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Métropoles

Atténuer le choc de la crise

Métropoles | publié le : 01.11.2010 | Christian Robischon

Habitués à gérer la prospérité, les pouvoirs publics ont dû créer les outils pour stimuler la formation et l’emploi.

Longtemps eldorado de l’emploi, l’Alsace a rejoint le commun des régions françaises frappées par le chômage. Le taux de chômage s’est rapproché de la moyenne nationale, atteignant même un pic de 8,9 % fin 2009, et Pôle emploi enregistrait, fin août, un record absolu de 77 500 demandeurs d’emploi en catégorie A. Habituées à plancher sur la pénurie de main-d’œuvre, les collectivités locales se sont muées en accompagnatrices des entreprises en difficulté et de leurs salariés. Sous l’impulsion, puis dans la continuité de son président UMP Adrien Zeller, décédé à l’été 2009, la Région a foisonné d’idées et élargi le champ de ses compétences dans la formation professionnelle. Mis en place en 2009, le plan régional « Agir pour l’emploi » comprend 11 mesures, dont 7 ciblées sur l’emploi et la formation (contrats aidés, contrats en alternance…), pour un total de 6,5 millions d’euros. Point phare, la prime de 2 000 euros pour l’embauche des moins de 26 ans suit, selon la Région, un cours conforme aux attentes : le nombre de jeunes bénéficiaires atteignait 306 début octobre, sur un objectif à terme de 1 000.

Aides à l’emploi

Plus mitigé apparaît le bilan de l’incitation à la formation des salariés d’entreprises touchées par le chômage partiel. Parmi les régions pionnières de cette mesure mise en œuvre en avril 2009, l’Alsace n’a vu défiler en un an que 2 400 salariés de 20 entreprises. Son crédit de 1 million d’euros pour 2009 n’a été consommé qu’à hauteur d’un tiers. La Région plaide la réticence des entreprises à entrer dans un dispositif qui, de fait, donne une publicité à leurs difficultés. La rigueur de ses critères l’a aussi pénalisée. Elle s’est longtemps focalisée sur les seules entreprises en situation officielle de chômage partiel avant d’élargir au cas plus général de sous-activité. Et la mesure n’a pas empêché des suppressions d’emplois chez Lohr et Steelcase, deux de ses principaux bénéficiaires.

Actions discrètes

Le dossier des caravanes et camping-cars Hymer à Cernay a donné l’occasion à la Région d’anticiper la reconversion du personnel. Sollicitée par les syndicats et sachant l’entreprise condamnée à la liquidation le 31 mars 2010, elle a préparé les futurs ex-salariés au retour à l’emploi. L’action s’est déroulée avant et après la fermeture, « c’est-à-dire cette phase de deuil, la plus dure, où il ne faut surtout pas rester à ne rien faire », rappelle Élisabeth Eschenlohr, directrice du groupement d’intérêt public formation continue et insertion professionnelle, la structure publique de conseil qui a mené la reconversion. Au terme de dix heures d’entretiens chacun, les 134 volontaires sur un effectif de 179 ont reçu un « carnet de compétences » qu’ils ont présenté à Pôle emploi une fois licenciés et signataires d’un contrat de transition professionnelle. « La démarche a fait gagner un à deux mois. Les personnes sont apparues mobilisées dès le début de notre prise en charge », note Michèle Cayrou, chargée du dossier à Pôle emploi.

Les pouvoirs publics savent aussi travailler dans la discrétion. À l’abri de l’agitation médiatique sur le sort de General Motors, une task force, constituée au printemps, a réuni au moins deux fois par mois des élus de la Région, du département et de la Communauté urbaine de Strasbourg, les représentants de l’État, la direction de l’usine, voire les syndicalistes, pour jouer les médiateurs. L’Adira, bras armé du département pour le suivi des entreprises, l’a animée. Elle n’est pas intervenue sur le contenu de l’accord (voir portrait page 42) mais a incontestablement apaisé le dialogue social. Et réussi à débloquer l’impasse dans laquelle s’étaient engagées la direction de GM et la CGT.

ROLAND RIES, SÉNATEUR MAIRE DE STRASBOURG
“Nous devons miser sur la vocation européenne de Strasbourg”

Strasbourg vit-elle une crise économique sévère ?

Pendant longtemps, l’Alsace a vécu sur les retombées du miracle économique allemand. Jusque dans les années 70, beaucoup d’entreprises d’outre-Rhin ont investi dans la région. Puis la situation a commencé à changer, bien avant la chute du mur, et la crise récente a aggravé les choses. Le taux de chômage est remonté et se situe désormais autour de 9,6 % dans le bassin d’emploi de Strasbourg. L’industrie souffre. Des entreprises ferment. Nous avons eu une grosse alerte avec General Motors ; Eli Lilly s’apprête à supprimer des emplois…

Comment pouvez-vous contrecarrer cette tendance ?

Nous venons de lancer un programme ambitieux, Strasbourg Éco 2020. Nous avons beaucoup réfléchi à ce qui nous distinguait des autres métropoles et avons décidé de miser sur nos atouts ; la vocation européenne de Strasbourg et nos compétences d’excellence. Nous avons défini quatre secteurs clés : les technologies médicales et les thérapies nouvelles, les mobilités innovantes et multimodales. Strasbourg est, à ce titre, un bon modèle d’expérimentation de modes de transport originaux et durables. En l’espace de vingt ans, la Compagnie des transports strasbourgeois (CTS) a doublé son personnel. Il s’agit aussi pour nous de miser sur le tertiaire supérieur international qui comprend notamment un gros secteur bancaire. Parmi nos projets, nous voulons construire un quartier d’affaires pour attirer davantage de sièges sociaux sur les bords du Rhin. Nous avons investi 55 millions d’euros dans l’extension du palais des Congrès, 200 millions d’euros dans la reconstruction du parc des Expositions. Enfin, nous tablons sur l’offre culturelle de l’agglomération.

La proximité de l’Allemagne reste-t-elle un atout ?

Aujourd’hui, il est difficile de dire si la croissance allemande aura des retombées sur l’emploi alsacien, mais nous devons exploiter notre positionnement. Nous tablons sur le développement de l’Eurodistrict, piloté par un groupement européen de coopération territoriale (GETC), dont le siège est à Kehl, en Allemagne. La ligne de tramway va notamment être étendue pour améliorer l’axe Strasbourg-Kehl. Historiquement, une zone tampon était nécessaire entre les deux pays. Résultat, nous héritons de friches, un foncier extrêmement précieux. Bien sûr, il nous faut éviter la socialisation des pertes et la privatisation des profits. En clair, que la collectivité investisse et que seules les entreprises en profitent. Nous allons tout faire pour promouvoir l’emploi.

Propos recueillis par S.F.

Auteur

  • Christian Robischon