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Idées

Retraites : il faut plus qu’un replâtrage

Idées | Bloc-notes | publié le : 01.09.2013 | Rose-Marie Van Lerberghe

L’âge d’or de la retraite ?

La question du financement des retraites revient régulièrement sur le tapis. Mais il est dommage de laisser de côté les autres débats qu’elle soulève. Lors de la mise en place de la Sécurité sociale, l’espérance de vie moyenne des hommes était de soixante ans, celle des femmes de soixante-cinq ans. Aujourd’hui, elle est respectivement de quatre-vingts et quatre-vingt-cinq ans. Cette évolution ne donne pas seulement la mesure de l’équation démographique du financement de notre système, elle a entraîné aussi une modification radicale de la notion même de retraite. Celle-ci tend à apparaître comme la période peut-être la plus heureuse de la vie où, débarrassé des contraintes du travail, on peut enfin choisir ses activités, s’occuper de sa famille, de soi-même, voyager ou encore se réaliser dans le bénévolat. Nous sommes passés de la protection contre la pauvreté par incapacité physique de continuer à travailler à une espèce de récompense, de compensation méritée d’une vie de travail et d’efforts.

Les inégalités de notre système

Ce changement de perspective rend extrêmement sensibles les questions d’inégalités. Celles-ci sont multiples. Il y a en premier lieu l’inégalité d’espérance de vie justement. Dès la fin des années 1980, les travaux du Plan faisaient apparaître que les ouvriers ayant commencé à travailler très jeunes et dont l’espérance de vie était plus courte finançaient en quelque sorte la retraite des cadres qui avaient cotisé moins longtemps et vivaient plus vieux.

Inégalité selon les statuts, ensuite. La réforme de 1993 des régimes spéciaux est loin d’avoir fait disparaître leur avantage comparatif. De même, la comparaison entre le régime général et celui de la fonction publique continue d’irriter. La différence entre les salaires de référence retenus (moyenne des vingt-cinq meilleures années contre le salaire des six derniers mois) focalise l’attention. L’avantage pour les fonctionnaires ne vient pas seulement du fait que les carrières sont généralement ascendantes, mais aussi du mode d’indexation des salaires de référence dans le régime général et les régimes complémentaires, bien moins favorable que l’indexation appliquée de fait dans le public puisque le dernier traitement bénéficie par construction de l’augmentation du point d’indice. L’objection faite par les partisans du maintien du système, à savoir que les primes ne sont pas prises en compte, fait apparaître une autre inégalité dont on ne parle guère au sein même de la fonction publique, puisque tous les fonctionnaires ne perçoivent pas de primes ou fort peu, comme les enseignants, contrairement aux infirmières.

Pour une approche bipartisane

Les réformes successives ont tenté par petites touches de corriger certaines inégalités. Elles ont surtout eu pour objet de résoudre les problèmes de financement. Le résultat est un système extrêmement complexe, opaque et très inéquitable. Régulièrement des voix s’élèvent pour réclamer une remise à plat avec, par exemple, un système par points. Ce n’est pas du tout à l’ordre du jour et semble hors de portée. En Suède, les partis politiques ont négocié ­pendant dix ans pour mettre en place un système qui incorpore un mécanisme d’équilibrage automatique indexant les retraites sur les rentrées de cotisations.

Ce sujet des retraites, dont l’horizon dépasse nécessairement un mandat présidentiel ou législatif, mériterait une approche non partisane. On observera à cet égard avec intérêt l’attitude de l’opposition vis-à-vis des aménagements qui seront proposés par ceux-là même qui s’étaient opposés aux réformes quand ils étaient dans l’opposition.

Auteur

  • Rose-Marie Van Lerberghe