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Les pratiques

La formation a été sous-exploitée en Alsace

Les pratiques | Retour sur... | publié le : 06.04.2010 |

Lancée il y a un an, l'incitation du conseil régional d'Alsace à envoyer en formation des salariés en période de chômage technique n'a attiré que 20 entreprises pour 2 400 salariés. La Franche-Comté voisine a fait mieux. La collectivité alsacienne paie sans doute la rigueur de ses critères et la frilosité des employeurs.

Pas de chance. Pour une fois que la région Alsace s'enhardissait à faire une large publicité pour l'une de ses initiatives, celle-ci n'a pas rencontré le même succès que d'autres, plus discrètes. Organisé par l'accord-cadre du 7 avril 2009 avec les partenaires sociaux, l'envoi en formation de salariés touchés par le chômage partiel n'a attiré, en onze mois, que 2 400 collaborateurs d'une vingtaine d'entreprises, pour un total de 68 000 heures. Arrêtés début mars, « ces chiffres sont infimes au regard de l'ampleur de la crise », commente, déçu, le responsable régional de la CFDT Bernard Marx.

Discrétion des employeurs

Autre indicateur de la sous-utilisation : seulement un tiers de l'enveloppe de 1 million d'euros votée en 2009 pour financer les formations a été consommée. Comment l'expliquer ? Bernard Marx avance une « promotion qui aurait pu être mieux coordonnée » et des « tergiversations » dans l'attente des textes nationaux sur l'articulation formation-chômage technique. La communication a bien fonctionné, de même que la coordination avec les Opca, estiment, en revanche, les représentants du patronat. Ils partagent avec la collectivité l'argument principal du souci de discrétion des employeurs. « Entrer dans le dispositif induit de faire savoir qu'on subit du chômage partiel », rappelle Georges Waltz, président de la CGPME Alsace.

Critères assouplis

Pour accéder aux crédits régionaux, l'entreprise devait, en effet, avoir déposé une demande officielle de chômage technique auprès de la Direction du travail. Motivée par la quête d'un critère objectif, la règle présente un inconvénient : elle restreint le périmètre de l'initiative, en la privant du «vivier» des nombreuses entreprises en sous-activité sans être formellement en chômage partiel.

La Direction du travail en a tiré récemment les conséquences, en assouplissant ses critères. La Franche-Comté et la Lorraine voisines l'avaient fait d'emblée, et leur bilan s'en ressent. La première a inclus les entreprises en «réduction forte d'activité» pour afficher un bilan de plus de 10 000 salariés en formation (360 000 heures cumulées) en provenance de 72 entreprises. Autre facteur de succès identifié, sa task force Etat-collectivités-partenaires sociaux-Opca a été réactive.

Versement immédiat des fonds

Partie dès mars, la Lorraine a également facilité les démarches, du moins des PME, qui devaient se contenter de prouver leur «difficulté économique» au vu de l'évolution de leur chiffre d'affaires. Une centaine ont adhéré, au bénéfice de 550 salariés. « L'absence d'impact sur la trésorerie, grâce au versement immédiat des fonds, a joué un rôle capital », relève Jean-Marc Baugé, directeur d'Opcalia Lorraine.

En Alsace, le cadre plus strict de l'opération l'a concentré, de fait, sur les grandes entreprises, pour l'essentiel. Parmi les 20 adhérentes, le recordman a été Steelcase (mobiliers de bureau) avec 420 de ses salariés envoyés en formation au lean management, en 12 modules toujours en cours, d'un coût pédagogique cofinancé à 50 % par la région et par l'Adefim. « Nous avions constaté qu'il fallait consacrer davantage d'efforts à l'appropriation de ces outils introduits en 2003. Lors des pointes de chômage partiel, qui ne nous permettaient pas de tenir notre engagement d'occuper le personnel au moins quatre jours sur cinq, nous avons dédié ce quatrième jour à la formation. Celle-ci engendre une nette augmentation de la participation aux chantiers d'amélioration continue », décrit Elisabeth Fetter, responsable formation.

Pendant ce temps, les PME alsaciennes se sont plutôt tournées vers le plan anticrise de l'Agefos qu'elles fréquentent au quotidien. « Les formations collectives préexistantes pour les TPE ont connu une hausse de fréquentation de 13 %. L'enveloppe de 260 000 euros allouée aux «10-50» a été consommée à 85 % au 31 décembre », relate le directeur régional René Malatrait.

Au moment de dresser le bilan, les acteurs régionaux invitent à additionner à l'initiative du conseil régional les actions propres aux entreprises ou aux Opca. « Tout ceci mis bout à bout, on constate dans notre branche une explosion du DIF, le développement des CQPM, etc. La formation a joué son rôle d'amortisseur de la crise », estime Guy Borg, délégué général de l'UIMM du Bas-Rhin.

Gain en compétences

La qualité des stages, donc leur pertinence et leur effet dans le temps, est plus difficile à appréhender. La région Franche-Comté annonce 85 % de formations d'adaptation-perfectionnement, dont 13 % qualifiantes et 74 % de salariés estimant avoir gagné en compétences. Reste à confirmer dans la durée. Jacques Bauquier, responsable régional CGT, en appelle à un « acte II qui ait une traduction durable pour les salariés en termes de reconnaissance, dans les rémunérations, les qualifications et les promotions ». Un bon chantier post-régionales.