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L'épargne retraite continue de convaincre

Dossier | publié le : 20.10.2009 |

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L'épargne retraite continue de convaincre

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Malgré la crise, les entreprises continuent de communiquer sur les retraites. Certaines ont même bouclé la négociation de Perco. La conjoncture pousse à mettre en oeuvre des contributions de l'employeur souples et renégociables.

Plus de 2 milliards d'euros sont épargnés sur des Perco (plans d'épargne pour la retraite collectif) par des salariés. Ce cap a été franchi en juin dernier, selon l'Association française de gestion (AFG). C'est dire que, même si les périodes de faible croissance sont généralement plus propices aux revendications de pouvoir d'achat, l'épargne retraite ne cesse d'intéresser les salariés et les employeurs.

Les 2,3 milliards d'euros bloqués sur des Perco au 30 juin dernier représentent, en effet, un encours global supérieur de 36 % à celui de l'année dernière et, sur 2 millions de salariés couverts, 480 000 ont effectué des versements, soit 22 % de plus qu'il y a un an.

L'épargne retraite toujours favorite

Même si le gouvernement applique, désormais, une taxation sociale sur l'épargne retraite - qu'il souhaite d'ailleurs porter à 4 % dans son projet de loi de finance de la Sécurité sociale (ce qui reste bien inférieur aux charges pesant sur les salaires) - et même si la participation est désormais déblocable, l'épargne retraite reste favorisée. « Elle est soutenue par de récentes réformes législatives, confirme Patrick Azières, directeur épargne salariale et épargne retraite chez Hewitt. Les entreprises doivent, désormais, entamer des négociations sur la retraite non plus cinq ans, mais trois ans après l'ouverture d'un plan d'épargne. D'autre part, la loi du 3 décembre 2008 sur les revenus du travail prévoit la possibilité d'une adhésion automatique des salariés à un Perco ainsi que celle d'un versement d'amorçage de l'entreprise sur ce dispositif. »

Résultat de ce volontarisme, le bilan de l'année 2009 s'avère respectable pour les acteurs du marché de l'épargne d'entreprise et ce, même si certaines échéances ont fait porter une bonne partie des efforts sur la santé et la prévoyance. « Ce n'est pas une année creuse, confirme Pierre Genest, responsable grands comptes de SGAM. Nous sentons une montée en puissance du besoin de retraite ; or, les dispositifs privés ne représentent encore que 5 % du financement des retraites. » Il a ainsi constaté que les «mid caps», moyennes entreprises cotées, continuaient de s'équiper. Par ailleurs, quelques négociations ont fini par aboutir chez des géants comme EDF, qui devait compenser le transfert de son avantageux régime de retraite vers le régime général (lire p. 26), ou encore chez EADS, en discussion depuis près de deux ans avec les partenaires sociaux. Les entreprises interrogées, cet été, par Adding, pour l'enquête annuelle Focus Benefits 2009 (lire p. 25), ont réaffirmé que les retraites restaient leur enjeu majeur à long terme.

De l'actionnariat salarié au Perco

Effet de la crise ? Certaines entreprises qui favorisaient l'actionnariat salarié jusqu'ici ont aussi ouvert un Perco (dispositif dans lequel il n'est pas possible d'investir à plus de 5 % sur des actions de l'entreprise). C'est le cas d'Alcatel-Lucent, qui fait bénéficier son nouveau Perco de la structure d'abondement généreuse mise en oeuvre pour l'actionnariat salarié (lire p. 28).

Cinq ans après la création des plans d'épargne retraite collectifs par la loi Fillon sur les retraites, les nouveaux Perco, mis en oeuvre par des DRH et des Compensation & Benefits managers aguerris aux retraites par capitalisation, sont paramétrés de plus en plus finement, par exemple pour favoriser les jeunes, qui ont le temps d'épargner mais qui seront plus touchés par la dégradation des taux de remplacement. C'est le calcul de Dassault Aviation, qui vient d'ouvrir le sien (lire p. 26).

Certains plans proposent un fractionnement mensuel des investissements par prélèvement sur le salaire, permettant aux plus faibles rémunérations de profiter de l'abondement maximum.

Aide de l'employeur

Si la souplesse du Perco séduit, les régimes collectifs obligatoires à cotisations définies (articles 83) restent historiquement implantés dans les entreprises, avec plus de 35 milliards d'euros d'encours en 2007 (en diminution néanmoins). Très efficaces dans une démarche catégorielle, ils permettent à des cadres, dont le taux de remplacement assuré par les retraites publiques est plus faible, de cotiser avec l'aide de l'employeur. Mais certaines entreprises se sont montrées volontaristes en étendant le dispositif à l'ensemble de leurs salariés, comme Coca-Cola.

Quels que soient les systèmes mis en place, l'enjeu pour les entreprises est de les valoriser et de parvenir à communiquer efficacement sur ces éléments de rémunération différée. Et les spécialistes de la rémunération n'ont pas chômé, cette année, sur les appels d'offres pour des bulletins sociaux individualisés (BSI), qui valorisent chaque élément de la rétribution.

Rémunération globale

Certaines entreprises, telle Lilly France, en ont fait une part de leur rémunération globale et les intègrent dans la NAO (négociation annuelle obligatoire), où est, par exemple, discuté le niveau de l'abondement au Perco. C'est une tentation dans beaucoup d'entreprises, mais le principe de non-substitution, instauré dès le départ par la loi Fabius, reste un écueil, entretenant le risque que les sommes versées en franchise sociale et fiscale ne soient pas requalifiées par les Urssaf. Rien de tel chez Lilly, où les augmentations dépassent l'inflation depuis des années et sont même plutôt généreuses. « Cette année encore, nous poursuivrons cette politique salariale, annonce Jean-Baptiste Labrusse, le DRH. Mais nous voulons continuer à réfléchir aussi sur ce qui se trouve à côté des salaires, et à ce qui se passe après l'entreprise. »

Abondement lié aux performances

Chez Lilly, l'enveloppe d'abondement est lié aux performances de l'entreprise. Sur les deux dernières années, il dépendait en partie des chiffres de production de l'usine d'Alsace et du chiffre d'affaires du siège et des services commerciaux de Suresnes. L'article 83, ouvert il y a trois ans par accord (lire Entreprise & Carrières n° 908), et qui associe une cotisation salarié de 0,2 % du salaire et employeur de 0,9 %, semble faire plus difficilement ses preuves. « Il n'est pas certain que ce dispositif soit apprécié à sa juste valeur ; s'il devient une routine ou même est critiqué, nous n'excluons pas de ne pas le renouveler, pour affecter notre contribution sur d'autres postes », précise ce DRH pragmatique.

L'année 2010 risque d'intensifier la réflexion des entreprises et des salariés : la participation et l'intéressement, alimentations principales de l'épargne salariale, seront généralement faibles, contrairement à ceux de 2008 versés en 2009. Les choix d'allocations seront d'autant plus déterminants. Sans compter que de nouveaux besoins entrent dans l'équation, notamment en santé. « Alors que les entreprises doivent maintenir le régime de santé de leurs ex-salariés et souhaitent souvent éviter une mutualisation des coûts avec le régime des actifs, elles doivent réfléchir au financement de la mutuelle des retraités », explique François Cheynet, directeur associé chez Towers Perrin, qui a étudié la question avec plusieurs clients. Certaines entreprises l'ont déjà fait. Ainsi, Sanofi Aventis a contrebalancé la sortie de ses retraités du régime de santé des actifs en créant un article 83 spécifique, destiné au financement des frais de santé des futurs retraités. ADP a pris le même chemin ; Arkema réfléchit à un Perco.

Fins de carrière incertaines

A cette multiplication de besoins spécifiques des futurs retraités s'ajoute, désormais, une incertitude grandissante sur les fins de carrière, avec la disparition de la mise à la retraite d'office. « Une zone grise entre 60 et 70 ans, pronostique Philippe Caré, chez Mercer. Certaines entreprises commencent à réfléchir à des formes d'«incentives au départ», mises à part les pré-retraites, bien entendu, qui s'adresseraient aux cohortes de seniors qui font le choix individuel de rester après 61, 62, 63 ans. » Les «Comp & Ben» et les DRH, avec la multiplicité des outils d'épargne désormais à leur disposition, vont pouvoir faire preuve d'imagination...

L'essentiel

1 Dans une période marquée par la réduction des budgets, la retraite reste une préoccupation de moyen terme des entreprises.

2 Quelques très grands groupes ont bouclé un accord de Perco, certaines «mid caps» se sont équipées. Beaucoup d'entreprises ont communiqué sur la retraite.

3 Les employeurs usent de toute la souplesse permise par ces dispositifs pour paramétrer leur contribution, en fonction de populations précises ou des résultats de l'entreprise.

Dans les grandes entreprises, le paysage de la retraite reste stable

L'enquête Focus Benefits, réalisée par Adding et dont les résultats ont été rendus publics le 13 octobre, constate que les grandes entreprises ont conservé, peu ou prou, les mêmes outils d'épargne retraite cette année. Mais les modes de contribution employeur continuent d'évoluer.

« Un quart des entreprises disposent d'un Perco ; la moitié, d'un régime à cotisations définies ; une sur dix, d'un Pere, énumère Benoît Meyer, responsable du pôle retraites d'Adding, qui a réalisé l'étude Focus Benefits en juin dernier auprès de 75 grandes entreprises. L'équipement de ces entreprises est resté stable d'une année sur l'autre. »

Néanmoins, dans l'utilisation de ces dispositifs et le mode de contribution de l'employeur, se lit la pérennisation de l'effort porté sur les retraites des salariés.

> Perco

24 % des entreprises en sont équipées, une proportion importante liée à la composition du panel, où figurent surtout des grandes entreprises. Parmi elles, un quart n'abondent pas les versements des salariés. Pour les autres, un tiers abondent à moins de 100 % et 41 %, de 100 % à 200 %.

Dans ce panel, aucune ne pratique d'abondement supérieur à 200 %. « Des abondements à 300 % existent parfois, constate, par ailleurs, Benoît Meyer, mais ils sont généralement plafonnés assez bas. » Si ce niveau d'équipement en Perco n'a pas varié, les Perco récents sont souvent créés par un accord complété d'une négociation sur le mode et le niveau d'abondement.

> Régime à cotisations définies

Six entreprises sur dix ont un article 83 ou un Pere (10 %). Elles sont aussi nombreuses à le destiner à l'ensemble des salariés qu'à leurs cadres. La contribution consentie par l'employeur y est plus importante que pour un Perco. L'enquête indique que, dans 42 % des cas, ses cotisations à un article 83 ou à un Pere atteignent annuellement plus d'un million d'euros. Pour les Perco, ce montant n'est en vue que dans 25 % des cas.

« Des régimes à cotisations définies continuent de se mettre en place, indique Benoît Meyer. Un certain nombre d'entreprises prévoient des cotisations salarié et employeur faibles au départ, pour sensibiliser aux enjeux de la retraite, avec, par la suite, une montée en puissance. »

> Régime à prestations définies

Le quart des entreprises interrogées disent en avoir un. Dans la moitié des cas, ils sont fermés aux nouveaux entrants. Les régimes chapeaux (ou différentiels) continuent de représenter la majorité de ces articles 39. « Mais, de plus en plus, ces régimes ne chapeautent en fait qu'un article 83 », précise Benoît Meyer. Ceux qui se mettent encore en place sont essentiellement des régimes additifs : ils garantissent une fraction du dernier salaire (et non le complément de revenu nécessaire pour parvenir à un niveau prédéterminé, ce qui est très lourd en termes d'engagement social). G. L. N.