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Tableau de bord

Hausse du forfait social, un frein à l’épargne salariale ?

Tableau de bord | publié le : 03.09.2012 | Pierre-David Labani

Xavier Hollandts Enseignant-chercheur à l’ESC Clermont, chaire Alter-Gouvernance et IFGE.

Le relèvement du forfait social de 8 % à 20 % risque de détourner les entreprises de l’épargne salariale, qui a toujours fait l’objet d’un large consensus. L’analyse du gouvernement est exacte sur un point : cette épargne profite avant tout aux salariés des (très) grandes entreprises. Dès lors, il paraît tentant de taxer plus fortement des dispositifs qui profitent aux mieux lotis. Cette réforme est également censée faire converger les différents modes de rémunération. Les entreprises seront confrontées à un trade-off : continuer à verser de l’épargne salariale ou transférer ces sommes vers d’autres formes de rémunération. Mais le danger principal pour les salariés est de voir les entreprises se détourner aussi bien de l’épargne salariale que des augmentations de salaire, ce qui est d’autant plus aisé en temps de crise. Elles risquent aussi de réallouer une partie de la valeur ajoutée à d’autres bénéficiaires, moins taxés fiscalement. Les salariés, qui n’en perçoivent que 6,8 % (contre 36 % pour les actionnaires), pourraient être encore plus lésés. Paradoxalement, cette réforme risque de profiter plus aux actionnaires qu’aux salariés : comment épargner moins sans gagner plus !

Daniel Gée Délégué général de Fondact.

Le projet de loi de finances rectificative adopté par l’Assemblée nationale le 16 juillet porte de 8 % à 20 % le forfait social supporté par les entreprises sur les dispositifs d’épargne salariale : participation, intéressement… D’une ampleur inédite, cette taxation est à la fois injuste, inadaptée et contre-productive. Injuste car elle frappe les entreprises les plus vertueuses en matière de partage des profits, celles qui ont négocié des accords de participation plus favorables que le minimum légal et celles qui ont mis en place des accords d’intéressement. Inadaptée car elle va contraindre ces mêmes entreprises à renégocier à la baisse leurs accords de façon à neutraliser la charge supplémentaire qui leur est imposée, et dissuader celles qui ne disposent pas encore de tous les dispositifs de partage d’en instaurer, notamment les PME. Contre-productive, car elle aura un impact négatif sur le pouvoir d’achat, immédiat ou différé, des salariés, mais aussi sur les recettes de l’État (baisse de la productivité, réduction de l’impôt sur les sociétés, de la CSG-CRDS et de l’impôt sur le revenu). Enfin, et ce n’est pas son moindre défaut, la hausse du forfait social va affaiblir la négociation collective dans les entreprises.

Gilles Briens Avocat associé au sein du cabinet Fromont Briens.

Depuis 1986 le législateur ne cesse d’inciter les entreprises à développer les systèmes associant les salariés aux résultats de l’entreprise et, brutalement, il augmente le forfait social. Il devrait pourtant veiller à permettre à l’entreprise d’aller au terme de ses contrats en cours dans les conditions initiales, de telle sorte qu’elle ne se soit pas engagée au-delà de ce qu’elle avait prévu. Il ne faut pas se faire d’illusions : tôt ou tard, les entreprises reviendront sur leurs engagements en matière d’épargne salariale. Il se peut d’ailleurs qu’elles aient prévu dans leurs accords, ce qui est de plus en plus fréquent, des clauses « législation constante » par lesquelles elles anticipent l’imagination féconde du législateur… Dans ce cas, la formule d’intéressement ou de participation dérogatoire s’entend toutes charges nouvelles ou impôts nouveaux compris et la réforme va réduire d’autant la prime attribuée aux salariés. En tout état de cause, les engagements en matière d’épargne salariale sont à durée déterminée. Il en résultera, tôt ou tard, une révision à la baisse de ces accords, de telle sorte que les budgets soient constants. En définitive, le pouvoir d’achat des salariés va être amputé.

Pour en savoir plus

Hausse du forfait social.

Projet de loi de finances rectificative pour 2012. www.assemblee-nationale.fr/14/projets/ pl0071.asp#P9929_577618.

Chiffres clés de l’épargne salariale. AFG. www.afg.asso.fr/index.phpoption=com_content&view=article&id=863&Itemid=124&lang=frt.

Le bilan des dépenses fiscales et niches sociales. http://www.vie-publique.fr/actualite/alaun/fiscalite-bilan-depenses-fiscales-niches-sociales.html.

Forfait social : les arguments de Fondact.

www.fondact.org/actu-fondact/forfait-social-les-arguments-de-fondact.

Auteur

  • Pierre-David Labani