logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Éditorial

L’impossible pacte sur les retraites

Éditorial | publié le : 01.05.2010 | Jean-Paul Coulange

Image

L’impossible pacte sur les retraites

Crédit photo Jean-Paul Coulange

On peut penser ce que l’on veut des sombres prévisions financières du Conseil d’orientation des retraites. Que le COR – créé, soit dit en passant, par Lionel Jospin lorsqu’il était à Matignon – est un outil au service de la propaganda gouvernementale, dont la mission consiste à dramatiser le débat ; ou que des projections à l’horizon 2050 sont d’une utilité relative puisque, il y a seulement vingt mois, peu d’économistes et autres conjoncturistes imaginaient qu’un cataclysme financier allait s’abattre sur la planète… Il n’empêche que la seule actualisation du déficit des régimes de retraite montre que le bon vieux mécanisme de la répartition est à bout de souffle.

Non seulement il s’est montré incapable d’encaisser une récession de grande ampleur : dès cette année, le régime d’assurance vieillesse devrait, en effet, accuser un déficit supérieur à 30 milliards d’euros, alors que l’on n’attendait ce cap qu’en 2020 ; mais, sur le plan structurel, il ne peut plus supporter le ratio décroissant entre actifs et retraités. Dans beaucoup d’autres pays développés, et l’on songe bien évidemment, en premier lieu, à notre voisin allemand mais également aux démocraties d’Europe du Nord, l’urgence d’une remise à plat totale de leur système de retraite aurait transcendé les courants, les clivages, les querelles, les familles politiques. Pas en France. Pratiquement aucun des très nombreux docteurs Diafoirus qui se sont penchés sur le problème, hormis Manuel Valls, le député-maire socialiste d’Évry, n’a évoqué la nécessité d’une union sacrée autour de la réforme des retraites. En clair, d’un pacte national sur lequel se seraient retrouvés la majorité et l’opposition, le patronat et les syndicats, l’État et les partenaires sociaux.

Cela aurait été l’occasion de mettre sur la table de négociations, outre le report de l’âge légal de la retraite et l’allongement de la durée de cotisation, l’harmonisation des modes de calcul entre le secteur public et le secteur privé et le taux de cotisation des fonctionnaires, mais aussi l’élargissement de l’assiette des prélèvements à l’ensemble des revenus. Deux tabous que l’on a bien du mal à briser. Le premier parce qu’il est dangereux de s’attaquer au bastion de la fonction publique, dans une sorte de remake de 2003 à l’envers. La majorité ne sort pas, cette fois, d’une élection présidentielle gagnée haut la main, mais d’un scrutin régional calamiteux. Le second parce que Nicolas Sarkozy répugne à toucher à l’édifice fiscal français qu’il a bâti en 2007.

À défaut de ce scénario vertueux, le Medef joue les va-t-en-guerre, les syndicats fourbissent leurs armes en vue des nombreuses démonstrations de rue qui vont vraisemblablement rythmer le printemps et le début de l’été. Et le gouvernement planche activement sur son projet de loi. Car, en définitive, et tous les protagonistes le savent bien, c’est lui qui écrira la partition finale. En attendant, quelle occasion manquée !

Auteur

  • Jean-Paul Coulange