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Les pratiques

Chine Employé-employeurs, le rapport de force s'inverse

Les pratiques | publié le : 06.10.2009 |

La Chine est, actuellement, ébranlée par la crise. Impact psychologique et réelle difficulté à trouver un emploi, les travailleurs chinois revoient leurs ambitions à la baisse.

«Les cols blancs ne sont pas épargnés par la crise. Du point de vue du recruteur, c'est une excellente nouvelle et un renversement complet », constate Frédéric Vaissaire, DRH d'EnsivalMoret, une entreprise franco-belge qui produit des pompes industrielles à Shanghai. Jusqu'à présent, les salariés chinois changeaient très facilement de poste ; les départements RH multipliaient augmentations de salaire, formations, avantages sociaux sans parvenir à retenir les «petits empereurs», les hauts profils. Désormais, le chômage guette. Chez Ensival-Moret, des postulants surqualifiés acceptent de revoir leurs prétentions salariales de 20 % à 25 % pour un poste de secrétaire de direction ou de comptable. Ils viennent souvent de l'automobile ou de l'immobilier, deux secteurs durement frappés.

La Chine connaît toujours une croissance enviable (+7,1 % au dernier trimestre), mais son économie est ébranlée. Le chômage représente 4,8 % de la population active selon les chiffres officiels, probablement beaucoup plus puisque Pékin ne recense pas l'emploi parmi les ruraux ou les très nombreux travailleurs sans contrat. Tous les secteurs n'ont pas dégraissé : dans la vente de détail, qui continue de se développer dans les régions pauvres du Centre et de l'Ouest, les enseignes peinent encore à attirer des travailleurs qualifiés. Mais la crise a un impact sérieux sur le moral des salariés tous secteurs confondus ; mêmes les plus demandés ont appris la prudence et évitent, désormais, les changements de carrière trop abrupts. Résultat : « Le turn-over, pire fléau jusqu'à présent, a chuté. Il s'établirait autour de 10 %, contre 45 % dans les entreprises urbaines jusqu'ici », estime Marc Dawson, créateur de Talent Spheres, cabinet RH et organisations.

Guerre des talents

McKinsey estime que 75 000 hauts dirigeants chinois aux compétences internationales seront nécessaires d'ici à 2010, alors qu'il n'y en aurait pas plus de 5 000. C'est dire si la chasse et la rétention des talents locaux restent d'actualité. « La guerre des talents devient plus qualitative », ajoute Marc Dawson. Les multinationales, notamment, imposent une forte pression sur leur filiale chinoise, dont elles attendent des bénéfices. Il n'est plus question de recruter et d'investir sur des hauts potentiels qui partiront dans le semestre. « La période est parfaite pour remplacer 20 salariés moyens par 5 employés mieux adaptés au profil et, pourquoi pas, moins chers », analyse Eric Tarchoune, du cabinet de conseil en management Dragonfly. Autre point en faveur d'un recrutement plus pointilleux, la récente loi du travail de 2008 impose des indemnités à chaque fin de contrat, jusqu'à un an de salaire, même si le gouvernement semble avoir relâché sa pression pour l'application de la loi du travail dans ce contexte de crise.

Développer les RH

Beaucoup d'entreprises sont tentées de limiter leur stratégie de fidélisation. « C'est la revanche des traditionalistes, et c'est une erreur », analyse Marc Dawson. Si la crise ne permet plus d'augmenter les salaires ou les primes, il faut autant que possible garder le contact avec ses équipes. Stella Hou, responsable du département rémunérations pour la zone Asie-Pacifique de Hewitt Associates, cite l'exemple d'un client sur le marché chinois des nouvelles technologies, qui a négocié des baisses de salaires et des congés sans solde avec ses salariés plutôt que de les renvoyer. Aujourd'hui, les commandes reprennent et l'entreprise a pu rapidement relancer la production.

Les professionnels voient une aubaine pour développer les RH en Chine. « Notre rôle a un peu changé. Cette année, nous avons été beaucoup plus consultés pour des audits RH, pour évaluer et optimiser les organisations », explique Eric Tarchoune. Même les grandes entreprises chinoises consultent, désormais, pour rendre leur gestion des ressources humaines plus compétitive.