller plus vite et plus fort.

Retrouvez la chronique de Sandrine Foulon « Ma vie au boulot » dans l’émission d’Alexandra Bensaid « On n’arrête pas l’éco », tous les samedis à 9 h 10, sur France Inter.

Auteur

  • Jean-Paul Coulange