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Éditorial

Pour une rigueur socialement supportable

Éditorial | publié le : 01.06.2010 | Jean-Paul Coulange

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Pour une rigueur socialement supportable

Crédit photo Jean-Paul Coulange

Après 1983 puis 1995, voici revenu le temps de la rigueur qui ne veut pas dire son nom. On en connaît les tenants et les aboutissants : envolée de l’inflation, fuite des capitaux et défaillance du franc avaient convaincu François Mitterrand de changer de politique économique, deux ans après son élection, tandis que Jacques Chirac, délaissant le thème de la fracture sociale qui avait occupé une place centrale dans sa campagne présidentielle, avait donné quitus à Alain Juppé pour rééquilibrer à la hussarde les comptes de la Sécurité sociale. En 2010, c’est la peur du déclassement, plus précisément de la dégradation de la note de la France sur les marchés, qui pousse l’exécutif à décréter la rigueur. Rien d’étonnant lorsque l’on sait que près des trois quarts de la dette sont financés par des capitaux étrangers.

Il n’empêche que la potion est amère. Car l’ampleur des économies à réaliser pour ramener le déficit à 3 % du PIB a contraint le Premier ministre à sortir l’artillerie lourde. Il ne s’agit plus, désormais, de se contenter du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ou d’un coup de rabot sur les niches fiscales. Mais de tailler à la hache, pour les alléger de 10 %, soit de quelque 6 milliards d’euros, dans les dépenses d’intervention. Entendez par là les mesures de solidarité, les politiques en faveur de l’emploi ou du logement ou encore certaines prestations comme le RSA ou encore l’allocation pour adulte handicapé. On touche là aux fondamentaux de l’État providence. C’est pourquoi les ministres sociaux concernés ont de quoi être inquiets en attendant les arbitrages de Matignon vers le milieu de ce mois.

Pour être juste, le traitement de choc appliqué par François Fillon doit remplir plusieurs conditions. D’abord, préserver les salariés privés d’emploi et ceux travaillant dans des secteurs en difficulté. Le président de la République s’est félicité, lors du récent sommet social, des effets bénéfiques du dispositif d’activité partielle, qui a profité à 400 000 salariés en 2009. Il ne faudrait surtout pas relâcher l’effort cette année. Pour les chômeurs parvenant en fin de droits, l’accord trouvé entre l’État et les partenaires sociaux et qui concerne 345 000 personnes doit être pérenne. Du côté des contrats aidés, autre amortisseur social indispensable, pas de crainte majeure : l’enveloppe (plus de 400 000 contrats dans les secteurs non marchand et marchand) est comparable à celle de l’an dernier.

Reste, enfin, à soutenir les associations qui luttent contre l’exclusion. Dans un rapport très remarqué, le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, notait que « les réponses de la société en termes de politique de solidarité font montre d’une efficacité déclinante ». C’est pourtant à ce prix que la cure d’austérité décidée par le docteur Fillon sera socialement supportable. Et elle sera d’autant mieux acceptée que l’effort sera partagé par tous.

Auteur

  • Jean-Paul Coulange