logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Tableau de bord

Supprimer des niches fiscales aura-t-il un impact sur l’emploi ?

Tableau de bord | publié le : 01.09.2010 |

Marc Touati Directeur général de Global Equities.

Malheureusement, les années passent et les erreurs de politique économique demeurent. Ainsi, depuis une trentaine d’années, les gouvernements tentent de résoudre les problèmes structurels de l’économie française par le petit bout de la lorgnette. En vain. Il en est de même aujourd’hui en laissant croire que supprimer quelques niches fiscales permettra de dynamiser l’emploi. Le problème fiscal de la France est global : seul un « Grand Soir » fiscal pourra permettre de moderniser l’économie hexagonale et de la rendre plus féconde en emplois. La pression fiscale française est l’une des plus élevées et des plus complexes du monde. Il faut donc la baisser, ne serait-ce qu’au niveau de la moyenne européenne. Cela se traduirait par une diminution des impôts et des taxes d’environ 70 milliards d’euros, à répartir équitablement entre les entreprises et les ménages. Il faudrait aussi supprimer la grande majorité des niches fiscales de manière à rendre l’impôt français plus efficace et réduire d’autant les dépenses publiques, et notamment celles de fonctionnement, qui ont encore crû de 14,4 milliards d’euros l’an passé et de plus de 87,5 milliards depuis 2002. C’est inacceptable.

Jacques Delpla Économiste, membre du Conseil d’analyse économique.

Non. Si les subventions à l’emploi et les niches fiscales résolvaient les problèmes d’emploi, la France serait un pays de cocagne ! Car nous avons une des politiques de l’emploi les plus dispendieuses et l’un des plus grands nombres de niches fiscales et sociales (plus de 600, pour un coût de 110 milliards d’euros, soit 5,5 % du PIB par an). Le problème n’est donc pas là. Certes, toute réduction d’impôt spécifique crée de la richesse et de l’emploi dans ce secteur-là ; mais c’est toujours aux dépens des autres secteurs – qui doivent être plus taxés – ou au détriment d’une dette publique plus grande. Et quand on enlève ces réductions spécifiques, bien entendu, ces emplois disparaissent. Mais ce n’est pas ce qui importe, sinon il suffirait de créer des niches fiscales à l’infini. Deux choses comptent : s’engager sur un trajet modéré, graduel et crédible de baisse de la dette publique sur dix à vingt ans (notamment en réduisant les niches fiscales et sociales, en commençant par celles qui coûtent le plus cher en termes d’emplois créés); réformer en profondeur notre marché du travail pour créer des emplois – comme au Danemark avec la flexisécurité.

Éric Heyer Économiste, directeur adjoint au département analyse et prévision de l’OFCE.

Derrière les termes « niche fiscale » se cachent près de 500 mesures, hétérogènes, qui, lors de leur adoption, avaient pour but d’améliorer la situation économique. Ces mesures peuvent être évaluées à l’aune de deux critères. D’abord leur efficacité intrinsèque : ont-elles permis de modifier les comportements de façon durable et dans le sens souhaité par les autorités ? C’est ainsi que le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt n’a pas permis aux ménages modestes d’accéder à la propriété et a profité surtout aux ménages aisés et que l’aide à l’investissement immobilier dans les départements d’outre-mer ou le crédit d’impôt recherche comportent des abus dans leur coût. Le second est celui de leur pertinence compte tenu de la conjoncture : défiscaliser les heures supplémentaires lorsque le chômage baisse fortement a un sens économique qui disparaît lorsque le chômage explose. En revanche, certaines mesures semblent toujours adaptées : les aides à l’emploi telles que les réductions d’impôt ouvertes pour l’emploi d’un salarié à domicile, la prime pour l’emploi et diverses prestations sociales qui soutiennent le pouvoir d’achat des ménages modestes.

Pour en savoir plus

Rapport public annuel 2010, Cour des comptes.

www.ccomptes.fr/fr/CC/Sommaire-23.html.

Pour un « big bang fiscal », livre d’Attac coordonné par Vincent Drezet (Union Snui-SUD Trésor Solidaires)

www.snui.fr.

Débat d’orientation des finances publiques pour 2011. Rapport de P. Marini.

www.senat.fr/rap/r09-616/r09-61630.html#toc107.

Rapport de la commission des finances sur les niches fiscales. www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i0946.asp.