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Tableau de bord

Faut-il créer une TVA sociale ?

Tableau de bord | publié le : 01.02.2011 |

Alexandre Delaigue Économiste aux Écoles spéciales militaires de Saint-Cyr Coëtquidan

Réduire les cotisations sociales et augmenter la TVA a le même effet qu’une dévaluation en réduisant le coût du travail pour les entreprises domestiques, en augmentant le prix des produits consommés sur le territoire, sans toucher le prix des exportations. On peut en attendre une amélioration de la compétitivité-prix des entreprises soumises à la concurrence internationale, au prix d’un appauvrissement national (les produits importés coûtent plus cher). Cet effet est modeste, et l’impact sur l’emploi très incertain, car peu concerné par la concurrence internationale (4 % des entreprises françaises exportent). Certains secteurs peuvent répercuter la TVA sur les prix de vente et bénéficier d’une baisse des charges, d’autres non. Il est préférable d’aider directement les victimes de la mondialisation plutôt que des secteurs d’activité en déclin et peu productifs. La question de la TVA sociale est symptomatique de l’obsession de la compétitivité qui afflige les politiques, consistant à croire que la performance économique se mesure à l’ampleur de l’excédent commercial. La volonté de réduire les déficits conduira peut-être à augmenter la TVA ; l’adjectif « social » est purement cosmétique.

Mathilde Lemoine Directrice des études économiques et de la stratégie marchés chez HSBC

La TVA sociale consiste en une baisse des cotisations sociales financée par une hausse de la TVA. Elle a pour objet de réduire le coût du travail. Cette TVA sociale aurait alors les mêmes effets qu’une dévaluation en réduisant le coût de production des produits français relativement à celui des partenaires commerciaux. Toutefois, pour que ce cercle vertueux s’enclenche, il est indispensable que les prix à la consommation n’augmentent pas. Or l’économie française se caractérise par la persistance d’un manque de concurrence, comme le montre l’indice de réglementation de l’OCDE.

S’il a reculé en France entre 2004 et 2008, il reste supérieur à celui calculé pour l’Allemagne ou en moyenne pour la zone euro. Ainsi, les entreprises françaises ont la possibilité d’augmenter les prix, les consommateurs ne pouvant se replier sur d’autres biens ou points de vente. L’effet sur l’emploi de la mise en œuvre de la TVA sociale sera alors modeste car la consommation sera affectée par l’augmentation des prix. Tant que la concurrence restera insuffisante, il semble donc préférable de privilégier le financement des prestations sociales universelles par l’impôt sur le revenu.

Marc Touati Directeur d’Assya Compagnie financière

Surtout pas. Et ce pour au moins trois raisons. Primo, parce que si la TVA est l’impôt le plus indolore, elle est aussi le plus inégalitaire. Dès lors, passer à un taux de TVA supérieur à 22 % détériorerait encore le peu de pouvoir d’achat qui reste aux personnes les moins favorisées. Secundo, si le principe d’une compensation de l’augmentation de la TVA par une baisse des charges sur les salaires est séduisant, il est clair que ce n’est pas un changement de 2 % sur le coût du travail et sur les prix des produits importés qui va endiguer significativement la compétitivité des biens en provenance des pays émergents, ni relancer celle de produits français. En outre, une telle compensation exclut ceux qui ne travaillent pas, et en particulier les retraités. D’où une nouvelle aggravation des inégalités sociales. Tertio, s’il est indispensable de réduire les charges qui pèsent sur les salaires et de repenser le financement des comptes sociaux, il faut aussi réduire la pression fiscale française qui, rapportée au PIB, est l’une des plus élevées du monde. Accroître ou maintenir cette dernière reviendrait à casser de nouveau la croissance, avec augmentation du chômage et creusement des déficits sociaux à la clé.

Pour en savoir plus

« Impact du “paquet fiscal” et de la TVA sociale sur la croissance ».

Mathilde Lemoine, juin 2007. http://sarkoups. free.fr/hsbcsup.pdf.

« Une ambition pour dix ans ». Deuxième rapport de la commission Attali, octobre 2010. www.liberation delacroissance.fr.

« Le site de tous les acteurs pour la TVA sociale ».

www.tva-sociale.org.

« L’impact de la TVA sociale sur l’économie et l’emploi en France ».

www.senat.fr/rap/ r06-283/r06-2833.html.