Un Aubryste pur jus qui défend l’un des textes les plus importants de François Hollande, voilà qui a quelque chose de savoureux… Certes, Jean-Marc Ger main, député des Hauts-de-Seine depuis 2012, n’en est pas à son coup d’essai. Il a déjà porté, l’an dernier, le projet de loi sur les emplois d’avenir. Mais pour le père des ex-emplois jeunes de Martine Aubry, c’était une promenade de santé. Là, il va lui falloir convaincre l’Assemblée, et surtout l’aile gauche de la majorité, de respecter l’équilibre trouvé par les par tenaires sociaux pour sécuriser l’emploi. Or, plus que tout autre, l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 signé par la CFDT, la CFE-CGC et la CFTC cristallise des opinions divergentes. Vu la complexité du texte, les débats risquent de tourner à la querelle d’experts, surtout que l’opposition – du moins en commission – s’avouait prête à le voter en l’état. Mais ça tombe bien, Jean-Marc Germain est un orfèvre en la matière.

Le titre de rapporteur du projet de loi sur la sécurisation de l’emploi a pourtant failli échapper au secrétaire national du PS à l’emploi et au travail. Début janvier, Bruno Le Roux, chef de file des élus socialistes à l’Assemblée, voulait s’y coller pour tuer dans l’œuf les velléités d’amendement de ses troupes. Mais la manœuvre aurait pu être perçue comme une tentative de muselage. Retour, donc, à l’option Germain. Dès son arrivée en commission des Affaires sociales, cet économiste diplômé de l’École des hautes études en sciences sociales s’est jeté sur les questions d’emploi. Après le départ d’Alain Vidalies et de Marisol Touraine du gouvernement, les rangs socialistes se retrouvent alors dépourvus de pointures en droit du travail. Christian Eckert, député SRC de Meurthe-et-Moselle, lui suggérait plutôt d’aller à la commission des Finances. Plus prestigieuse. « Quand on fait de la politique, c’est pour s’occuper des problèmes du pays. Et notre problème majeur, c’est le chômage », tranche Jean-Marc Germain. À Lille, aux côtés de Martine Aubry, ce polytechnicien s’est frotté aux politiques de rénovation urbaine. Dans le sillage de sa patronne, le directeur de cabinet démontre sa capacité de travail. Avant, pendant ou après les négociations sur l’ANI, il a mené plus de trois cents heures d’audition pour mesurer ses conséquences sur le terrain. « C’est un gros bosseur, constate Catherine Lemorton, la présidente de la commission des Affaires sociales. Il a fait un travail gigantesque. » L’opposition ne dit pas le contraire. « Il a su s’imposer par son expérience et son sens de l’analyse », estime Arnaud Robinet, député UMP de la Marne. Mais l’homme a parfois des idées bien arrêtées. « C’est un dogmatique, il agit encore comme un directeur de cabinet qui se contente d’appliquer sans débattre alors qu’un parlementaire doit écouter », épingle un député UMP. Le CDI de projet voulu par le Medef ? Trop permissif. Le coût du travail ? Un faux débat.

Ce fils de centriste ne goûte pas trop les thèses patronales, ni celles de la CFDT. Au Medef qui estime que les licenciements d’aujourd’hui font les CDI de demain, il préfère brandir son concept de « sécuri-sécurité à la française », incarné par l’homologation des plans sociaux par les Direccte ou l’accord des partenaires sociaux. Soucieux de ne pas transformer le Parlement en chambre d’enregistrement du dialogue social, l’époux d’Anne Hidalgo pourrait donner quelques gages à la gauche du PS en lâchant du lest par exemple sur les délais de prescription des recours en justice. Habitué à œuvrer dans l’ombre, cet homme discret découvre peu à peu la lumière, notamment médiatique. Si le texte passe sans trop de casse, il pourrait bien devenir plus qu’un simple député.

JEAN-MARC GERMAIN

46 ans.

Rapporteur du projet de loi sur la sécurisation de l’emploi.

1997

Conseiller de Martine Aubry (ministre de l’Emploi).

2008

Directeur de cabinet d’Aubry au PS.

2012

Élu député des Hauts-de-Seine.