logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les pratiques

États-Unis Les réformes sociales aux mains des lobbys

Les pratiques | publié le : 16.03.2010 |

Loi sur la représentation syndicale ou réforme de la santé, ces grands projets piétinent ou voient leur champ réduit : ils subissent d'incessantes campagnes menées par des spécialistes des relations publiques. A Washington, le social aussi fait l'objet d'un intense lobbying.

L'Employee Free Choice Act, projet de loi cher au coeur des syndicalistes américains, a été introduit devant le Congrès en mars 2009. Ce projet, censé permettre l'émergence d'un syndicat dans l'entreprise, a été rêvé, pensé, peaufiné pendant de longues années par les ténors de l'AFL-CIO, fédération de 56 syndicats qui espèrent ainsi élargir leur influence. Et ils ont cru leur heure enfin venue lorsqu'une majorité d'élus démocrates, favorables à leurs thèses, s'est installée au Sénat et à la Chambre des représentants. Pourtant, le dossier Employee Free Choice Act piétine. De longs mois se sont écoulés, et le vote de la loi paraît de plus en plus incertain...

Intermédiaires obligés

Raisons de l'enlisement ? Le mode de fonctionnement du Congrès américain, qui se repose de plus en plus sur les lobbys, ces puissantes entreprises de relations publiques, intermédiaires obligés entre les élus et les syndicats, compagnies, associations... désireux de faire valoir leur point de vue dans le débat.

La pratique du lobbying est si courante à Washington que ses grands acteurs ont presque tous pignon sur rue, sur la rue K en l'occurrence. Et leur puissance, étudiée par le Center for Responsive Politics, se résume à deux chiffres. Total des dépenses en lobbying en 2009 : 2,51 milliards de dollars. Nombre de lobbyistes : 13 310.

L'US Chamber of Commerce et ses 3 millions d'entreprises

Le droit du travail, la réforme de la santé, l'immigration... sont des sujets d'actualité passionnants pour les lobbyistes de tous bords. Et ils ont justifié une bonne partie des efforts déployés par l'US Chamber of Commerce, à Washington. La chambre de commerce américaine, qui représente 3 millions d'entreprises adhérentes, s'est, en effet, révélée le groupe de pression le plus dépensier l'an dernier. Elle y a consacré 144,5 millions de dollars, soit 60 % de plus qu'en 2008.

Randel Johnson et son service d'une douzaine de lobbyistes préparent déjà les dossiers au sein de la chambre de commerce. « Ils rencontrent les attachés des élus, écrivent des courriers, envoient des rapports », explique Dave Levinthal du Center for Responsible Politics. Et puis, ils se font représenter par des cabinets d'experts. La chambre de commerce travaille ainsi régulièrement avec Mayer Brown LLP et Peck Madigan. But du jeu : retarder le plus possible l'arrivée des syndicats dans l'entreprise.

Et sur le front de l'assurance santé : éviter que les employeurs ne paient de lourdes pénalités s'ils refusent d'assurer leurs salariés. Sur ce dossier, la chambre de commerce fait cause commune avec la Business Roundtable, General Electric et la National Retail Federation. Elle se retrouve assez souvent en phase avec l'association des laboratoires pharmaceutiques PhRMA qui, l'an dernier, a consacré 26 millions de dollars au lobbying.

Les syndicalistes aussi

De l'autre côté de la barrière : les syndicats AFL-CIO, Teamsters, International Brotherhood of Electrical Workers... en faveur de l'Employee Free Choice Act et d'une grande réforme de la santé. Les syndicalistes travaillent, eux aussi, avec les lobbys de Washington : McCann Capitol Advocates et Palmetto sont des contacts réguliers. Mais leurs moyens sont plus modestes. Les syndicalistes en sont parfois réduits à apporter leur soutien financier au comité de réélection d'un candidat... en espérant que celui-ci soutiendra leur cause le moment venu. En 2009, l'ensemble des contributions du monde du travail aux élus s'est limité à 22,5 millions de dollars, selon le Center for Responsive Politics. Et, pour l'instant, leurs dossiers clés restent sur la liste d'attente.