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Idées

1er mai : “faites des emplois !”

Idées | Bloc-notes | publié le : 05.05.2014 | Catherine Barbaroux

Les outsiders, oubliés de la négo collective

Par un heureux détournement sémantique, le Pacte civique, collectif qui regroupe plus de 100 associations et des citoyens qui veulent « penser et agir autrement », propose que la fête du Travail soit aussi une mobilisation autour du « faites des emplois ! ». Il rejoint ainsi tous ceux et celles qui, à l’initiative de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (Fnars), présidée par Louis Gallois, viennent d’adresser au président de la République le « Manifeste pour un pacte de solidarité sociale et citoyenne ». Il n’est pas indifférent que l’auteur d’un rapport de référence sur la compétitivité soit aussi un militant actif de la lutte contre le chômage de longue durée et la pauvreté, qui sont les oubliés du recentrage économique actuel.

Le débat entre les « insiders » et les « out siders » demeure toujours aussi mal traité dans les enjeux de la négociation collective. La France n’en finit pas de payer cette séparation entre un paritarisme (notamment pour le régime d’assurance chômage) qui couvre correctement les salariés et un régime de solidarité assumé par le budget de l’État (avec le relais des associations) pour les millions de personnes qui restent aux marges de la société. Tant qu’une approche globale de ces réalités ne sera pas naturelle pour les entreprises (et les fonctionnaires !), on vivra cette situation insupportable qui fait peser sur les plus pauvres les effets de la crise.

More or best jobs ?

Depuis le début des années 2000, la controverse est vive en Europe entre les tenants de la qualité des emplois et ceux qui expliquent, comme l’ancien directeur de l’OMC Pascal Lamy, qu’« un petit boulot, c’est mieux que pas de boulot ». Faute de pouvoir dévaluer l’euro, ou d’alléger davantage les charges sur les bas salaires, on envisage de dévaluer le smic ! Voire de l’adapter à l’âge ou aux disparités locales, comme le proposent d’autres économistes. C’est faire peu de cas des évolutions récentes : l’augmentation des CDD et des temps partiels fait qu’ils deviennent quasiment la norme d’entrée sur le marché du travail ; deux accords interprofessionnels ont assoupli les contraintes en sécurisant les parcours et en réorientant la formation professionnelle. On a peine à croire que les employeurs aient vraiment besoin de nouvelles marges de flexibilité pour calibrer au mieux le coût du travail non qualifié, même dans les très petites entreprises qui par ailleurs n’utilisent pas tous les dis positifs (alternance, groupements d’employeurs, préparation opérationnelle à l’emploi…) mis à leur service.

L’incitation morale

On peut admettre le souhait de refuser tous les tabous pour lutter contre le chômage de masse, d’autant que le retour à l’emploi ou à l’activité a toujours des vertus supérieures au niveau du salaire perçu. Ainsi l’observe-t-on chez les chômeurs créateurs d’entreprise qui se rémunèrent peu au démarrage mais qui affirment tous l’importance de se projeter à nouveau dans l’avenir.

Doit-on pour autant exonérer les entreprises de leur rôle dans la formation et l’insertion des salariés peu ou mal qualifiés ? La baisse soudaine de l’emploi dans les services, au profit du travail clandestin, démontre que les incitations fiscales ont aussi une forte influence sur le marché du travail. Pourquoi les incitations morales qui feraient de la solidarité et de la lutte contre les inégalités une responsabilité partagée ne seraient-elles pas mises en avant ? Disons-le aussi, haut et fort.

Auteur

  • Catherine Barbaroux