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Les pratiques

Prévenir les TMS par l'implication des salariés

Les pratiques | Retour sur... | publié le : 20.04.2010 |

Sur un an, de fin 2008 à fin 2009, huit entreprises rhônalpines de l'agroalimentaire ont expérimenté une méthode de lutte contre les TMS par l'écoute des salariés. Une approche qui permet de réaliser des investissements plus performants.

En Rhône-Alpes, l'agroalimentaire occupe 2 % des salariés, mais concentre 6 % des maladies professionnelles. « C'est pourquoi, avec 8 entreprises du secteur (1), nous avons lancé, fin 2008, une action pour favoriser la prise en compte du risque TMS [troubles musculo-squelettiques] dans les projets d'investissement », explique Martine Boussier, du Centre européen d'entreprise et d'innovation (CEEI) du technopôle Alimentec, à Bourg-en-Bresse (01).

Des investissements subventionnés

Expérimentale, la démarche s'est appuyée sur une méthodologie du cabinet conseil Teo, avec divers partenaires (2) et autour de la Cram de Rhône-Alpes (Cram-RA). La plupart des entreprises avaient un problème avec les TMS. « Mais le seul aspect médical ne suffisait pas à les impliquer, analyse Jean-Yves Catta, directeur du cabinet Teo. Il a fallu argumenter sur une amélioration de la productivité ou de l'hygiène. » Toutes avaient aussi un problème de vieillissement des salariés et un investissement à réaliser.

D'octobre 2008 à octobre 2009, les sociétés concernées ont bénéficié d'un programme d'accompagnement, avec 7 réunions collectives et 5 individuelles, pour un coût de 15 000 euros, dont plus des deux tiers financés par le Fact (Fonds d'amélioration des conditions de travail). Objectif : transmettre une méthodologie s'appuyant sur une amélioration du dialogue social et de la gestion du cahier des charges.

Résistance des salariés

Impliquer le personnel ne s'est pas fait sans quelques résistances. « Nos opérateurs craignaient que le nouveau matériel ne supprime leur douleur, mais aussi leurs emplois », explique Frédéric Lafont, responsable de site adjoint de Plastilav (26), entreprise de nettoyage industriel. A Europagro, entreprise d'abattage, les ouvriers de la ligne «porc», qui devait être changée, étaient « fiers de leur savoir-faire et sceptiques quant à une possible amélioration », remarque Sandra Azambre, responsable qualité-sécurité.

Pourtant, l'implication des salariés de la production a permis, comme à la fromagerie Guilloteau, « de mieux cibler des détails et de ne pas acheter un matériel inutile, comme cela nous est arrivé pour une table de mise à niveau ! », analyse Béatrice Luquet, DRH. Faute d'un avis de terrain, Frédéric Lafont a dû, lui, « remanier du matériel commandé, au risque qu'il ne devienne source de TMS ».

Dialogue avec les fournisseurs

L'amélioration du cahier des charges passe, elle, non seulement par le dialogue en interne, mais aussi avec le fournisseur. A la fromagerie Guilloteau, la préparation de ce document implique aujourd'hui des opérateurs, des ergonomes, des médecins du travail et le CHSCT. « Il faut être précis et faire entendre son besoin, confirme Vincent Stocker, agronome du cabinet Teo. Il faut aussi inviter son fournisseur sur le terrain. Mais, en même temps, ne pas brider sa créativité par des consignes trop restrictives. » Frédéric Lafont, qui prône un certain « minimalisme », estime également « qu'il est important de tester les équipements avant de les installer », ou, comme le relève Béatrice Luquet, « de pouvoir les visualiser en 3D ».

Six mois après la fin de l'action de prévention des TMS par l'investissement, les entreprises impliquées ont adopté les outils testés, aujourd'hui présentés dans un guide (lire ci-dessous). Pour mener de nouveaux projets d'investissement, comme à la fromagerie Guilloteau ou chez Europagro. Ou même pour « étendre la méthode de dialogue aux autres problèmes de l'entreprise », comme le dit Frédéric Lafont.

Compétences améliorées

« Toutes les entreprises ont amélioré leurs compétences et changé de culture, résume Catherine Brossat, ingénieure conseil à la Cram-RA. L'action est expérimentale, mais elle offre un levier énorme pour faire avancer la prévention dans le secteur. » En Rhône-Alpes, le CEEI vient de lancer une nouvelle opération sur la prévention des TMS, cette fois auprès des équipementiers.

(1) Plastilav (26), Guilloteau (01), Europagro (26), Eckes Granini (71), Chambost (69), Biscuiterie Td'A (69), Appétit de France (26), Agis (69).

(2) Aravis, l'Agence régionale des industries alimentaires (Aria), les Direccte de Rhône-Alpes et de Bourgogne, AG2R Isica (prévoyance santé).

UN GUIDE NÉ DE L'EXPÉRIENCE

Basé sur l'expertise du cabinet Teo et l'expérimentation dans les 8 entreprises qu'il a suivies, le guide «Prévention des TMS dans l'agroalimentaire» propose aux investisseurs une méthodologie et des outils pour orienter leur projet vers la prévention des TMS. L'ouvrage déroule une chronologie en cinq méthodes - définition, investigation, structuration, coconception, finalisation - auxquelles correspondent des outils : grilles à double entrée, questionnaires, observation de terrain ou check lists des acteurs... « De la pure méthodologie, résume Jean-Yves Catta, directeur de Teo, mais en prise avec la pratique. »

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