La France a mal à son travail. On constate une montée en flèche des maladies professionnelles liées au stress et le thème de la souffrance au travail a pris une place spectaculaire dans le débat public. François Dupuy y voit une « création politique », estimant que la question des conditions de travail « ne correspond ni aux observations que l’on peut faire, ni surtout au vécu des acteurs, pas plus que n’y correspond celui de la violence ». D’autre part, nos entreprises apparaissent engluées dans ce qu’il appelle « le sous-travail ». Cette situation fait l’objet d’un consensus implicite entre acteurs des organisations privées et publiques, qui cherchent à aplanir leurs divergences d’intérêts en « externalisant » le coût des dysfonctionnements sur leur environnement, le client ou l’usager. Une grande partie de l’ouvrage se concentre sur l’encadrement de proximité, principale victime du management moderne.
Ce dernier doit gérer l’écart grandissant entre le discours managérial, très sujet aux effets de mode, et la réalité des acteurs. Cette inefficacité du travail est aussi l’héritage de l’organisation en silos, derrière laquelle tout le monde se protège en s’enfermant dans les spécificités de son métier pour résister au changement. Beaucoup de ces effets pervers pourraient être combattus par le retour de la confiance. L’aspect humain de la gestion compte autant, sinon plus, que les finances de l’entreprise, devenues l’obsession des dirigeants. « C’est à nouveau « l’organisation », explique l’auteur, c’est-à-dire les hommes et leurs façons de travailler, qui tient entre ses mains la résolution de l’équation contemporaine du faire mieux avec moins. » Si les règles du jeu sont claires et si chacun s’engage à les respecter, l’opération pourrait ne pas être trop douloureuse.
Lost in management, la vie quotidienne des entreprises au XXIe siècle, François Dupuy. Éd. Seuil . 274 pages, 20 euros.
