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Nancy, côté social

Un laboratoire de la cohésion sociale

Nancy, côté social | Métropoles | publié le : 03.09.2012 | S. G.

Apprentissage, zones franches, rénovation urbaine…, l’agglomération actionne tous les leviers possibles pour stimuler l’emploi et l’insertion.

Ville radicale, Nancy est une sorte de laboratoire de la cohésion sociale telle que l’a imaginé Jean-Louis Borloo quand il était ministre de l’Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement. L’Agence nationale pour la rénovation urbaine a engagé à Nancy son plus gros projet hors d’Ile-de-France : un investissement de 457 millions d’euros sur cinq ans (2007-2011) pour rénover sept quartiers, dont l’emblématique Haut-du-Lièvre (limitrophe de Maxéville), rebaptisé Plateau-de-Haye afin de marquer son nouveau départ.

Adjoint au maire de Nancy chargé de la culture, Laurent Hénart a été, de 2004 à 2005, secrétaire d’État à l’Insertion professionnelle des jeunes au sein du pôle « cohésion sociale » de Jean-Louis Borloo. Autant dire qu’il connaît les rouages de l’insertion sur le bout du doigt. Ce n’est donc pas un hasard s’il préside la maison de l’emploi de Nancy – encore une invention estampillée Borloo –, qui met en œuvre toute la palette de dispositifs dont elle dispose pour faciliter l’accès à l’emploi.

Obligation d’insertion dans les marchés publics. À commencer par la clause d’insertion, qui s’est imposée pour tous les marchés publics du département : elle oblige les entreprises candidates à accorder au moins 5 % des heures travaillées à des demandeurs d’emploi de longue durée, des allocataires du RSA, des personnes handicapées ou des habitants des zones urbaines sensibles. Ce qui représente en moyenne cent mille heu res travaillées par an… et même davantage, « car les entreprises se sont prises au jeu et ont atteint le taux de 7 % d’heures “clausées” », se félicite Dominique Van Keirsbilck, directrice de la maison de l’emploi.

Ministre de la Fonction publique de 1993 à 1995, André Rossinot a signé le décret permettant aux trois fonctions publiques de recourir à l’apprentissage. Ce que la Ville et la Communauté urbaine ne se privent pas de faire : de 30 à 50 jeunes apprentis sont recrutés chaque année. « Nous avons ainsi formé près de 300 jeunes, du CAP au master, dans des domaines d’activité très différents, allant du bâtiment au management en passant par l’environnement », explique Malika Dati, adjointe au maire chargée de l’emploi et de l’insertion professionnelle. De plus, 250 jeunes en rupture scolaire sont pris en charge chaque année par l’École de la deuxième chance. Et 1 million d’euros est affecté (sur fonds européens) au plan local d’insertion par l’économie.

Toujours dans le sillon Borloo, deux zones fran ches urbaines (ZFU) ont été créées en 2004 dans les communes de Nancy (Plateau-de-Haye) et de Vandœuvre. « Le dispositif a été prorogé jusqu’en 2014, explique Philippe Bertaud, vice-président du Grand Nancy. De plus, à compter du 1er janvier dernier, les exonérations d’impôts sont conditionnées par le recrutement d’au moins la moitié de personnes résidant en ZFU (et non plus seulement un tiers, comme par le passé). » Bilan : « Nous avions un objectif de 500 créations d’emplois. Nous en sommes à 1 200, poursuit Philippe Bertaud. Il y a sans doute un effet d’aubaine [NDRL : 20 % des entreprises implantées en ZFU sont des transferts]. Mais pas seulement. Ce dispositif est une vraie réussite. »

En tout cas, le nombre d’entreprises s’implantant en zone franche ne cesse d’augmenter : il est passé de 977 en 2004 à 1 333 en 2012, avec une large majorité d’activités de services (79 %).

ANDRÉ ROSSINOT, MAIRE RADICAL DE NANCY DEPUIS 1983
“Nancy est une ville de synthèse”

Comment caractérisez-vous la culture sociale de Nancy ?

Nancy a toujours été une ville profondément humaniste et républicaine, ouverte et tolérante. Elle n’a jamais donné prise aux extrêmes : dreyfusarde hier, elle est aujourd’hui moins sensible aux thèses du Front national que le Grand Est. C’est une ville de synthèse entre différentes sensibilités, catholiques ou agnostiques, mais toujours avec un fond social.

Comment traverse-t-elle la crise ?

Plutôt mieux que la moyenne, puisque son taux de chômage reste inférieur à 9 %. En Lorraine, le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté de façon très importante : + 36 % entre 2007 et 2011. Cette région, qui ne représente que 3,1 % des emplois français, a concentré 11 % des pertes d’emplois enregistrées depuis 2000. Si la zone d’emploi de Nancy a été relativement préservée, c’est parce qu’il a engagé dès 2000 une dynamique de création d’emplois dans les services (8 775 emplois créés en dix ans) qui a plus que compensé les pertes dans l’industrie.

Quels sont ses atouts ?

D’abord sa dynamique de création d’entreprises : 3 200 entreprises ont été créées en dix ans, notamment dans les technologies de l’information, les secteurs innovants et la santé. De plus, les investissements directs étrangers représentent plus de 15 % des établissements et des emplois du secteur marchand. Ce qui a sans doute un lien avec le niveau de qualification très élevé de la population : la Communauté urbaine compte 52 000 étudiants, 27 000 cadres supérieurs, 10 500 travailleurs non salariés, 3 500 chercheurs publics, 2 500 chercheurs privés…

Et ses faiblesses ?

La faible dynamique démographique pèse sur le développement des emplois de services et de construction. Mais elle est compensée par les investissements très lourds en faveur de la rénovation urbaine : un millier de logements sont actuellement en chantier.

Quel est, aujourd’hui, votre principal sujet de préoccupation ?

Le taux de chômage reste très élevé dans les quartiers. La zone d’emploi de Nancy compte 10 % d’allocataires du RSA. Certes, les deux zones franches urbaines ont fait naître 1 200 emplois (dont 30 % de résidents des quartiers concernés), l’École de la deuxième chance accueille 250 jeunes par an, la Ville et la Communauté urbaine embauchent une trentaine d’apprentis par an… Mais, hélas, l’emploi ne se décrète pas : la solution est avant tout corrélée à la conjoncture économique.

Propos recueillis par Sabine Germain

Auteur

  • S. G.