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Nice, côté social

La capitale de la Riviera voit grand

Nice, côté social | Métropoles | publié le : 03.02.2014 | Nicolas Lagrange

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La Métropole Nice Côte d’Azur

Crédit photo Nicolas Lagrange

Forte de son rayonnement international, Nice veut attirer davantage de grandes entreprises. Mais se heurte à de lourds problèmes de logement et de transport.

Gare aux clichés ! Certes, avec sa promenade des Anglais, son aéroport (le deuxième de France) près du centre-ville et ses 300 jours de soleil par an, la cinquième ville de France profite pleinement de la manne touristique, attirant chaque année près de 4,5 millions de visiteurs. Dans un département prisé pour ses 15 stations de sports d’hiver. Fort logiquement, l’économie des Alpes-Maritimes est très tournée vers les services – le tertiaire y représente 85 % des emplois. Mais Nice ne se classe qu’au cinquantième rang des grandes villes françaises pour le PIB par habitant, et le taux de pauvreté y est supérieur à la moyenne nationale.

Bien sûr, la technopole de Sophia Antipolis et la zone industrielle de Carros offrent des emplois très qualifiés et bien rémunérés. Mais les emplois précaires sont nombreux, dans l’hôtellerie-restauration, le commerce et le bâtiment, avec le recours croissant et souvent illégal à une main-d’œuvre étrangère. Les TPE représentent 28 % des entreprises dans les Alpes-Maritimes, contre 20 % dans toute la France. Résultat, « pas ou peu de représentants du personnel et peu de contentieux collectifs, souligne Emmanuel Pardo, avocat en droit social. La précarité des salariés limite le nombre de saisines prud’homales, qui concernent surtout des licenciements individuels ». « On trouve une forte conflictualité dans certains secteurs, comme la prise en charge des personnes âgées, mais ce sont notamment les particuliers employeurs et les TPE qui nourrissent le contentieux des licenciements individuels », abonde son confrère Didier Lods. De fait, les mouvements sociaux font moins recette à Nice qu’à Marseille.

Immobilier coûteux. Le taux de chômage (10,6 %) dépasse désormais la moyenne nationale.Une dégradation qui touche particulièrement le BTP et l’immobilier, et qui s’ajoute au mal endémique du territoire : le logement. Le prix moyen au mètre carré avoisine 4 000 euros, soit nettement plus qu’à Marseille, Lyon ou encore Toulouse ; le nombre de logements neufs est faible et la capitale azuréenne compte moins de 12 % de logements sociaux (la loi SRU impose 25 %). « En cinq ans, la proportion de logements sociaux a très peu augmenté, alimentant les tensions sur les prix, à l’achat comme à la location, déplore Patrick Allemand, leader de l’opposition socialiste. Et les impôts locaux (taxes d’habitation et foncière) sont parmi les plus chers de France. » Le maire, Christian Estrosi, affirme pour sa part privilégier la mixité sociale dans tous les grands projets de la ville.Reste que ce problème du logement renchérit le coût de la vie, ce qui pèse sur le secteur privé (même si les grandes entreprises s’organisent en conséquence) comme sur la fonction publique. « De nombreux fonctionnaires refusent des mutations ou repartent rapidement, assure Franck Hausner, secrétaire départemental FO. L’indemnité de résidence n’est que de 1 % dans les Alpes-Maritimes, contre 3 % dans le Var et les Bouches-du-Rhône, où les logements sont pourtant plus abordables. »

Deuxième obstacle à l’attractivité : les transports. Faute de ligne TGV, Nice est à 5 h 45 de Paris et à 2 h 30 de Marseille. Les 35 000 salariés de Sophia Antipolis subissent des embouteillages quotidiens aux abords de la technopole. « Il faudrait développer les pistes cyclables, les bus, les liaisons avec le train, avec davantage de maillage, comme Grenoble a su le faire pour sa technopole », analyse Georges Dao, patron emblématique du territoire (lire page 62). À Nice même, malgré des améliorations dans les transports en commun, d’importantes difficultés subsistent. Une deuxième ligne de tramway reliant le port à l’aéroport à l’horizon 2017 devrait soulager la promenade des Anglais. « Une partie de la ligne sera souterraine, ce qui va doubler son coût, critique Gérard Ré, leader de la CGT dans le département (premier syndicat). Par ailleurs, le nouveau trajet est focalisé sur le littoral, laissant de côté les quartiers populaires. »

Chantiers ambitieux. Pour développer l’attractivité de Nissa la Bella, Christian Estrosi a initié d’importants projets, comme la Coulée verte (plus de 1 kilomètre en centre-ville), inaugurée récemment. Depuis 2012, le député-maire préside la Métropole Nice Côte d’Azur, qui constitue le premier employeur du département avec plus de 11 000 agents. Un employeur public qui a refusé d’utiliser le levier des emplois d’avenir.

Regroupement de 46 communes, la Métropole est taillée pour les chantiers ambitieux. Le plus emblématique, l’Éco-Vallée de la plaine du Var, vise la création de pépinières et l’implantation de grandes entreprises autour de la croissance verte. « Le projet est prometteur en termes d’emplois, mais attention à ne pas se retrouver avec de grandes zones aménagées et peu d’entreprises au final, avertit le cégétiste Gérard Ré. Il faudrait aussi investir dans les transports en commun et les services publics de proximité, tout en prenant garde à ne pas fragiliser le centre-ville. » La création ou l’agrandissement de grands centres commerciaux, dans la plaine du Var, à Saint-Laurent-du-Var ou Cagnes-sur-Mer, inquiètent les petites boutiques.

La capitale de la Riviera doit bouger – le point fait consensus – pour muscler son petit pôle universitaire de Nice Sophia Antipolis (25 000 étudiants) et doper son attractivité. La question est plutôt de savoir comment et à quel rythme.« La dette de la Métropole s’est considérablement alourdie, ce qui impose de la maîtriser, insiste le socialiste Patrick Allemand. Il faut aussi stabiliser le niveau d’imposition. » Un sujet sur lequel Christian Estrosi est très chatouilleux : le maire a fait voter une délibération l’autorisant à ester en justice contre tous ceux qui propageraient de fausses informations sur la dette et les finances de la ville.

Les 6 premiers employeurs privés des Alpes-Maritimes

Amadeus

3 200 salariés (Sophia Antipolis)

Thales Alenia Space

2 000 salariés (Sophia Antipolis)

GSF

1 500 salariés (Sophia, Nice, Vallauris et Le Cannet)

Mane

1 200 salariés (Le Bar-sur-Loup)

Arkopharma

1 000 salariés (Carros)

Virbac

1 000 salariés (Carros)

Auteur

  • Nicolas Lagrange