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Des “indignés” au prétoire

Actu | EUX | publié le : 03.10.2012 | Emmanuelle Souffi

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Des “indignés” au prétoire

Crédit photo Emmanuelle Souffi

Avec leur air de ne pas y toucher, ces deux-là ont défrayé la chronique judiciaire. Florent Hennequin a fait trembler Pôle emploi, le 11 septembre. Quant à Stéphane Ducrocq, il a gagné par KO face à la Caisse d’épar gne, une semaine plus tôt. Les deux avocats aiment s’engouffrer dans les méandres du Code du travail pour faire respecter les droits des salariés. « Il faut bien être dans un camp, et je suis plus à ma place de ce côté-ci. Ça n’est pas une croisade antipatrons, prévient Stéphane Ducrocq, 40 ans. Seulement, le droit assure l’équilibre entre les parties et quand on fait sauter certains verrous, la justice sert à le rétablir. »

Le dernier combat de ce Ch’ti ? Avoir mis fin aux pratiques de benchmark de la Caisse d’épargne Rhône-Alpes Sud (Cera) qui aboutissaient à une mise en concurrence perpétuelle des salariés et des agences, le seul objectif étant de « faire mieux que les autres ». Nul ne savait à la fin de la journée s’il avait rempli sa mission, puisque la qualité de son travail dépendait des résultats des autres. Stressant, ont pointé une dizaine de rapports d’alerte des médecins et de l’Inspection du travail. Mais efficace. Agence la plus rentable de France, la Cera pèse un tiers du chiffre d’affaires du groupe ! Reste que 11 tentatives de suicide ont été recensées l’an passé au sein de la banque, selon l’avocat.

Pour le TGI de Lyon, un tel système « compromet gravement la santé des salariés » et constitue « un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat ». Ça n’est pas la première fois que Stéphane Ducrocq s’en prend à la Caisse d’épargne. Son bureau de Roubaix est tapissé de dossiers – près de 2 000 – de salariés s’estimant injustement privés de leur treizième mois. Près de 6 000 recours auraient été déposés devant les prud’hommes. Sa prochaine bataille ? Faire reconnaître Mulliez comme un groupe. Pour cela, il a assigné en justice les 35 sociétés holdings du géant de la grande distribution. Des procès-fleuves comme les aime ce juriste qui gère 1 500 plaintes d’employés d’Auchan à propos de temps de pause intégrés au temps de travail effectif.

Un casse-tête juridique que ne renierait pas Florent Hennequin. Son dada, c’est le régime des intermittents, les contrats de grille et d’usage… Bref, « les abus de précarité ». « C’est là où je cherche à créer de la jurisprudence », reconnaît ce fan du professeur de droit Alain Supiot et de l’avocat Tiennot Grumbach. Sans le vouloir, cet ancien régisseur, qui rêvait d’entrer à la Femis, a attiré les caméras sur lui après sa victoire contre Pôle emploi.

Son coup d’éclat ? Traîner l’institution devant le tribunal administratif de Paris en référé, en raison de la situation d’urgence de son client. Un ancien gestionnaire de clientèle de Veolia âgé de 54 ans, qui n’a été reçu que trois fois dans son agence d’Issy-les-Moulineaux depuis son inscription en février 2009, et auquel aucune offre n’a été transmise. En fin de droits, menacé par les huissiers, il dépose un recours avec le soutien de la CGT Chômeurs. Les juges ordonnent à Pôle emploi de le recevoir sous huitaine et de mettre à jour son projet personnalisé d’accès à l’emploi.

« Ces manquements portent atteinte à une liberté fondamentale, celle du droit d’accès à l’emploi. On ne reproche pas à l’organisme de ne pas lui avoir trouvé du travail, mais de l’avoir laissé livré à lui-même », résume ce Blésois. Poten tiellement, 3 millions de personnes sont concernées… « On n’est pas foutus, dans notre métier, tant qu’on a gardé sa capacité à s’indigner », résume-t-il.

FLORENT HENNEQUIN

33 ans.

Avocat à Paris.

STÉPHANE DUCROCQ

40 ans.

Avocat à Roubaix.

Auteur

  • Emmanuelle Souffi