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Marseille, côté social

Innovation : les PME ne sont pas en reste

Marseille, côté social | Management | publié le : 01.09.2009 | E. B.

Alors que les grandes entreprises les plus généreuses rognent sur une partie de leurs avantages sociaux pour faire face à la crise, certaines PME jouent crânement la carte de la RSE.

Signe qui ne trompe pas, ni Philippe Marc ni François Suquet, son prédécesseur à la DRH du site de STMicroelectronics à Rousset, n’ont trouvé de partenaire pour créer un pôle de mobilité dans l’agglomération marseillaise, à l’instar de ce que l’entreprise a déjà organisé à Grenoble, avec Capgemini, Radiall, NXP Semiconductors et Hewlett-Packard. Mais, à la différence du bassin d’emploi isérois, il faut dire que l’industrie ne représente pas une part importante du tissu économique marseillais. Crise des activités portuaires et de la réparation navale aidant, l’emploi industriel diminue malgré la présence d’ArcelorMittal et Sollac à Fos-sur-Mer, de Shell à Berre-l’Étang ou d’Atmel à Rousset.

La construction d’une tour de 147 mètres de haut, qui abritera bientôt le siège du groupe CMA CGM, ne doit pas faire illusion. Seuls 3 % du volume transporté par le troisième armateur de transport maritime mondial en conteneurs passent par le port Marseille-Fos. Autre société emblématique de la cité phocéenne, le groupe Daher, constructeur et équipementier aéronautique, possède toujours son siège social dans l’agglomération. Mais tous ses services administratifs et fonctions support sont regroupés à Wissous, en Essonne.

Eurocopter Travailler plus…

Le premier employeur privé de l’agglomération reste néanmoins un industriel. Eurocopter emploie 7 141 personnes dans son unité de fabrication d’hélicoptères, située à Marignane. Portée jusqu’ici par le dynamisme de ses marchés internationaux, l’entreprise franco-allemande soigne son personnel. Jusqu’au 1er septembre, les salariés sur les lignes de production travaillaient quatre jours par semaine, officiellement. « Mais la majeure partie du personnel revenait le vendredi, en heures supplémentaires », indique Philippe Pezet, le DRH du site. Une situation qui perdurait depuis plus de dix ans, à la faveur d’un carnet de commandes pléthorique.

L’allongement des délais de livraison et les perspectives difficiles en 2010 ont conduit la direction à négocier un réaménagement du temps de travail en 2009. Après quatre mois de négociation sans conflit social, tous les syndicats sauf la CGT ont signé un nouvel accord en mai. Les horaires restent à 35 heures annualisées, mais les salariés travaillent désormais dix jours de plus avec des journées légèrement raccourcies (huit heures au lieu de huit heures vingt). « Nous avons obtenu le retrait des temps d’habillage et de déshabillage du calcul du temps de travail. Ainsi que la possibilité d’ajuster la production au plus près de la demande », explique le DRH. De leur côté, les syndicats mettent en avant une prime d’habillage de 50 euros par mois, une majoration de 20 % du tarif des heures sup et un abondement du nouveau compte épargne temps. « De plus, les représentants du personnel bénéficieront d’une information détaillée sur le plan de charge, 45 intérimaires seront recrutés en CDI malgré le gel des embauches et, chaque année, 39 apprentis bénéficieront d’un CDD de dix-huit mois à l’issue de leur formation », précise Vincent Deruy, délégué syndical FO.

AP-HM Réorganisation en profondeur

Un climat social que l’on retrouve dans une moindre mesure à l’AP-HM. Premier employeur public, les hôpitaux publics marseillais sont le troisième CHU de France et emploient quelque 16 600 personnes sur quatre sites. Face à un déficit grandissant, la direction a présenté un plan de restructuration de ses services et de réduction de personnel de 650 équivalents temps plein au cours des trois prochaines années. Et 21 millions d’euros d’aide publique seront consacrés à ce PSE qui ne dit pas son nom pour financer des mesures de départ volontaire et de reconversion professionnelle. Mesures approuvées par FO, le syndicat majoritaire.

Mais Jean-Charles Faivre-Pierret, le DRH, ne se contente pas de jouer les cost killers. Arrivé en octobre 2008, il a déjà réalisé une mini-GPEC pour y voir plus clair dans l’évolution de ses effectifs par grandes catégories de métiers et met en place la réorganisation des services en 28 pôles spécialisés, décidée par sa direction générale. « Les outils de GRH sont déployés par pôles pour améliorer la gestion du personnel au plus proche du terrain. Il me reste encore à renégocier le projet social avec les organisations syndicales », indique-t-il. Objectif : revenir sur une partie des 20 jours de RTT en vigueur à l’AP-HM. La négociation s’annonce tendue.

Ball Packaging Une politique salariale créative

Constitué à 94 % d’entreprises de moins de 10 salariés, le tissu économique marseillais n’en compte pas moins des PME d’une certaine envergure ou des filiales de grands groupes très volontaristes sur le plan social. Parmi ces dernières, Ball Packaging, qui emploie 170 personnes à la production de cannettes et d’emballages alimentaires en aluminium, lauréate du trophée RSE Paca (voir encadré page 55). De 2002 à 2008, Mathieu Laudet, son dirigeant, a augmenté les bas salaires de 27 %, car « il n’est pas possible de vivre décemment avec 1 050 euros net par mois », estime-t-il. Aujourd’hui, les plus petits salaires émargent à 1 200 euros net, sans compter une prime de présence et un treizième mois. Parallèlement, le directeur a instauré une « culture de la parole libre » du bas vers le haut de la hiérarchie. Une façon de favoriser un « programme de créativité » fondé sur le volontariat. Les meilleures idées pour améliorer la sécurité, la productivité ou la qualité des produits sont récompensées par un voyage à l’étranger. Enfin, l’accord d’intéressement est fondé sur l’efficacité d’utilisation des équipements, la qualité des produits, les taux d’accident du travail et de déchets constatés. Les sommes versées sans distinction de niveau de salaire s’élèvent en moyenne à 7 000 euros par an. « Le résultat est intéressant pour l’entreprise, précise Mathieu Laudet. Grâce à des taux de déchets très faibles et à un absentéisme quasi inexistant, le site de La Ciotat a les plus bas coûts de production en Europe. »

Profil et Archives Chrono Engagés dans l’insertion des jeunes

François Ranise, le patron de la société Profil, a également mis en place un accord d’intéressement. Mais son entreprise se distingue surtout par son engagement dans l’insertion professionnelle des publics éloignés de l’emploi. Spécialisée dans les travaux en hauteur réalisés en rappel avec cordage, Profil compte une trentaine de salariés et assure des prestations de maintenance industrielle, des travaux d’entretien de bâtiments et de nettoyage en milieu confiné. Ancien animateur socioculturel, François Ranise s’est d’abord tourné vers les jeunes de sa connaissance pour recruter. « Je cherche un engagement personnel et un comportement posé, explique-t-il. Le nouveau est formé par un ancien qui devient son parrain pendant une période probatoire. » Grâce au bouche-à-oreille, l’entreprise n’a jamais eu aucun problème pour recruter.

À la tête d’Archives Chrono, une entreprise de neuf personnes spécialisée dans la gestion et la conservation d’archives, Christian Malaterre consacre un quart de son temps à l’association Jeunesse et Entreprises, au titre de l’UPE 13 dont il est élu. « Dans mon entreprise, j’ai largement délégué les responsabilités », indique-t-il. En contrepartie, ses salariés bénéficient d’un accord d’intéressement et d’une transparence totale sur les résultats. Entre lui et le plus petit salaire, l’écart n’est que de un à trois. Archives Chrono dispose d’outils RH dignes d’un groupe. Les 35 heures, instituées en 2004, sont gérées en souplesse, en fonction de la charge de travail. Et chaque salarié bénéficie d’un entretien annuel mené par le patron.

CLASSEMENT DES DIX PREMIERS EMPLOYEURS

1 AP-HM 16 600 salariés

2 COMMUNE DE MARSEILLE 11 650 salariés

3 EUROCOPTER 7 141 salariés

4 PORT (GPMM) 4 500 salariés

5 ARCELOR-MITTAL 3 500 salariés

6 RTM 3 250 salariés

7 STMICRO-ELECTRONICS 2 750 salariés

8 CMA CGM 2 300 salariés

9 HÔPITAL SAINT-JOSEPH 2 140 salariés

10 SNCM 2010 salariés

Des lieux de réflexion clairsemés

Marseille compte peu de réseaux dans lesquels les directeurs des ressources humaines peuvent échanger. L’ANDRH Provence organise un colloque annuel et quelques débats avec les partenaires sociaux, mais peu d’occasions permettent aux DRH de confronter leurs expériences. Pour se tenir au courant de l’actualité juridique, les responsables RH fréquentent d’abord leur syndicat professionnel. « L’Union des industries et des métiers de la métallurgie constitue le principal appui technique local », estime Philippe Pezet, DRH d’Eurocopter. L’Union des industries chimiques Paca et Corse et la commission sociale de l’Union pour les entreprises des Bouches-du-Rhône (Medef) organisent également des réunions sur des thèmes d’actualité juridique. Certains cabinets de consultants nationaux comme BPI, Altedia et le cabinet Horemis possèdent une représentation locale permanente. Ce dernier organise des petits déjeuners d’information de temps à autre. Pour combler ce manque de lien entre professionnels, les responsables RH de grandes entreprises comme CMA CGM, le CEA, Dassault Aviation, STMicroelectronics ou encore Avenir Telecom ont constitué un cercle de réflexion informel. Animé par Marc Molenat, manager RH chez Eurocopter, il propose des réunions à thème ouvertes aux managers des fonctions RH des entreprises participantes. Les résultats de ces échanges ne donnent lieu à aucun compte rendu.

Créé en 2005, RSE Paca n’est pas réservé aux DRH. Mais ce site d’information sur le développement durable est une mine pour tous ceux qui s’intéressent à la GRH. L’association Innovation en action, qui le gère, remet chaque année les trophées RSE Paca pour récompenser la mise en place de politiques sociales, sociétales et environnementales progressistes. Toutes les entreprises de la région peuvent répondre à un questionnaire élaboré avec l’UPE 13, la CGPME, FO, la CFDT, la CFTC et la CFE-CGC. Le jury est composé de représentants patronaux et syndicaux et les réponses de la direction sont toujours validées par les élus du personnel. Un renouvellement du dialogue social sanctifié par un nombre croissant de candidatures.

Auteur

  • E. B.