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Tableau de bord

Les incitations financières dopent-elles l’apprentissage ?

Tableau de bord | publié le : 01.03.2011 |

Hugues de Balathier Chef du département travail, emploi au CAS

La comparaison avec l’Allemagne, où l’alternance est très développée, ne montre pas de différence significative s’agissant des facteurs financiers, au moins pour l’apprentissage (coût pour l’entreprise ou rémunération de l’apprenti). Un soutien financier individuel accru à l’apprentissage n’est donc pas la priorité. Le quota de 3 % relève d’une approche réglementaire, plus contraignante. Il contribue à faire évoluer plus rapidement les comportements, alors que le facteur culturel joue beaucoup entre la France et l’Allemagne. C’est donc un dispositif qui a plutôt vocation à être temporaire. De plus, il semble délicat de jouer sur le niveau du quota dès que l’on fixe un nouvel objectif quantitatif sans considérer les capacités des entreprises. Le bonus-malus est un bon compromis entre l’approche contraignante et l’approche financière individuelle. Il limite l’effet de seuil du quota et relève d’une conception financière mais collective (l’incitation ne portant pas sur chaque embauche mais sur un niveau global d’embauches). La question est surtout celle du choix des paramètres, qui pourraient d’ailleurs être évolutifs. Enfin, pour être efficace, une telle mesure doit s’inscrire dans un plan plus large et elle devra être suivie et évaluée.

Brigitte Le Boniec Directrice formation et compétences à l’ACFCI

Oui, les incitations financières peuvent être efficaces pour doper l’apprentissage, à la condition qu’elles soient bien comprises des entreprises. Car des aides conjoncturelles se sont ajoutées aux aides structurelles. Les mesures sont de différente nature (zéro charge, crédit d’impôt, primes des régions ou de l’État) et variables en fonction de la taille des entreprises. Les PME-TPE ont du mal, seules, à s’y retrouver. Lorsqu’elles sont accompagnées, cela porte ses fruits. En 2009-2010, le nombre de contrats enregistrés par les CCI a augmenté de près de 3 % alors qu’on annonçait une chute vertigineuse à l’été 2009. S’agissant des quotas d’alternants pour les entreprises de 250 salariés et plus, les CCI sont résolument pour « récompenser » les entreprises vertueuses. Elles ont déjà proposé au gouvernement de créer un système de bonus afin que les entreprises puissent s’exonérer en fonction de leur effort d’une partie de la pénalité prévue (CSA versée au Trésor – 0,1 % des salaires) en l’utilisant pour financer directement le coût de formation de leurs apprentis. En revanche, une augmentation du quota d’apprentis pourrait être contre-productive et pousser l’entreprise à se désinvestir de l’apprentissage.

Damien Brochier Chercheur au Cereq

Comme souvent pour d’autres dispositifs de la politique de l’emploi, les pouvoirs publics mobilisent depuis trente ans de multiples incitations financières destinées aux employeurs en matière d’apprentissage : exonérations de charges sociales sur les salaires, primes à l’embauche d’apprentis, crédit d’impôt apprentissage, etc. Les entreprises qui le souhaitent ont déjà largement pu bénéficier des effets d’aubaine de ce type de mesures. On peut donc s’interroger sur l’efficacité réelle d’un nouveau dispositif incitatif. Le « bonus-malus » ne suffira pas à provoquer une hausse majeure du nombre d’apprentis.

La cible visée, les entreprises de plus de 250 salariés, pose également problème. Le choix de l’apprentissage y correspond à une stratégie de recrutement déterminée visant à professionnaliser des diplômés du supérieur, qui représentent trois quarts des nouveaux apprentis. Ces jeunes n’en tireront qu’un faible avantage en termes d’insertion. Quant aux entreprises, si elles apprécient les avantages financiers et fiscaux liés à ces contrats, une incitation « conjoncturelle » supplémentaire a peu de chances de leur faire augmenter le nombre d’apprentis qu’elles recrutent, sans d’autres mesures plus structurelles.

Pour en savoir plus

« Tableau de bord mensuel des politiques d’emploi […] ». Contrats d’apprentissage. www.travail-emploi-sante.gouv.fr.

« L’Avenir de la formation professionnelle des jeunes ». Note du CAS.

www.strategie.gouv.fr/IM/pdf/NoteVeille169.pdf.

« Pourquoi ce besoin d’exagérer les chiffres […] ? »

Le blog de Michel Abhervé. http://blog.educpros.fr/michelabherve/2011/02/13.

« Promouvoir et développer l’alternance ».

Rapport d’Henri Proglio. www.minefe.gouv.fr/services/rap09/091210promouvoir-developper-alternance.pdf.