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Tableau de bord

Faut-il taxer davantage l’épargne salariale ?

Tableau de bord | publié le : 01.11.2009 |

Richard Duhautois Économiste, chercheur au Centre d’études de l’emploi

Depuis début 2009, une contribution dite « forfait social » a été mise en place pour renflouer la caisse d’assurance maladie des salariés. Les revenus de l’épargne salariale sont concernés par cette contribution payée par les employeurs. Il est prévu de faire passer le taux de 2 % à 4 % pour générer 400 millions d’euros supplémentaires. Ce surcoût pour les entreprises aura-t-il un effet négatif sur les rémunérations versées au titre de l’épargne salariale ? Pas sûr. Car les entreprises développent l’épargne salariale pour fidéliser leurs salariés et pour réformer leur politique de rémunération. Dès lors, elles n’ont pas intérêt à ce que les rémunérations diminuent. En outre, si, comme certains économistes le pensent, l’épargne salariale permet de diminuer la partie fixe de la rémunération (assujettie aux cotisations sociales) et d’augmenter la partie flexible (non assujettie), les entreprises auront toujours cette possibilité de substitution. S’il existe un effet négatif, ce sont sans doute les salariés des PME-TPE dans lesquelles il n’y a pas encore de dispositifs qui seront les plus touchés. Mais, pour les petites comme pour les grandes, ce qui importe, ce sont surtout des salariés motivés et une forte demande.

Laure Delahousse Directrice gestion spécialisée et épargne retraite à l’AFG.

L’instauration du forfait social puis son augmentation de 2 à 4 % un an après paraissent contradictoires avec la volonté des pouvoirs publics de développer l’intéressement et la participation dans les entreprises. L’incohérence est sensible pour les PME, dans lesquelles ces dispositifs sont facultatifs. Le gouvernement affiche une politique volontariste avec le crédit d’impôt de 20 % en faveur des entreprises qui instaurent l’intéressement pour leurs salariés. C’est une excellente mesure qui durera jusqu’en 2014. Le forfait social vient affaiblir le message. Car l’incitation est plus faible. D’autre part, alors qu’un grand débat sur les retraites est prévu en 2010, le doublement du forfait social enverrait un message incohérent aux entreprises qui souhaitent aider leurs salariés à compléter leur retraite à travers des dispositifs d’épargne. Six années après son lancement, le Perco vient de franchir le cap des 2 milliards d’actifs gérés (+ 36 % sur un an). Mais seulement 2 millions de salariés ont un Perco dans leur entreprise. Pour continuer à se développer, l’épargne retraite doit bénéficier d’un environnement fiscal et social incitatif et stable. Il faut donc exonérer de forfait social les sommes versées sur un Perco.

Jean Conan Secrétaire national du pôle économie de la CFE-CGC

La CFE-CGC est très attachée à la pérennité des dispositifs sociaux, donc à l’équilibre de leur financement. Mais cette mesure de « consolidation » cumule vraiment tous les défauts. Elle est d’abord inefficace. En effet, le doublement du forfait social sur l’épargne salariale de 2 % à 4 % n’est pas d’un ordre de grandeur cohérent avec celui du problème à résoudre. Ce n’est pas avec ce genre de « recette de poche » que l’on peut faire face à l’ampleur des déficits sociaux ! Elle est ensuite bien peu civique. Car elle donne l’exemple d’une inflation fiscale de 100 %. Comment l’État pourra-t-il ensuite reprocher, voire combattre, l’inflation fiscale des collectivités territoriales ? Enfin, cette mesure dénature à grands pas la pédagogie et l’efficacité des dispositifs d’épargne salariale au moment même où il est nécessaire d’encourager leur développement. Tout, ou presque, reste à faire là où ils seront les plus utiles : dans le tissu économique et social des PME et des PMI. Décidément, nos dirigeants ont perdu la logique la plus élémentaire qui voudrait que soit d’abord mise en place une vraie régulation des dispositifs sociaux et que soient ensuite mises à contribution à due proportion les véritables cavernes du gruyère fiscal français.

Pour en savoir plus

PLFSS 2010, Liaisons sociales quotidien n° 15464, 16 octobre 2009. www.wk-rh.fr

Dares, Premières Synthèses n° 31.2, juillet 2009. www.travail-solidarite.gouv.fr

Association française de la gestion financière (AFG). www.afg.asso.fr

Sécurité sociale. www.securite-sociale.fr/textes/cotis/cotisations/forfait/ forfait_social.htm

Lettre du Club de l’épargne salariale n° 23, juin 2009.