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Les RH en voie d’externalisation

Dossier | publié le : 01.10.2010 |

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Domaines RH concernés par l’externalisation (en %)

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De plus en plus d’entreprises font appel à des prestataires extérieurs pour gérer leurs ressources humaines. Gestion de la paie en tête. Un choix qui, pour être profitable, doit être bien préparé et encadré dans sa mise en œuvre.

Dans le domaine des ressources humaines, l’externalisation informatique continue d’avoir le vent en poupe. Depuis plusieurs années, les entreprises, surtout les plus grandes, se sont allégées de certaines tâches RH, à commencer par la paie. Mais le phénomène a pris beaucoup d’ampleur grâce à des solutions devenues techniquement et financièrement accessibles aux PME et à une diversification de l’offre à d’autres domaines que la paie. Les cabinets de conseil spécialisés, à l’instar de Pierre Audoin Consultants ou Markess International, estiment que le marché de l’externalisation RH progresse de plus de 10 % par an depuis dix ans. Même les deux années 2009 et 2010 ont été favorables à ce domaine car, en période de crise, beaucoup d’entreprises décident d’externaliser, a fortiori s’il y a une réduction de la masse salariale à la clé. Selon l’enquête menée par Markess International début 2010 auprès d’une centaine d’entreprises et d’administrations, 43 % des organisations interrogées ont recours à des prestations d’externalisation pour tout ou partie des processus RH ; 10 % ont une action en cours ou un projet d’ici à 2012 et 8 % l’envisagent à plus longue échéance. D’après cette étude, ce sont donc près de deux entreprises sur trois qui sont (ou vont être) engagées dans un processus d’externalisation. À ce niveau, comme le notent Thomas Chardin, directeur marketing d’ADP France, et Patrick Bouvard dans leur récent ouvrage (Externalisation RH. Guide pratique et Questions clés, éditions Eyrolles), « il ne s’agit plus d’un épiphénomène managérial ou d’une mode de gestion mais bien d’une tendance lourde et dynamique du marché des services RH ». Les deux auteurs reconnaissent que, dans l’évolution de cette tendance, « l’essor des technologies constitue indéniablement un catalyseur essentiel ».

Mais pourquoi externaliser ?

Quels sont les avantages et les contraintes de ce processus ? Qu’est-ce que cela implique dans l’organisation de l’entreprise ? Quelles règles établir avec les prestataires à qui l’on va confier une partie du patrimoine informationnel de l’entreprise ? Autant de questions que doivent impérativement se poser les responsables des ressources humaines avant de passer à l’acte. En effet, ce que l’on appelle « externalisation informatique » englobe plusieurs situations qui n’ont pas les mêmes implications pour l’entreprise et ses partenaires. L’externalisation peut être uniquement matérielle. Le client va confier à un prestataire extérieur la gestion de ses serveurs, dont les machines qui abritent les applications RH. Le deuxième type d’externalisation concerne les applications, qui sont hébergées chez le partenaire et dont le client dispose par la location. Enfin, il y a l’externalisation globale de tout un processus RH, appelée dans le jargon technique BPO (business process outsourcing). Le choix de la prestation dépend, alors, de la taille de l’entreprise, de son patrimoine informationnel, de l’objectif recherché mais aussi d’éléments plus conjoncturels. Certaines organisations vont externaliser parce que leurs solutions technologiques internes sont devenues obsolètes et qu’elles préfèrent investir en « opex » (dépenses d’exploitation) plutôt qu’en « capex » (dépenses d’investissement de capital). Parfois, l’opération se fait à la suite d’un mouvement capitalistique (fusion, cession, rachat…) avec pour visée de gagner en flexibilité organisationnelle.

Le choix du modèle d’externalisation peut aussi être conditionné par la maturité de l’entreprise vis-à-vis de l’informatique : si certaines acceptent de faire héberger leurs serveurs par un prestataire, elles refusent en revanche de faire sortir des applications RH considérées comme stratégiques. Les motivations diffèrent donc beaucoup, avec cependant des impératifs communs que rappellent Thomas Chardin et Patrick Bouvard : « Les domaines d’externalisation sont circonscrits à des domaines identifiés et choisis, donc maîtrisés. Tout l’ordre décisionnel et managérial doit demeurer dans l’entreprise. » En clair, l’entreprise, même en cas d’externalisation complète (BPO), doit conserver la maîtrise des processus et surtout bien préparer en amont le basculement en mettant en avant l’ensemble des processus qui vont être concernés.

Le premier motif (et le bénéfice principal) de l’externalisation RH est économique. « Passer par un prestataire externe permet de flexibiliser sa structure de coût, de passer de frais fixes internes à une facture commerciale variable correspondant à la prestation exactement et effectivement consommée », expliquent Thomas Chardin et Patrick Bouvard. Par exemple, si l’entreprise est en phase de croissance, elle n’aura pas besoin de faire l’acquisition de nouveaux serveurs informatiques ni d’embaucher un nouveau gestionnaire de paie. A contrario, si son activité décline, elle ne paiera que les services nécessaires à sa masse salariale actuelle et n’aura pas à se préoccuper d’adapter des coûts informatiques surdimensionnés à ses nouveaux besoins. L’analyse de certains coûts est, à cet égard, significative : réalisé en interne, le traitement d’un bulletin de paie revient de 35 à 55 euros pièce à l’entreprise. Un prix qui comprend notamment le système informatique, les compétences juridiques et comptables et tout le traitement administratif. L’externalisation peut réduire ce coût de 30 %. D’où la tentation pour beaucoup d’entreprises de faire appel à un prestataire extérieur.

Mais attention, précise Thomas Chardin, « il ne faut pas que l’externalisation se fasse dans une stricte démarche de cost-killing, car cette attitude va souvent de pair avec le choix d’une solution technique au rabais ». Un projet d’externalisation à court terme et uniquement motivé par des raisons économiques est voué à l’échec. « Ce n’est pas l’externalisation qui va faire gagner de l’argent, mais l’amélioration et l’optimisation des processus », précise David Bellaich, président du cabinet de conseil RH Althéa. En effet, externaliser n’est pas forcément synonyme de suppression de postes : « Si l’on externalise la paie, la grosse erreur est de vouloir automatiquement supprimer les gestionnaires de paie. Or, même s’il y a un très fort engagement de la part du prestataire, l’entreprise doit garder des compétences en interne qui pourront être employées à d’autres tâches », souligne Hélène Mouiche, spécialiste RH chez Markess International.

En fait, plus qu’un retour sur investissement immédiat, l’externalisation est d’abord un moyen de réduire les risques et les erreurs qui peuvent entraîner des coûts importants : « Prenons l’exemple de la feuille de paie. S’il y a une erreur, l’entreprise va devoir verser de fortes pénalités. Mais si c’est le prestataire qui a fait l’erreur, c’est lui qui paiera l’amende », explique David Bellaich. De fait, selon certaines enquêtes, un bulletin de paie sur quatre serait erroné ! « Ce n’est pas vraiment étonnant quand on sait qu’en 2009 il y a eu 130 évolutions légales qui ont concerné le bulletin de paie, soit une tous les deux jours ouvrés », note Thomas Chardin. Autre avantage de l’externalisation : pouvoir réaffecter les salariés à des tâches à plus haute valeur ajoutée que la simple saisie de bordereaux. Enfin, si des entreprises de toutes tailles peuvent avoir recours à l’externalisation, celle-ci ne sera pas aussi efficace partout : « Jusqu’à 20 salariés, les entreprises font appel à un expert-comptable et, souvent, c’est suffisant. Les entreprises de 500 à 1 000 salariés ont généralement assez de ressources en interne pour couvrir leurs besoins. En revanche, l’externalisation s’avère vraiment intéressante pour les organisations de 20 à 500 salariés qui manquent de compétences et d’expertise et également pour les grandes entreprises [au-delà de 1 000] », précise Thomas Chardin.

3 questions à
Gilles Simard, DRH de Balsan, qui a externalisé la paie chez ADP

Pourquoi avoir choisi d’externaliser la paie alors que tout était géré en interne ?

Balsan est leader en France de la fourniture de moquette pour les professionnels du bâtiment. Nous employons 240 personnes sur deux sites de production. En 2008, nous avons été confrontés à la mise en œuvre de la défiscalisation des heures supplémentaires. Notre progiciel de paie ne supportait pas cette évolution réglementaire et j’ai donc cherché sur le marché un prestataire pour m’accompagner. Il me fallait un partenaire fiable qui connaisse bien la paie et une solution pérenne avec une veille administrative et légale. Outre l’aspect réglementaire que je n’avais pas les moyens de suivre efficacement, mon objectif en externalisant était aussi de dégager du temps pour des tâches à plus haute valeur ajoutée.

Comment s’est déroulé le processus ?

J’ai regardé les prestataires du marché et mon choix s’est porté sur ADP. Il y avait un véritable défi temporel puisque le chantier a commencé en juin 2008 alors que le basculement était prévu en octobre. Mais tout s’est bien passé et le basculement s’est fait immédiatement. Le prestataire nous a très bien accompagnés, avec des interlocuteurs qui étaient des spécialistes RH et non pas des informaticiens.

Quel bilan en tirez-vous ?

Le bilan est très satisfaisant puisque, avant, il nous fallait une semaine pour faire la paie avec deux personnes alors qu’aujourd’hui cela ne prend que deux jours et demi avec une seule personne. Les déclarations ont été automatisées (DADS-U, Urssaf) et nous pouvons également éditer des requêtes pour la comptabilité. De plus, les serveurs et l’application étant hébergés chez ADP, j’estime que nous avons gagné en sécurité. Et surtout, grâce à cette externalisation qui les soulage des tâches administratives, les RH peuvent mieux travailler avec les opérationnels, par exemple pour mener les entretiens annuels d’évaluation.