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Idées

Le règne de l’émotion et de la confusion

Idées | Bloc-Notes | publié le : 01.05.2009 | Rose-Marie Van Lerberghe

HARO SUR LES PATRONS !

L’aveuglement des patrons qui s’octroient stock-options, bonus et autres parachutes dorés au moment où les salariés souffrent de la crise n’a d’égal que l’hypocrisie des politiques qui s’indignent à qui mieux mieux. Les patrons sont désignés à la vindicte populaire sur l’air des « aristocrates à la lanterne ». Cette belle indignation détourne fort opportunément l’angoisse et l’agressivité sociale vers d’autres et masque surtout la difficulté d’apporter des solutions. Les mesures législatives ou réglementaires pour mettre fin aux abus ne sont pas évidentes. La loi sur la transparence de la rémunération des mandataires sociaux n’a pas induit leur modération mais peut-être au contraire leur emballement par effet de comparaison. Il serait bon que les quelques-uns qui abusent prennent conscience qu’ils font porter le discrédit sur l’ensemble.

DES SYNDICATS MODÉRÉS

Si le secrétaire général de la CFDT s’est courageusement porté au secours de la majorité des patrons qui sont loin de partager les mêmes excès, c’est qu’il sait bien que leur diabolisation risque de porter l’exaspération sociale bien réelle à des extrémités inutiles et suicidaires.

On observera que les grands syndicats évitent soigneusement de jeter de l’huile sur le feu et que les cas de séquestration sont orchestrés par des minoritaires ou des francs-tireurs. Mais, du coup, les responsables nationaux sont accusés d’être « dépassés », débordés par une base réceptive aux discours de l’extrême gauche, et peinent à tenir un discours audible dans ce concert d’émotion, de compassion et d’indignation.

TOUS CONTRE

Le sentiment d’injustice des salariés face à la crise et la radicalisation des conflits sociaux qui en résulte viennent paradoxalement aiguiser les débats qui agitent ces deux mondes relativement protégés que sont l’hôpital et l’université. La fronde qui monte autour de la loi hôpital, patients, santé, territoires est assez révélatrice du climat d’angoisse et de suspicion qui règne aujourd’hui. Les médecins hospitaliers redoutent le primat d’une logique administrative et financière. Mais ils protestent aussi contre la disparition des services alors qu’il n’en est pas fait mention dans le projet de loi. Justement, si on n’en parle pas, c’est qu’on veut les supprimer !

À l’inverse, les directeurs d’hôpital, qui devraient se réjouir de devenir enfin les patrons, redoutent de perdre leur monopole à la tête des hôpitaux publics et beaucoup vont même jusqu’à se persuader que le projet de loi en signifie la mort annoncée car il parle exclusivement de missions de service public, lesquelles peuvent être assurées par le privé. Alors même que les responsables de clinique privée sont persuadés qu’ils sont étranglés financièrement pour permettre à l’hôpital public de prospérer puisqu’il est intouchable socialement ! Une telle situation d’exaspération des angoisses et des procès d’intention rend difficile l’analyse sereine et le dialogue, elle encourage les amalgames. Elle appelle surtout une ligne claire, cohérente, constante dans les réformes engagées, et le respect des interlocuteurs et de leur sincérité, même lorsqu’ils paraissent irrationnels.

Auteur

  • Rose-Marie Van Lerberghe