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Idées

Les dessous de l’histoire patronale

Idées | Livres | publié le : 01.12.2009 | Jean Mercier

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Les dessous de l’histoire patronale

Crédit photo Jean Mercier

Cette Histoire secrète du patronat n’est pas exempte de défauts. Fruit d’un travail collectif, le livre souffre de ses partis pris, et « le vrai visage du capitalisme français » qu’il prétend nous révéler frise parfois la caricature. Mais il sera difficile de faire l’impasse sur ce livre quand on voudra approfondir la place du patronat dans la société française de l’après-guerre. Les auteurs sont sans tendresse sur le rôle joué par le patronat durant l’Occupation. On leur sera très reconnaissant de jeter une lumière crue sur toutes les officines patronales qui fleurirent dès la Libération sous le drapeau de l’anticommunisme. Autre sujet de prédilection des enquêteurs : les caisses noires qui ont irrigué le système patronal. Ils font un sort aux caisses de congés payés du BTP, aux fonds de la médecine du travail, se régalent avec les « casseroles » du 1 % logement, pour finir en apothéose avec l’affaire de l’UIMM. Selon Benoît Collombat, le pouvoir politique s’est employé à éviter que le scandale de la « caisse noire » ne vire à l’affaire d’État. Le poids du politique dans la destinée du patronat français, c’est d’ailleurs, avec l’importance accordée à l’explication conspirationniste de ses agissements et de sa stratégie, l’un des thèmes centraux de ce gros ouvrage. Du point de vue des relations sociales, la partie la plus intéressante du livre porte sur les années postérieures à 1998. Le CNPF devenu Medef, sous la conduite d’Ernest-Antoine Seillière et de Denis Kessler, est présenté comme l’orchestrateur de la « contre-révolution libérale ». Erwan Seznec décrit une tentative de « démantèlement de l’État social » qui aurait été menée, selon lui, par « deux puissants lobbies, les assurances et l’industrie pharmaceutique », qui veulent « toucher l’assurance maladie pour couler l’assurance vieillesse ». On le voit, le ton est à la polémique, et les portraits sont généralement à charge : DSK, le socialiste ami des patrons ; Attali, « prince des affaires »; Minc, « marchand d’idéologie »; Bébéar « le parrain » ; Nicolas Bazire, médiateur de luxe du sarkozysme dans le monde patronal. Les plus intéressants, moins connus du grand public, sont Émile Boursier, l’homme des caisses antigrève à la Métallurgie ; Aimé Aubert, superlobbyste du CNPF ; André Boutemy, autre « porteur de valises »; ou encore Jean Caillet, florissant intermédiaire des grandes entreprises sur les marchés internationaux. Leurs histoires sont autant de livres dans le livre.

Histoire secrète du patronat de 1945 à nos jours, sous la direction de Benoît Collombat et David Servenay. Éditions La Découverte. 726 pages, 25 euros.

Auteur

  • Jean Mercier