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Politique sociale

Un rôle renforcé dans la négociation collective

Politique sociale | publié le : 01.02.2012 | Thomas Schnee

Même au pays de la cogestion, où l’on compte près de 260000 CE, il n’est pas toujours évident de faire respecter la loi

Monika Christann garde un mauvais souvenir de l’élection du comité d’entreprise de la filiale francfortoise du groupe logistique Dachser (20 000 salariés). En Allemagne, la loi sur la constitution des entreprises (Betriebverfassungsgesetz), qui règle les modalités d’élection et de fonctionnement des CE, prévoit que les salariés de toute société de plus de cinq personnes ont le droit d’exiger la création d’un comité d’entreprise (Betriebsrat). Pour faire respecter ce droit, des employés de Dachser ont appelé à la rescousse cette déléguée locale du Syndicat des services Verdi. Ce qui a fortement déplu à la direction de l’entreprise: « Au début, je n’avais pas le droit de m’aventurer au-delà du hall d’entrée de la filiale. Un vigile m’a même accompagnée aux toilettes », raconte-t-elle. Après des menaces et l’intervention du tribunal du travail, l’élection a finalement pu avoir lieu. Aujourd’hui, la direction de Dachser ne parle plus que de regrettables « erreurs de communication ». Loin d’être isolé, cet exemple montre que, même au pays de la co-gestion, où l’on compte près de 260000 comités d’entreprise, il n’est pas évident de faire respecter la législation.

Vastes prérogatives. Les premières assemblées de représentation des travailleurs ont vu le jour en 1900 dans le secteur minier. Mais ce n’est qu’en 1952, dans le cadre des lois sur la cogestion, qu’une véritable législation sur les CE s’est construite. Elle a été amendée et élargie en 1972 puis en 2001. Aujourd’hui, les domaines d’action et les prérogatives des élus du Betriebsrat, dont l’élection n’est pas soumise au contrôle syndical, sont vastes. Intervenant sur tous les sujets concernant les conditions de travail et les salaires, même si ces derniers sont négociés au niveau de la branche, il doit être consulté en cas de décisions importantes. Chez l’équipementier industriel Trumpf, il a participé à la définition d’un modèle révolutionnaire de temps de travail. Mais il est aussi en droit d’imposer un plan social en cas de fermeture d’usine, comme chez Continental, Nokia ou Siemens.

« Le transfert partiel de la négociation collective au niveau de l’entreprise a renforcé le rôle et l’importance des CE, qui n’y sont pas forcément préparés », explique Peter Schrader, du département cogestion de Verdi. En conséquence, les syndicats allemands ont commencé à réorienter leur action. IG Metall vient de réformer ses structures en transférant 100 postes du siège de Francfort aux sections locales, celles dont le rôle est d’appuyer les élus des CE. « En revanche, le CE ne gère pas d’œuvres sociales et ne dispose pas de budget propre. Chaque dépense doit recevoir le feu vert de la direction », explique Peter Schrader.

Un dispositif anecdotique en Italie

En Italie, les comités d’entreprise n’ont rien d’obligatoire. Ils peuvent être constitués au terme d’une libre négociation entre l’employeur et les représentants des salariés. Leur structure est par définition paritaire, ce qui donne un droit de regard de l’employeur sur les comptes. Dans les faits, ce sont des associations à but non lucratif destinées à offrir des services extraprofes­sionnels, d’où leur nom de dopolavoro (littéralement: « après le travail »), dans des domaines aussi variés que l’assistance sociale, la santé, la formation, le sport, le tourisme et la culture. Elles existent essentiellement dans les grandes entreprises, comme Fiat, et particulièrement dans le secteur des transports. Dans le ferroviaire, par exemple, il existe une association dopolavoro nationale, représentée dans 250 villes du pays, pour le compte des 170 000 employés des Ferrovie dello Stato, la SNCF transalpine.

À Rome, la régie du métro et des bus, Atac, en est, elle aussi, dotée. Historiquement, c’est le régime fasciste de Mussolini qui a été l’initiateur des comités d’entreprise, au travers de l’œuvre nationale du temps libre, une institution créée en 1925 pour « soigner l’élévation morale et physique du peuple ». À l’époque, évidemment, c’était le moyen rêvé de contrôler l’humeur de la population. P.G.

Auteur

  • Thomas Schnee