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La réduction du temps de travail à la rescousse

Enquête | publié le : 02.03.2010 |

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La réduction du temps de travail à la rescousse

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Solde des compteurs de JRTT ou des CET, conventions de chômage partiel : pour préserver l'emploi, les entreprises en difficulté économique recyclent de «vieux» outils de réduction du temps de travail.

Déclarée moribonde à la fin des années 2000, la réduction du temps de travail n'avait finalement pas dit son dernier mot. Confrontées aux premières difficultés économiques dès la fin de l'année 2008, les entreprises ont redécouvert les vertus défensives de certains de ses outils. Dans un premier temps, elles ont d'abord incité leurs salariés à solder leur compteur de JRTT ou à piocher dans leur compte épargne temps (CET).

Dispositifs en sommeil

« Certains employeurs ont également réactivé des dispositifs en sommeil, comme l'annualisation, qui permet d'enchaîner des périodes basses d'activité », explique Martin Richer, directeur général de Secafi (groupe Alpha). Avant même qu'il ne soit question de chômage partiel, le groupe PSA a, ainsi, ranimé son dispositif de modulation du temps de travail baptisé «H +/H-» qui permet, notamment, de demander à un salarié qui aurait chômé 25 jours au cours d'une année, d'en rattraper 12 l'année suivante. Lors des jours chômés, le salaire est maintenu intégralement.

« Issu de notre accord 35 heures, ce dispositif de flexibilité avait été imaginé comme contrepartie à l'augmentation du coût du travail », explique un porte-parole du groupe. Alors que la crise s'installe, PSA a signé un avenant, en avril 2009, qui porte la période de chômage à 45 jours maximum contre 15 jours de rattrapage, répartis, cette fois, sur trois ans.

Approches novatrices

« L'année dernière, ont émergé des approches novatrices permettant d'aller d'une gestion annuelle rigide des congés à une gestion pluriannuelle, explique Martin Richer. Avec le CET comme compteur, on peut demander à certaines catégories de salariés de prendre des congés par anticipation et de les rattraper sur plusieurs années, avec un abondement éventuel de l'employeur. » Cette approche inédite n'a cependant pas toujours été accueillie avec enthousiasme, tant par les services déconcentrés de l'Etat, qui y voient d'abord une logique à contre-courant de celle alors prônée par le gouvernement, que par les salariés.

Par deux fois depuis le début de la crise, Michelin a, ainsi, proposé la mise en place d'un «compte épargne temps débiteur». Contre le maintien de la rémunération à 100 %, le dispositif aurait permis de chômer 15 jours par an, rattrapables à hauteur de cinq jours maximum par an avec un abondement de 20 % de l'entreprise. Pas un syndicat n'a souhaité apposer sa signature. « La flexibilité des équipes techniques est déjà suffisamment importante, explique Cyrille Poughon, de la CFDT. Les salariés, qui craignaient, notamment, que ces jours soient rattrapés le week-end, préférent voir leur rémunération légèrement amputée du fait du chômage partiel. »

Pour éviter, de son côté, que les compteurs de temps des salariés ne se grèvent d'un trop lourd passif, Eurocopter a mis en place, en septembre 2009, un «compteur épargne temps collectif» (CETC). Prévu par l'accord «Safe», signé quelques mois plus tôt, il entend constituer pour chaque salarié une «réserve» de 160 heures en trois ans, alimentée par l'entreprise à hauteur de 112 heures et par le salarié à hauteur de 48 heures (soit 16 heures par an). « Fonctionnant comme un dispositif d'assurance obligatoire, le CETC garantit à chaque bénéficiaire, quelle que soit sa contribution individuelle, un crédit minimum de 112 heures pouvant être utilisé pour pallier une baisse significative de charge, tout en bénéficiant du maintien de sa rémunération à 100 %, » explique Jean-Baptiste Ertlé, DRH du site de Marignane. Chaque salarié non cadre (population ciblée par l'accord) devra donc travailler deux jours de plus par an sans rémunération afin d'anticiper une éventuelle baisse d'activité. Si les jours ne sont pas utilisés au bout de trois ans, le solde créditeur est placé en CET individuel, récupérable en temps ou en argent. Pour l'heure, l'entreprise n'a pas eu besoin de piocher dans cette réserve.

Des limites atteintes

La flexibilité accrue générée par le passage aux 35 heures, qui avait permis, selon une étude du ministère du Travail parue en 2008, de diviser par cinq le recours au chômage partiel entre 1996 et 2005, semble cependant, cette fois, avoir atteint ses limites. En dépit des dispositifs d'amortissement internes aux entreprises, l'année 2009 aura, en effet, été celle du retour sur le devant de la scène du chômage partiel, subventionné par un Etat conscient que les entreprises ne pourraient pas tirer indéfiniment sur la corde. « Cette fois encore, cependant, rien n'a été inventé, souligne Xavier Lacoste, directeur général d'Altedia. Comportant les mêmes clauses de préservation de l'emploi, les conventions actuelles de chômage de longue durée sont les avatars des anciens Trild (temps réduit indemnisé de longue durée), initiés en 1993 et eux-mêmes rapidement remplacés par les accord de RTT défensifs de la fin des années 1990. Dans notre économie éminemment cyclique, il semble que la réduction du temps de travail ait encore de beaux jours devant elle. » A. D.