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Enquête

Très cher modèle social…

Enquête | publié le : 01.04.2012 | Stéphane Béchaux

Trop protecteur, trop généreux, trop dispendieux ? Face à une Allemagne « exemplaire », notre modèle social est sur la sellette. Mais les Français sont très attachés à ses filets de sécurité.

N’en déplaise aux partisans d’un Aggiornamento et aux admirateurs éperdus du modèle allemand, l’attachement des Français à leurs acquis sociaux ne se dément pas. C’est ce que démontre d’éclatante façon le sondage réalisé en exclusivité par Harris interactive pour Liaisons sociales magazine (voir page 24). Plus de huit Français sur dix s’y déclarent attachés au modèle social dont ils bénéficient. Pourtant, depuis quelques mois, dans l’Hexagone, dirigeants politiques, chefs d’entreprise, économistes et experts de tout bord encensent le modèle rhénan pour la richesse de son dialogue social, la compétitivité de son industrie, son sens de l’effort et de l’intérêt général. Un grand frère exemplaire que la France devrait, selon eux, copier d’urgence.

À l’étranger, le modèle social français, lui, ne fait pas recette. Engoncée dans le chômage de masse, la cinquième puissance mondiale est ainsi soupçonnée de « se la couler douce » avec ses confortables 35 heures, sa fonction publique hypertrophiée, son salaire minimum généreux et ses filets de sécurité innombrables. La réalité est plus nuancée, comme le montrent les sept « idées reçues » que nous avons explorées. Douce pour les insiders, ces salariés en CDI à temps plein cumulant les avantages, la France s’avère nettement moins idyllique pour les outsiders, ces millions de travailleurs peu qualifiés, englués dans la précarité, alternant petits boulots et chômage.

Hérité des Trente Glorieuses, le modèle social tricolore a vieilli, même s’il n’a pas perdu toutes ses qualités. En 2009, au plus fort de la crise, Nicolas Sarkozy lui trouvait même des vertus, après l’avoir tant étrillé, en ­vantant le « rôle crucial » de ses « filets de sécurité » et de ses « stabilisateurs automatiques ». Un message reçu cinq sur cinq par les Français. Smic, Sécurité sociale, services publics, minima sociaux, assurance chômage et Code du travail font partie intégrante du patrimoine national. Sauf que ces bijoux de famille, financés à crédit depuis des décennies, pèsent aujourd’hui très lourd dans les charges de la nation.

Qu’on en juge : l’État n’a jamais présenté un budget excédentaire depuis 1975, la Sécu creuse son trou chaque année de 10 à 20 milliards d’euros et l’Unedic verra sa dette dépasser les 15 milliards d’euros en fin d’année. « On a protégé les Français des années ? 80 en hypothéquant l’avenir de leurs enfants et de leurs petits-enfants. Là est la vérité et là est la trahison de l’esprit et de la lettre de notre modèle social », rappelait ainsi Nicolas Sarkozy cet automne à Bordeaux. Dans sa campagne, le chef de l’État a clairement marqué son intention d’en appeler à la responsabilité individuelle, en lançant la chasse aux « fraudeurs » et en dénonçant la culture de l’« assistanat ». Son challenger, François Hollande, s’est, lui, prononcé pour une mise à contribution des plus riches et la fin des cadeaux fiscaux. Des mesures light, comparées aux cures d’austérité mises en œuvre en Italie, en Espagne ou en Grande-Bretagne. Pas sûr que cela suffise…

Auteur

  • Stéphane Béchaux