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Est-il judicieux d’augmenter le RSA ?

Actu | L’éco du mois | publié le : 04.06.2014 | Sandrine Foulon

oui
Guillaume Allègre Économiste au département des études de l’OFCE.

Sans aucun doute si l’on pense qu’une société doit être évaluée par la façon dont elle traite ses membres les moins privilégiés. C’est une question morale avant d’être une question économique. Qui mérite une analyse : il n’existe aucun élément de preuve convaincant qui montrerait qu’augmenter le RSA socle serait contre-productif pour ses bénéficiaires ou excessivement coûteux pour les personnes qui doivent le financer.

Penser que donner plus de moyens à des individus puisse se faire à leur détriment est typique d’une position paternaliste, paradoxalement illibérale, selon laquelle la pauvreté est due aux pauvres eux-mêmes, qui s’enfermeraient dans la précarité du fait d’une suite de décisions à courte vue. C’est ce que postule l’idée de « trappes à pauvreté ». Mais à 11 % de chômage, six ans après le début d’une crise d’origine financière, il est difficile d’arguer qu’une part significative du chômage soit volontaire. De plus, les expérimentations sur les incitations financières à l’emploi montrent bien que les emplois éventuellement créés par ces incitations sont des emplois de faible qualité, qui n’améliorent pas les perspectives futures de ceux qui les occupent. Quelques années après les expérimentations, le taux d’emploi des groupes ayant bénéficié de compléments de revenus d’activité n’est jamais plus élevé, et est même parfois plus faible que celui de ceux qui n’y ont pas eu droit. Au contraire de la théorie du marchepied, ceci montre que ne pas accepter ces emplois de faible qualité est tout à fait rationnel et peut même être bénéfique, à moyen terme, à la fois pour les individus qui les refusent et pour le reste de la société. Même le FMI ne pense plus que paupériser les actifs est un bon moyen de produire de la croissance.

non
Jean-Marc Daniel Économiste professeur associé à l’ESCP Europe

Alors que l’on s’apprête à fêter les 5 ans du RSA, la question de son niveau revient dans le débat public. Question qui s’exprime en général simplement : peut-on vivre avec un peu moins de 500 euros par mois ? La réponse spontanée étant non, le débat se clôt. Sauf que sur le plan économique la question se pose autrement. On aborde souvent cet aspect en se demandant si le RSA réduit les inégalités et favorise l’emploi. Ceux qui militent pour sa revalorisation affirment dans la foulée que sa hausse réduit clairement les inégalités et, augmentant la consommation, contribue à fournir des débouchés aux entreprises et donc des possibilités d’emploi. Sauf que, là encore, la question ne se pose pas en ces termes.

L’enjeu économique réel est celui de la pauvreté et de la croissance. Or les deux sont liés : c’est la croissance qui réduit la pauvreté. Compte tenu de notre déficit extérieur, la croissance ne se construira pas par une augmentation de la demande globale fondée sur la distribution de revenus. Elle repartira de deux éléments : d’une part, la capacité des entreprises à investir, c’est-à-dire à dégager des profits (c’est la logique du pacte de responsabilité) ; d’autre part, la mobilisation du travail. Celle-ci peut se faire au travers de l’occupation des quel­que 400 000 à 600 000 offres d’emploi qui ne trouvent pas preneurs et au travers de la redécou­verte du fait que le « I » de RMI, l’ancêtre du RSA, signifiait insertion. Aujourd’hui, sur les 36 milliards d’euros de la formation professionnelle, 12 % sont consacrés aux chômeurs. C’est 12 milliards qu’il faudrait leur consacrer. Le RSA est trop faible si on considère qu’il est le revenu permanent et durable de ceux qui le perçoivent. Mais le véritable enjeu est d’assurer leur insertion dans le monde du travail.

POUR EN SAVOIR PLUS

Ambitions et évaluation du revenu de solidarité active. Florence Thibault

http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ES467B.pdf

Rapport de Christophe Sirugue sur la réforme du RSA

http://www.cnle.gouv.fr/Le-groupe-de-travail-sur-la.html

Auteur

  • Sandrine Foulon