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Édito

Bonnets rouges et blancs bonnets

Édito | publié le : 02.12.2013 | Jean-Paul Coulange

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Bonnets rouges et blancs bonnets

Crédit photo Jean-Paul Coulange

Jacquerie, chouannerie ou chienlit ? Les termes foisonnent et les comparatifs divergent pour tenter de décrypter la montée de la contestation sociale dans notre pays. Ambiance pré-soixante-huitarde pour les uns, relent des années 1930 pour les autres. Nous n’en sommes pas là, mais la somme des mécontentements qui s’expriment dans la rue a de quoi inquiéter nos gouvernants. Car, à tout le moins, se profile un scénario digne de l’année 1983, qui avait amené la majorité socialiste à une véritable déroute aux élections municipales, la conduisant à changer de politique économique, avec le fameux tournant de la rigueur.

La disgrâce de l’exécutif, qui se lit dans la chute des cotes de popularité du président de la République et de son Premier ministre, a de multiples origines. Alors que son prédécesseur s’était présenté comme le président du pouvoir d’achat, François Hollande incarne, à tort et à raison, le champion de la feuille d’impôt et l’ennemi de la feuille de paie. Avec des finances publiques exsangues, le chef de l’État n’a d’autre choix que de geler durablement le point d’indice des fonctionnaires. Soucieux de la dégradation du taux de marge des entreprises françaises et de la compétitivité de notre pays, il s’abstient aussi de donner un coup de pouce au smic, mécontentant au passage plusieurs millions de salariés.

Moins visible, la refiscalisation des heures supplémentaires a amputé des salaires souvent modestes de quelques dizaines d’euros par mois. Quel que soit le fondement économique d’une telle mesure – la défiscalisation coûtant plusieurs milliards d’euros par an à l’État avec un effet contre-productif sur l’emploi –, il n’en reste pas moins qu’une partie du salariat est touchée au portefeuille. On pourrait citer d’autres signaux négatifs, tel le décalage de six mois (du 1er avril au 1er octobre) de la revalorisation des pensions prévue dans la réforme des retraites en cours d’adoption au Parlement. Si l’on ajoute la cohorte de mesures fiscales (élargissement du nombre de foyers imposables en 2013, augmentation de la TVA au 1er janvier 2014…), la coupe est pleine pour de très nombreux Français.

Faute d’embellie sur le marché du travail et vu la multiplication des plans sociaux, la dégradation du climat social pourrait ne pas en rester là. Plusieurs facteurs décideront de la suite des événements. D’abord, l’intervention de l’État providence. Pour soutenir les entreprises en difficulté, le gouvernement vient de débloquer 300 millions d’euros, malgré l’impasse budgétaire actuelle. Autre paramètre, l’attitude des organisations syndicales et patronales, pour l’instant dépassées par les collectifs à bonnet de couleur. De leur capacité ou non à revenir dans le jeu et à porter des revendications dépendra l’ampleur de la contestation. La dernière inconnue concerne le comportement de la jeunesse. Son éventuel ralliement à un mouvement mené par des corporations d’actifs ajouterait au cauchemar que vit actuellement la majorité.

Retrouvez la chronique de Sandrine Foulon « Ma vie au boulot » dans l’émission d’Alexandra Bensaid « On n’arrête pas l’éco », tous les samedis à 9 h 10, sur France Inter.

Auteur

  • Jean-Paul Coulange